Chapitre 28

30 3 0
                                    


La nausée m'accompagne durant l'intégralité du trajet que je fais en voiture pour rejoindre le restaurant, autrement dit, le point de rendez-vous avec Paul.
Je ne peux pas reculer, m'en prendre à lui ou trouver je ne sais quelle excuse pour dire que je n'y suis pour rien parce que ce n'est pas le cas : je suis celle qui a demandé une solution pour aider Antoine, et même si je n'avais pas cette option en tête, elle me paraît moins horrible et dégoûtante que toutes les autres que je pouvais m'imaginer.

Puis, je dois bien avouer que Paul est différent de ce que je pensais. Il n'est pas la personne parfaite, celle à qui je confierai ma vie ou ce que j'ai de plus cher, mais il peut se montrer sympa. Même si les quelques messages envoyés ne sont pas nombreux et qu'ils ne s'étendent pas, il n'est pas quelqu'un qui force. Il m'a juste envoyé la date, l'heure et l'adresse pour se retrouver.

Et c'est ce que je fais, actuellement installée dans ma voiture, à me regarder à travers le rétroviseur intérieur. J'ai voulu opter pour un jogging et un sweat-shirt afin de lui montrer que je n'ai rien à faire de ce dîner et qu'il n'a aucune valeur à mes yeux.
Puis je me suis rappelé que peu importe ma tenue, l'endroit ou la personne avec qui je me trouve, une soirée doit se savourer sous toutes ses coutures.
C'est pour ça que je me suis vue enfiler une paire de collants fin, une jupe, un pull noir et un long manteau crème passe partout, avec mes cuissardes pour accompagner le tout.
Je n'ai pas froid, malgré qu'Halloween soit passé et que nous soyons de plus en plus en automne.

J'aime cette saison, ses couleurs et ses odeurs.
J'aime que l'hiver avance à grands pas.

Quand j'aperçois la voiture noire de Paul, je prends une grande inspiration avant de sortir de la mienne, n'oubliant ni mon sac, ni mon téléphone.
Dos à moi sur le grand parking de la ville où il m'a demandé de venir, il ne me voit pas marcher jusqu'à lui. Ce sont les claquements de mes talons contre le goudron qui le font tourner la tête vers ma direction.

Lorsque son regard me détaille de la tête aux pieds, je me stoppe dans mes mouvements et sens mes joues s'empourprer. Durant les quelques courtes secondes qui s'écoulent pendant lesquelles aucun de nous parle, je me dis que mon choix vestimentaire est une très mauvaise idée et qu'un vieux jogging aurait été l'idéal.
Quand je m'autorise un rapide coup d'oeil sur son corps pour examiner sa tenue, je me dis qu'il n'a pas fait d'effort particulier, vêtu d'un col roulé noir et d'un pantalon aussi sombre. Ses habituelles rangers ont été troquées contre des baskets basiques mais qui pourraient laisser voir son bracelet s'il lève trop la jambe.
Sa chaîne autour du cou est visible et je vois qu'il en a une seconde avec un tout petit pendentif, comme une pierre.

- Bonsoir Juliette, dit-il d'une voix calme et posée contrairement à ce fichu palpitant qui me donne l'impression d'avoir couru un marathon alors que je viens juste de marcher pendant une minute trente à tout casser.

Je me force à lui sourire gentiment et le salut en retour.
Il regarde rapidement son téléphone et me dit que nous sommes à l'heure. On se dirige alors, dans un silence qui n'aide pas mon cerveau à se mettre en pause et à se calmer pour ne pas être en surchauffe, vers notre lieu de repas.
Pour ne pas faire monter la pression, je n'ai pas regardé dans quel restaurant nous allions : me connaissant, j'aurai passé en revue le menu pour essayer d'anticiper le moment où nous allions devoir choisir notre plat et écourter le repas.
Mais j'ai réussi à ne pas le faire, à passer au-dessus et à me dire que ce n'est qu'un repas entre amis.

Ce que nous ne sommes absolument pas, et ce que nous ne serons jamais.
Mais mon cerveau a, je crois, réussi à y croire assez fort pour ne pas que je craque de la journée.

A présent que la devanture de notre spot de ce soir se dresse devant moi, c'est tout autre chose.

- T'es complètement malade d'avoir commandé ici, je lui fais remarquer alors que nous entrons dans le somptueux hall d'entrée de ce restaurant 4 étoiles.

À la poursuite du bonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant