61 - l'absence d'un spectateur pourtant present

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Musique en média

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Musique en média

Lorsque je passe les battants de la chambre de Maël, mes lunettes noires sur le nez, une sucette à la cerise enfoncée entre les lèvres, engoncée dans un long manteau bouffant à l'encolure étouffée de fourrure, je jette le dossier lié par un trombone sur le lit de ce dernier, béat.

Enfermé dans la chambre privée que Roland lui a payé en dédommagement du préjudice commis, étant donné que Dylan était sous sa responsabilité — et non la mienne ; j'écoute le moniteur biper les tonalités de sa vitalité, et toise la large vitrine d'où la brume s'intensifie à en masquer le paysage.

De toute façon, l'hôpital Corodro s'impose dans un endroit isolé du quartier nord de la ville, tout près de la plus grande autoroute construite, tout fait de verre. Bloc ergonomique et massif, aussi reluisant qu'un bijou, il n'en demeure pas moins l'endroit où la technologie dernier cri se mêle à la science et l'encourage. Slalomer entre les nouveaux fauteuils à la technologie inventive, l'arrivée de nouveaux modèles de lits bénéficiant de confortabilité et d'optimalité, et la foule d'employés revoyant l'arrangement de matériels d'oxygénothérapie étant donné que je suis passée par l'arrière, évitant subtilement les journalistes venus soutirer des informations à Maël concernant l'épisode jugé « sanglant » et « sans précédent dans l'histoire des Richmond », je me demande encore ce qui m'a pris d'accepter et de ne pas refiler cette besogne à n'importe qui d'autre.

Comme Elias, qui m'a déposé jusqu'ici.

Mais lorsque je vois l'oeil tuméfié de Maël, aux bandages omniprésents... je sais pourquoi je suis là. Pour le regarder souffrir. Très peu impliquée dans l'affaire, je n'ai même pas cherché à savoir quel palier de gravité avait atteint le diagnostic. Toujours est-il que, hagard, sonné, comme s'il était complètement shooté, il grogne lorsque je lance la paperasse sur ses cuisses et commence, la voix enjouée :

— Une chance qu'il te reste une main valide ! Le karma t'a laissé celle avec laquelle tu m'as étranglé, tu as vu ? 

Il n'accueille aucun sentiment. Il faut dire que sous l'enchevêtrement de bandes blanches, rien de bien discernable concernant ses mimiques faciales ne m'est permis. Il toise ailleurs, l'œil profondément coléreux, quoique légèrement effrayé.

Le bip régulier alimente le poids du silence qui survient. Une infirmière passe brièvement en me saluant, prend quelques notes en vérifiant quelques données signalées par les machines clinquantes, vérifie une poche de transfusion et les tuyaux qui le ligotent, puis disparaît. Une fois fait, je me laisse tomber dans le fauteuil vert et large à ses côtés en léchant ma sucette, puis croise les jambes, avance les coudes, me penche vers lui, dominante et impiteuse, avant d'exiger :

UNDER THE SPELL 🥀 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant