Chapitre 1

20K 951 300
                                    

L'impact des doigts sur la porte de bois résonna dans tout le couloir.

L'adolescente, qui lisait dans son lit, déposa son livre avec précipitation laissant échapper un « c'est pas trop tôt ». Elle marcha, courut presque, vers la porte et l'ouvrit joyeusement avant de dire :

– Bonjour messieurs ! Je vous en prie, entrez ! Voici ma chambre, vos appartements sont juste à côté. Ils prennent le quart de l'étage. Les miens en prennent la moitié et la dernière partie, équivalente au dernier quart, est une espèce de grenier où l'on range tous mes vieux jouets et habits dont on n'a pas réussi à se débarrasser. Je vous préviens, la dernière fois qu'une gouvernante s'y est aventurée, elle a mis exactement deux heures quarante-huit à en sortir. Je le sais parce que j'ai chronométré. Bref...

Pendant qu'elle leur parlait, la jeune fille de dix-sept ans les conduisit à l'autre bout de la pièce, où se trouvait une discrète petite porte. Les deux hommes se jetèrent un coup d'œil, gênés par la situation. On leur avait décrit la princesse comme une jeune fille fugueuse et difficile à gérer. On les avait prévenus, montré des autoportraits ou bien l'une de ses évasions.

Ils s'attendaient à tout, sauf à se retrouver face à une adolescente joyeuse, pleine de vie et aussi bavarde.

– Allons ne faites pas cette tête ! Elle rit. Je dois avouer que vous êtes tout drôles, gênés ainsi. Vous vous demandez comment je fais pour voir vos émotions malgré votre masque impassible que vous vous obstinez à garder sans arrêt ? Dix ans d'expérience messieurs.

À présent elle les regardait, un sourire espiègle sur le visage, et la main droite placée sur une poignée de la porte. Elle continua :

– Vous vous demandez aussi pourquoi j'ai l'air si gentille alors que vos supérieurs m'ont décrite comme un véritable monstre ? Haaa... je sais, je sais, je devrais être voyante. Bon, soyons bref... Vous êtes mon quatre-centième binôme de garde du corps !!

La brunette avait dit cette phrase en criant et écartant les bras, telle une enfant surexcitée, mais dans tous les cas, pas comme une héritière du trône. Elle ouvrit la porte.

– Et c'est pour fêter cette nouvelle centaine passée que je suis gentille avec vous et que je jure de ne pas fuguer aujourd'hui !

Il était vingt-et-une heure.

– Bon, voici vos appartements. La moyenne du trimestre étant d'une semaine et un jour, vous y resterez plus longtemps si vous avez de la chance, moins longtemps si vous êtes chiants.

La salle, d'environs cent-cinquante mètres carré, possédait des murs gris et blancs. On y trouvait deux grands lits, des armoires et des ordinateurs. Sans oublier les dizaines d'écrans où l'on voyait l'intégralité des pièces dans lesquelles la princesse pouvait se rendre, les jardins, et toutes les fenêtres. Autant dire que le nombre d'écrans était gargantuesque...

Quelque part, on devait pouvoir trouver les clefs du palais, des armes et du « gaz qui endort » comme l'appelait Léna alors qu'elle était encore une enfant. Ainsi que de nombreuses autres choses dont les agents pourraient avoir besoin durant leur séjour qui, de toute façon, ne sera pas bien long.

– Entrez, entrez, Sixtine ne devrait pas tarder.

La dénommée Sixtine était une gouvernante, cheveux noirs coupés au carré, visage sévère mais fatigué, l'uniforme toujours impeccable. C'était une vieille maniaque qui connaissait Léna depuis toujours, au grand malheur des deux femmes.

Justement, la voilà qui arrivait, à de petite enjambées, ridicules mais rapides.

– Bonjour, j'imagine que Juliette vous a déjà quelque peu présenté les lieux...

Princesse LénaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant