Chapitre 78. De l'autre côté

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Je venais de retrouver une vieille photo de Violette en faisant le tri dans mon téléphone, un truc qui datait des moments où on commençait à peine à trainer ensemble. Je me rendais compte d'à quel point elle faisait jeune à l'époque et comprenais peut-être un peu mieux les réactions de Ken. Un sourire m'échappa lorsque je repensai à cet après midi là. Je l'avais fait chier pendant des heures et elle avait fait semblant de m'ignorer dans le métro en enfonçant ses écouteurs dans ses oreilles et en tirant un livre de son sac.

Je me rappelai lui avoir demandé de quoi parlait son bouquin, j'étais pas très branché littérature russe et j'avais jamais lu L'Idiot

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Je me rappelai lui avoir demandé de quoi parlait son bouquin, j'étais pas très branché littérature russe et j'avais jamais lu L'Idiot. Cette petite peste avait relevé les yeux de son roman et avec un sourire amusé et m'avait simplement répondu "de toi".

J'hésitai quelques secondes avant de lui envoyer la photo, après tout, ça pourrait la faire sourire aussi. On avait pas parlé autrement que par les deux lettres qu'on s'était envoyés. Elle avait du recevoir la mienne quelques jours plus tôt et c'était une façon de s'en assurer. Même si je ne voulais surtout pas qu'elle me parle de ce que j'avais dit dedans.Rien qu'en y repensant j'étais gêné.

Elle me répondit quelques secondes plus tard :

Violette : Putaaaaaaiiiin c'est vieux ! On dirait que j'avais quatorze ans... Je comprends mieux pourquoi personne me prenait au sérieux. En tout cas tu devrais lire l'Idiot, c'est un très beau livre et je pense que ça pourrait te plaire.

Je n'en n'ajoutai pas plus. Reprendre contact n'était pas sain, je n'étais pas parti à l'autre bout du monde pour échanger des messages avec elle toute la journée. Me levant brusquement de mon lit, je lançai google maps à la recherche d'une librairie francophone. J'étais prêt à me plonger dans du Dostoïevski, mais pas en portugais.

Après un après-midi à chercher le livre, je finis par l'acquérir et une grimace m'échappa en voyant qu'il faisait 900 pages.

J'avais recommencé à lire depuis que j'étais là Rio, mais pas ce genre de pavés bourrés de noms russes incompréhensibles.

Pourtant, comme si la lecture de ce livre pouvait me rapprocher de la femme que j'aimais, je décidai de l'entamer à peine rentré chez Paloma.

S'en suivirent des heures et des heures de lecture, sur plusieurs jours, plusieurs semaines même. Je compris très vite pourquoi Violette, non seulement aimait ce livre, mais me l'avait conseillé. Il relatait l'histoire du Prince Mychkine épileptique qui, après avoir passé sa jeunesse en Suisse pour être soigné, retournait en Russie. Tout le monde le voyait "idiot", alors qu'il était bon, sincère et,  savait poser un regard très juste sur les personnes qui l'entouraient et les rendre meilleures malgré elles. Personne ne le prenait jamais au sérieux, le traitant comme un enfant naïf et finalement, les gens finissaient par se rendre compte qu'il était bien plus intelligent qu'eux mêmes.

Il tombait amoureux de Nastassia, une femme profondément blessée par son passé et voulait l'épouser pour la sauver. Elle l'aimait aussi, mais préférait s'enfuir plusieurs fois avec un homme malsain et fou, car elle ne se sentait pas digne de lui. La rivalité était si forte que l'homme fou tentait même d'assassiner le prince. Mychkine la retrouvait après une autre histoire d'amour, mais celle-ci se sentait toujours bien trop impure pour lui, et partait de nouveau avec le taré, le jour même de son mariage avec le prince.

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