Chapitre 25.3

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Lyrie

Mes yeux s'étrécissent, tandis que mon cœur s'affole. Je presse le roi :

— Vous savez où il se trouve ?

— Laissez-moi quelques jours pour que je vérifie certaines choses. Et je serai en mesure de vous répondre.

Sa réponse évasive m'intrigue, mais je me sens gonflée d'espoir.

— Sachez également que vous avez le soutien de Cindra, Reina Walkyria. Nous vous aiderons, dans la mesure du possible, à délivrer Evalon du joug du roi Herald.

— Merci, Majesté. Heu, Geoffrey, je me corrige en rougissant. C'est bien plus que je ne l'avais espéré.

— En attendant, laissez-moi vous proposer de séjourner dans le palais. Vous êtes mon invitée d'honneur et je tiens à vous recevoir comme il se doit, ainsi qu'à vous apporter ma protection pendant la durée de votre séjour à Priah.

— Je ne veux pas vous importuner.

— J'insiste. C'est mon devoir. Vous êtes une réfugiée politique, vous demeurerez auprès de moi, en sécurité.

J'accepte, honorée. Je ne peux empêcher un pincement au cœur à l'idée de quitter la maisonnette chaleureuse des garçons. Et de m'éloigner d'Oliver... Mais au moins, je pourrai pleinement me reconcentrer sur ma quête. Il est temps que je mette tout « ça » de côté et que j'endosse mon véritable rôle de Reina Walkyria.

— Je vais vous faire préparer un appartement dans l'aile des invités d'honneur, ajoute-t‑il. Vous pourrez y emménager dès ce soir, après le bal d'anniversaire de ma fille.

— Merci pour tout, Geoffrey. Une dernière chose.

— Oui ?

— Des drauhr ont traversé l'Arragast. Nous avons été attaqués ici même à Cindra, non loin des terres du baron d'Ernel.

— Oliver m'en a parlé, en effet. J'ai déjà pris des dispositions pour faire surveiller l'Arragast et alerter les seigneurs.

— Seul le titanium peut les vaincre, je précise. Vous devriez en équiper vos soldats si vous en possédez.

— J'ai une centaine d'armes en titanium dans l'armurerie royale. Des vestiges de l'ancien temps. Mais il n'existe pas de mine de titanium à Cindra. Nous n'avons jamais pu en fabriquer d'autres.

— Le feu les ralentit. Bien que seul le souffle de dragon puisse les détruire réellement. Vous pouvez aussi les repousser dans les mers, ils ne meurent pas mais ne savent pas nager : ils resteront coincés au fond de l'eau. La décapitation les handicape également. Privés de leur tête, ils tournent en rond et finissent par s'effondrer au sol, incapables de se relever. Et évitez les morsures, qui provoquent des maladies infectieuses virulentes, et mortelles la plupart du temps.

— Merci pour ces informations précieuses. Je vais faire porter ces instructions dans tout le royaume. D'après vous, pour quelle raison les drauhr ont-ils traversé l'Arragast ? Evalon compte-t‑il entrer en guerre avec nous ?

Je fronce les sourcils et choisis mes mots avant de répondre :

— Je pense que les drauhr sont ici pour moi. Ou du moins la personne qui les contrôle. Pour m'empêcher d'avoir cette conversation avec vous. Et surtout, pour éviter que je retrouve le véritable roi d'Evalon. Il est né avec la Marque des dieux, ce n'était pas arrivé depuis des siècles ! Je reste persuadée que la famille royale a été annihilée à cause de cette naissance.

— Vous le pensez capable de renverser Herald et son armée de drauhr ?

— Je n'en sais rien. Mais s'il a hérité des dons de son ancêtre Arthur Pendragon, tout n'est pas perdu. Alors, je ne peux que l'espérer.

— Espérer le retour des dragons...

— L'art des Murmures, je confirme.

— Ce serait un grand bouleversement pour tous les royaumes, concède le roi.

Pense-t‑il que l'héritier soit une menace ?

— Mais un bouleversement bienvenu, ajoute-t‑il, devinant mes craintes.

— En espérant...

— Que ce soit une « bonne personne » ? complète-t‑il.

Je hoche la tête.

— Les choix des dieux reste indiscutable. Mais ils ne se sont jamais trompés. Ayez la foi, Lyrie.

Oui, Geoffrey a raison. Impossible que les dieux aient créé un autre monstre. Autrement, nous sommes perdus ! Et si c'est le cas, je mettrai tout en œuvre pour tenir ma promesse et lui planter une dague en plein cœur.

— Ce soir, je vous présenterai à la cour et à mes généraux, m'informe le roi. Afin que vous connaissiez les figures fortes de mon armée. Certaines d'entre elles pourraient vous accompagner à Evalon, lorsque vous aurez trouvé votre roi.

— Merci, Geoffrey. Cela m'aiderait à protéger l'héritier.

— Nous aurons le loisir de rediscuter de tout cela plus tard. Pour l'heure, je dois écourter cette entrevue.

— Bien sûr. Merci de m'avoir reçue. Et surtout, de m'avoir prise au sérieux.

— J'ai parfaitement conscience de la situation préoccupante d'Evalon. Et je vous aide pour protéger Cindra également. Je refuse que mon royaume subisse une invasion de créatures dangereuses. Je nous pensais à l'abri grâce à l'Arragast, mais manifestement, ils ont trouvé un moyen de le traverser.

— Il existe certainement des failles, dis-je. Car il est impossible autrement qu'un si grand nombre ait réussi à passer.

— Dans ce cas, nous les trouverons.

J'acquiesce, avant de me lever. Geoffrey fait appeler Fergus, qui pénètre à son tour dans l'imposant bureau. Le panideri neberu salue le roi avant de lui donner une accolade chaleureuse. De toute évidence, ces deux-là sont amis.

— Comment se portent mes chasseurs préférés, Fergus ? demande-t‑il.

— Ils sont en forme, Majesté, répond Fergus en souriant. Rina est impatiente d'accompagner ses frères en expédition. Quant aux jumeaux... ils sont égaux à eux-mêmes. Vous avez vu Oliver ce matin, je ne vous apprendrai donc rien de nouveau à son sujet.

Je surprends un regard entendu entre les deux hommes.

— Lyrie va s'installer au palais dès ce soir, l'informe Geoffrey.

— Très bien.

— Je te vois ce soir pour l'anniversaire de ma fille ?

— Je ne manquerais ça pour rien au monde !

Les deux hommes se saluent gaiement avant que nous prenions congé. Tandis que nous marchons vers la sortie, je questionne Fergus au sujet de sa relation avec le roi :

— Vous semblez bien connaître Geoffrey.

— Il a sauvé ma famille, répond-il immédiatement. Sans lui, Rina et Oliver seraient morts. Je lui dois énormément.

Je tique à la mention d'Oliver. N'est-il pas un enfant adopté ? Je m'en étonne :

— Oliver était avec vous lorsque vous êtes arrivé à Cindra ?

— Non. Je voulais dire que nous ne l'aurions pas connu s'il ne nous l'avait pas confié. Peut-être serait-il mort aussi dans un orphelinat.

Je le sens nerveux. Comme toujours et encore quand il s'agit d'Oliver. Je compte bien profiter de ma soirée à ses côtés pour lui faire avouer ce que tout le monde me cache à son sujet. 

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant