Les Élus de Paramoni

4/Le cadavre de la ruelle

L'ALARME STRIDENTE DU RÉVEIL FIT SURSAUTER CLARY, elle abattit brutalement sa main pour le faire taire avant que cette musique lancinante ne lui brise les tympans. Elle plissa les yeux, aveuglée par les rayons du soleil qui s'écrasaient sur son lit. Par se fenêtre, Clary observait l'été jeter ses derniers feux. Les arbres étaient d'un vert éclatant, le ciel d'un bleu à la fois vif et doux.

Elle était encore secouée par ses rêves peuplés de serpents géants et de femmes d'une beauté irrationnelle. Clary repoussa d'un geste irrité la pesante couverture brodée et elle s'assit, les cheveux en bataille, les lèvres sèches et le teint blafard. Elle ne se souvenait pas de s'être endormie, elle était encore toute habillée. Et ce fichu sentiment de malaise ne l'avait pas quittée, qu'est-ce que cette ville renfermait pour la chambouler ainsi ?

« La rentrée s'annonce bien... » se dit-elle.

Clary dévala les escaliers et se rendit dans la salle à manger où tout le petit monde était déjà levé. Lydia était bien habillée et parfaitement maquillée. Cette élégance fit sourire Clary.

— C'est toi Clary ? demanda une petite voix derrière son dos.

Elle se retourna. Un petit garçon roux la dévorait d'un regard curieux.

— Je suis Julian, bienvenu dans ma maison !

Clary fit un petit sourire et tendit une main que Julian serra avec gratitude et vigueur d'une petite main frêle.

— Enchanté Julian.

Il lui sourit avec une bouche aux dents manquantes, puis l'attrapa par son tee-shirt et la tira vers la table qui trônait au milieu d'une pièce agencée avec goût et luxure.

— Tu as quel âge ? Moi, j'ai cinq ans.

— J'ai seize ans, lui répondit-elle.

— Tu es jolie... et tes yeux sont vraiment très bleu !

Lydia se dirigea vers sa nièce, elle lui pressa tendrement l'épaule et lui demanda :

— Clary, tu as bien dormi ? La route t'a vraiment fatiguée, tu t'es endormie sans manger.

Elle réalisa qu'elle n'avait pas appelé Charlie, elle avait été prise d'une si grande fatigue qu'elle avait oublié tout ce qu'elle devait faire... et puis cette peur constante n'avait rien arrangé. Durant la nuit, elle s'était sentie observée, épiée dans les ténèbres. Elle remarqua que l'homme assit en bout de table l'observait du coin de l'œil.

— Je n'ai pas pu me présenter, dit-il. Je suis Georges Jenkins. Ravi d'enfin te rencontrer Clarissa. Ça fait des années que Lydia me parle de toi et de ta sœur, bienvenu dans ta nouvelle maison.

Clary adressa un sourire poli à cet homme dans la quarantaine aux cheveux si parfaits que cela en devenait inquiétant. Elle nota que son père avait revêtu son uniforme de shérif, affichant fièrement le blason de Fox Glow ; un arbre enroulé d'un serpent gigantesque.

Les serpents... elle eut un frisson de dégoût.

Dans un bâillement peu discret, Erika fit son entrée, ce qui étonna Clary. Voir sa sœur levée tôt sans violence en période de cours, la laissa bouche-bée. D'ordinaire, Clary aurait dû la tirer du lit elle-même avant de lui faire la morale sur l'importance des cours, et crier pour éviter tout retard au lycée.

— Quelle guêpe t'a piquée pour que tu sois levée sans mon aide ? s'enquit Clary.

— Tu parles d'une aide. La dernière fois que tu m'as réveillée, tu as renversé mon lit alors que j'étais dedans, marmonna-t-elle en venant s'asseoir face à sa sœur.