88 - Delphine

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Musique en média

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Ruby

La réminiscence du passé est comme un jet d'éclaboussures arides sur la face. Ça me fouette la peau, me macule l'épiderme, infeste mes pores et me ferait presque honte... si je n'étais pas aussi heureuse de le trouver là. Son cœur bat a folle allure contre mon torse, et sa respiration erratique est difficile à appréhender : est-il heureux de me voir ? Stressé de me revoir ? Furieux... vis-à-vis des révélations qu'il m'a faite, mais dont je ne suis pas sûre qu'elles furent réelles ?

Je ne dis rien.

Les lèvres scellées, je chantonne « Cette lettre que tu m'as écrite... est-ce qu'il se lit "au revoir" ? Peut-être un étrange "bonjour" ? ». Dylan la connait-il ? Comprend-il le sens de mes mots anglais ? J'ai l'impression que ces années ont délacé nos liens... je n'arrive plus à le comprendre, ni à le deviner.

Si sa poitrine enfle autant, est-ce par fureur, ou dépit ? S'il ne se retourne pas, est-ce car il ne souhaite pas me voir, ou qu'il en a peur ? Est-ce qu'il sait ? Le brouillard de mes quatre années revient m'englober avec plus d'insistance, répandant son réseau autour de moi et à m'en faire trembler, dans l'humidité de larmes qui ne coulent pas. J'embrasse son omoplate en couchant ensuite mon front dessus. Il m'a manqué.

J'ai envie de lui montrer à quel point en révélant mon corps, de ses hideux bleus que lui ne m'aurait jamais creusé, à l'état de ma libido souffrante et gémissante qui souhaite se l'accaparer une nuit volée. Je me tasse un peu plus contre lui pour m'imprégner de sa présence, en serrant les dents et pinçant mes lèvres, les yeux clos.

La paix est là... tout au creux de son cœur battant, m'aimant... peut-être toutefois plus autant qu'avant. Peut-être même plus du tout ? J'en tremble !

« Douce, douce Delphine... Je sais exactement qui tu es, Delphine... ». Plus comme avant, mais je suis prête à le redécouvrir à travers le vallon de ses abdominaux serrés, à travers la moiteur de sa bouche mentholée, perdu dans le fin fond de ses arceaux à demi-ton. Je veux me perdre à nouveau en Dylan...

« Une nuit, rien qu'une nuit... », mais ses paroles n'appartiennent plus à la chanson ; et à la façon dont Dylan s'est contracté, je crois qu'il l'a compris. Les gens autour de nous, les meubles qui façonnent les alentours disparaissent, effacés à la gomme, n'en demeure qu'un brouillon abstrait qui me fait savoir que nous restons ancrés dans cet hôtel de cœurs brisés, âmes fuligineuses, écrin doré de bijoux toqués. Corps fossiles. Je laisse échapper une lourde lamentation de douleur : « Ah... » chanté par affliction, après qu'une larme ait fini par forcer le barrage ciliaire pour dévaler ma joue brûlante et écarlate.

L'air est chaud, et pesant sur mes épaules. Je me hisse sur la pointe de mon talon pastel pour cueillir sa peau des lèvres, inspirant son odeur musquée, inclinant la nuque pour basculer vers sa joue, et picorer sa barbe de baisers éhontés. Tromper n'a jamais été, pour moi, grand cas de tracas. Culpabilité effacée, je suis un bloc inamovible concernant mes restrictions... et l'aimer n'en est pas une. L'aimer bien, cependant, en est une autre abstraite... Comment l'aimer à ma façon défendue ?

UNDER THE SPELL 🥀 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant