Les Élus de Paramoni

26/L'épée du démon

MARDI APRÈS-MIDI, Clary s'était recueillie sur la tombe de sa mère. Elle s'était assise en tailleur devant la pierre tombale où le nom d'Émilie Young était gravé et ne s'était pas détachée d'elle. Elle soupira et renversa la tête en arrière, le visage larmoyant aux cieux qui soutenaient les dieux de l'Olympe.

— Je suis complètement perdue, j'ai besoin de ton aide, murmura-t-elle en se redressant. Je ne sais pas qui je suis, je ne sais pas qui tu es... comment je suis censée faire maintenant ? J'aimerai tout savoir. Si papa est bel et bien un Damné... jamais il n'a agi comme ces monstres. Ou s'il est bien mon père...

Clary renifla et essuya ses yeux. Elle fouilla dans la poche de son jean et sortit la photo du mariage de ses parents, celle où se trouvait l'inconnu aux cheveux blonds et aux yeux dorés. Il n'y avait pas de doutes, c'était un Damné. Une essence surnaturelle l'embaumait. L'homme était bien plus élégant dans son costume de velours bleu nuit, que son père. Fièrement humain dans sa tenue de marié. Cependant, les yeux de sa mère brillaient d'un amour tendre et sincère pour David Young, l'adolescent perdu dont Emilie était tombée amoureuse.

L'idée que sa mère ait pu tromper son père et avoir un enfant avec cet homme aux cheveux de blés, lui était parfaitement inconcevable. Malgré les évidences qui lui sautaient aux yeux, Clary restait sceptique. Elle n'avait pas grand-chose en commun avec cet inconnu ! Si ce n'était la couleur blonde de ses cheveux ou son sang damné !

Si Clary ne croyait pas à cette théorie, que l'homme sur cette photo soit son véritable père, elle était persuadée qu'il connaissait la vérité. Comment le retrouver ? Il n'y avait aucun nom ni aucune autre trace ! Le seul lien était sa tante ! Tout comme la vie sacrée d'Emilie et Lydia Vasilis avait disparu, l'homme était un de ces fantômes du passé dont plus personne ne parlait.

— Tu m'as toujours éduquée avec toute ta bonté et ta gentillesse pour faire de moi la bonne petite citoyenne respectable... continua Clary. Mais je n'arrive plus à suivre ce chemin. Si tu savais tout ce que j'ai pu faire, tu aurais honte ! Erika va mal aussi...

Clary se leva et tapota son jean droit pour en faire tomber la terre, puis rangea ses mains dans son blouson bleu marine. Les mots bouillonnaient dans sa tête, elle voulait lui dire tellement de choses mais rien ne sortit. Tout simplement parce qu'elle ne reconnaissait plus sa propre mère.

Clary reprit le chemin vers les grilles du cimetière mais alors qu'elle faisait mine de s'en aller, une silhouette l'arrêta. Clary distinguait une forme noire qui se tenait debout près d'une tombe.

Elle s'approcha d'un pas peu assuré, craquant les feuilles sur son passage comme si elle marchait sur les morts enterrés sous ses pieds. Mais elle fut soulagée de se rendre compte qu'il ne s'agissait que de Neven...

Il se tenait debout au-dessus d'une plaque de fer incorporée dans le sol, un bouquet de fleurs blanches enroulées dans un joli ruban rouge à la main. Il ne semblait pas s'être aperçu que Clary s'approchait de lui, Neven était muré dans un silence que lui seul connaissait.

— Salut, murmura-t-elle.

Neven battit des cils, comme sorti de la transe par sa voix.

Il fronça les sourcils, s'accoutumant à la lumière vive du jour.

— Tiens, Blondie.

Elle s'assit sur le haut d'une pierre tombale et Neven imita son geste, elle frappa dans ses mains puis observa la tombe de Victoria qui ne montrait aucune salissure, ses cendres étaient à l'abri.

— Tu l'aimes encore ? demanda Clary.

— Je l'aimerai toujours.

Elle avait compris à quel point Victoria était importante pour Neven, tout l'amour et la passion qu'il avait pour cette défunte jeune fille qu'elle n'égalerait jamais.