Chapitre 82 (Partie 2)

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Le jour commençait à tomber quand Joshua, dans son habit de soirée, rejoint sa femme qui assise devant sa coiffeuse patientait alors que Christine arrangeait son chignon en y plantant des épingles ornées de strass en forme d'étoiles. Elles se mariaient avec les motifs brodés en fil d'argent sur le velours bleu nuit de sa robe du soir dont le col largement échancré dévoilait des épaules d'albâtre. Appuyé sur le chambranle de la porte, et caressant distraitement la grande tête d'Hadès, son mari l'observait avec une admiration non dissimulée. Il avait assorti son gilet à la tenue de Cassandre. Pour leur première sortie officielle, il voulait absolument qu'ils marquent les esprits.

— Tu es une apparition, lui avoua-il en un souffle.

Il vint s'asseoir sur le rockingchair installé tout près d'elle. C'était un meuble solide mais élégant qui ne jurait pas trop avec le reste du mobilier de la pièce. Elle l'avait placé là spécialement à son attention malgré les récriminations du décorateur. Elle avait remarqué que Joshua appréciait de la voir se coiffer. Il arrivait même qu'il se saisisse de la brosse et avec délectation et une délicatesse insoupçonnable chez un géant comme lui, il démêlait la soie de ses longs cheveux, puis il massait tendrement son crâne que Christine martyrisait à grand renfort d'épingles, de postiches, de coussinets de crins et de fer à friser.

De l'autre côté e la coiffeuse se trouvait un immense coussin moelleux où se prélassaient Artie et Cluaran. Ils furent projetés en l'air quand le grand lévrier s'y laissa tomber. Le petit cairn roula au sol en grognant mais vint s'installer entre les pattes de son ami géant qui l'utilisa comme un appui tête hirsute. La chienne rousse aussi digne qu'à son habitude, les observa d'un œil blasé, qu'avait-elle fait pour mériter de tels compagnons ?

Cassandre se sentait parfaitement entourée et se refusa à penser à son frère toujours au loin où à ses parents disparus, même si elle aurait tant voulu qu'ils puissent la voir en cet instant.

Elle fit semblant de ne pas remarquer le coffret recouvert de cuir que Joshua tenait dans ses mains et continuait de polir distraitement ses ongles. Voyant qu'elle ne poserait aucune question, il l'installa négligemment sur la coiffeuse. Cassandre continua d'ignorer ostensiblement la boite. Légèrement agacé devant l'échec criant de son effet, il tapota du doigt l'écrin. Combien de temps allait-elle feindre de ne pas voir son présent ? Après avoir ri de bon cœur, elle eut pitié de lui.

— Alors mon ami ! Qu'avons-nous là ?

— Je suis fâché, je ne pense pas que tu mérites un cadeau. Moi qui voulais te gâter ! Mais finalement...

— Quel enfant tu fais !

— Il m'a fait penser à toi, déclara-t-il presque timide. J'ai pensé qu'il se marierait avec cette robe qui te va à ravir et...

Elle posa son index sur sa bouche pour le faire taire. Il avait si peu confiance en ses goûts depuis qu'elle et Mr Miller avaient détricoté tout ce qu'il avait pensé élégant dans cette maison qu'il s'imaginait déjà Cassandre lui jeter son cadeau à la figure.

Il embrassa la pulpe du doigt de sa femme toujours posé sur ses lèvres. Il prit une grande inspiration et fit tourner le minuscule fermoir de l'écrin.

Il dévoila un ensemble de bijoux qui arracha à la femme de chambre qui coiffait toujours lady Blake, une exclamation admirative.

— Milord ! C'est de toute beauté !

— Christine. Je pense que vous avez fini, déclara Cassandre.

— Oui Milady !

Après avoir planté une dernière épingle et quitta la pièce et ferma la porte derrière elle. Les époux l'entendirent trotter. Sans doute allait-elle partager avec toute l'office la description du présent du maitre de maison.

Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant