49 - du bien sur mon mal

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Musique en média

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Musique en média

— Tu ne l'as pas terminé ?

Dylan saisit l'un des trois bouquins étalés sur le bord de mon lit, cinq autres au sol, et le feuillette. Sa voix traîne un peu, ses paupières sont biaisées, ses yeux toujours vitreux, et ils admettent de fins filaments pourpres serpentant de la base de son épicarpe à sa pupille.

Mes jambes fouettent l'air, allongée sur le ventre au milieu des draps, les coussins m'entourant, le menton dans le centre de ma paume. Je l'observe, avec ses propos étranges et ce quelque chose qui l'a délacé, pour le rendre totalement libre de tout.

De toutes actions, de tout propos, de toutes promesses, de toutes insultes. Rien de plus que le tempérament brut de décoffrage de mon garde-du-corps déclomplexé par les sentences possibles en conséquence de ses actions inhabituelles.

Il me traite comme son égal, me méprise à l'occasion, me vénère à déraison, un homme à moitié fou, un homme à moitié ivre. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive...

— Je ne lis jamais la fin des livres. Je n'aime pas ça.

Il s'affale à mes côtés, le visage sur le bouquin, épelant à voix haute le titre : « Ginette la rêveuse », avant de le tourner dans un sens, puis dans l'autre, ses doigts retraçant la reliure rosâtre et défraîchie.

— C'est l'édition originale ?

J'acquiesce, m'humecte les lèvres. Il rit tout bas, sans que je ne sache pourquoi, puis il m'en fournit la raison :

— Tu n'as rien d'une rêveuse. En fait, tu as même tout d'une défaitiste.

Je fronce les sourcils et pivote le haut du corps vers lui. Un sentiment confus me rigidifie la colonne.

—Je ne suis pas défaitiste.

— Oh ! Si, même pessimiste.

— C'est faux, objecté-je.

Ses bras retombent mollement dans la couche, avant qu'il ne se redresse comme un ressort, une déformation labiale lui faisant adopter une moue de dégoût.

— Je ne dormirai pas dans ces draps. J'ai vu ton mec y jeter son foutre dégueulasse.

Je glousse et secoue la tête en me déridant. Sa désopilance a quelque chose de frais qui me traverse comme une houle revigorante, bien que, tranché, son tempérament n'a plus rien de cette catharsis rassérénante dont il me comblait.

— J'ai demandé à ce qu'ils soient changés avant d'aller te chercher.

— Tous ?

— Au complet...

Debout face au lit, il zieute la nouvelle parure perle, enveloppant la couette en soie en duvet d'oie, puis les quatre nouvelles taies. Ses yeux voguent, tanguent, trouvent les miens, s'y engouffrent.

UNDER THE SPELL 🥀 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant