Chapitre 44

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Le 30 décembre, 11 heures 50,
Appartement d'Hector, Cholet





ANTOINE


Je ne suis plus sobre.

Tout le monde est au courant de cette information à mon égard. C'est écrit en noir sur mon front : " JE NE SUIS PLUS SOBRE".

Je suis à pointer du doigt, à juger, à critiquer et à médire.

Je ne suis plus sobre.

Ce n'est pas une grande nouvelle, certains se demandaient même quand est-ce que j'allais reprendre, quand est-ce que j'allais toucher le fond, à nouveau.

Je ne violente pas mon corps en le coupant. Je le violente en lui injectant toutes sortes de substances néfastes. Et les mélanges que je fais aggravent la situation. Dans combien de temps va-t-il me lâcher ? Dans combien de temps va-t-il franchir la ligne fatale ?

Est-ce que c'est ce que je cherche ? Est-ce que je veux qu'il trouve cette ligne et qu'il la dépasse ?

Tu as été abusé.

Tu as été abusé.

Tu as été abusé.

Tu as été abusé.

Putain.

Les mots d'Anthony tournent en boucle dans ma tête depuis 2 jours, sans arrêt, même la nuit.

J'ai beau tourner encore et encore dans mon lit, chaque position ne retire pas le sentiment que je ressens au fond de moi-même : le dégoût. De ma propre personne.

Depuis deux jours je ne quitte ce lit que pour aller aux toilettes. Vu que je ne bois et ne mange pas, ces allers-retours sont très rares.

Les évènements qui me mettent dans cet état remontent d'il y a plus d'un mois alors pourquoi suis-je ainsi, à ce point mal uniquement maintenant au point d'avoir appelé Loïc malgré les dettes que j'ai fait traîner ?

Peut-être parce que deux personnes sont au courant.

Peut-être parce que je l'ai dit à haute voix.

La tête sur l'oreiller, la couverture rabattue sur la tête, j'ai la visite d'Hector entre quatre et cinq fois dans la journée. Il vérifie que je ne suis pas devenu un cadavre, bien qu'à l'intérieur de moi, plus rien n'a de vitalité, et me demande ce dont j'ai besoin.

Ne plus rien ressentir.

Voilà ce dont j'ai besoin.

Et c'est pour cette raison que j'ai contacté Loïc, parce que l'alcool et les médicaments sont loin de me suffir maintenant. J'ai besoin de plus, et de plus fort. C'est une nécessité. C'est vital. J'ai été surpris de l'entendre me dire que quelqu'un viendra vers moi dans la journée : j'aurai pu mettre ma main à couper qu'il allait m'envoyer chier après les mois où je l'ai fait attendre pour rembourser ses dix milles euros.


Quand la porte s'ouvre, je me dis que c'est la troisième visite d'Hector de la journée. Mais je ne reconnais pas sa démarche sur le parquet.

Ce n'est pas Hector.

Mon corps a beau être en alerte, il n'a pas la force de se tourner pour regarder de qui il s'agit. Puis ce n'est pas comme si, la pièce étant plongée dans le noir, que je verrais quelque chose. Et je crois que cette personne est dans la même situation quand elle se prend un des meubles.

À la poursuite du bonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant