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Pourquoi parler, quand la parole devient oppressante ?
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Les cicatrices de la veille étaient aussi fraîches qu'un coup de vent glacial. Aussi douloureuses, qu'un coup de poignard en plein cœur. Mais surtout, aussi imposantes qu'un monument historique. Alors, comme la fois d'avant, je passais tout doucement du gel sur mon corps.

Alors que l'aspect glacé de la pommade sur ma peau me faisait frissonner, j'étalais minutieusement le contenu sur le reste de mon corps. Mon corps mis à nu devant elle, elle ne cessait de lorgner attentivement chaque recoin de ce dernier. De mes cuisses légèrement teintées de bleus à mon cou imbibé de marques, son regard devenait quelque peu lourd.

- Regarde comment tu souffres, regarde. Est ce que tu vois comment il te traite? Et pourtant, je suis sûre qu'il n'accepterait jamais que sa sœur puisse subir toutes ses choses atroces qu'il se permet de te faire. Il ne voudrait jamais que sa fille soit traité ainsi, combien de fois sa mère? Alors pourquoi persistes tu à te taire, pourquoi ?

Houley. Les yeux bordant de larmes, elle ne cessait de me dévisager. D'un regard de compassion, d'un regard perçant. Mais aussi, un regard de pitié. De la pitié pour ma personne, de la pitié pour la femme dont j'étais devenue sans avoir apporté un quelconque signe de résistance.

Je soufflais comme à chaque fois où je devais avoir à me prononcer sans pour autant avoir l'envie. Délicatement, je passais  mes mains sur mes tempes, les massant, un temps soit peu. J'avais honte. Honte d'avoir été prise au dépourvue, honte de m'être faite laisser humilier ainsi, honte d'avoir été faible.

Pourtant, des années antérieures, j'étais celle qui clamait haut et fort les droits des femmes. Celle qui relayait ne jamais faire face aux violences conjugales, celle qui osait parler et s'affirmer. Mais désormais j'avais comme perdu ce droit. Ce droit d'expression, cette chose dont j'avais tant besoin.

J'essuyais la larme solitaire qui avait osé franchir mes prunelles. Cette larme qui avait parcourut avidement ma joue avant de mourir entre mes doigts. C'était cette même larme qui avait eu raison de mes souffrances.

De ses souffrances que père avait malheureusement causé. Peut-être que lui aussi exprimait le même désarroi que moi. Peut-être qu'il était autant meurtri que moi. Que savais je.

Ah... mon petit papa, est ce que tu sais au moins dans quel genre de mariage tu m'as promise? Dans quel genre de foyer? Un foyer où je ne suis non plus ta princesse d'autrefois, mais une vulgaire soumise bonne à prendre des coups à la moindre petite chose. Et là, sais tu ce que je ressens ?

De la haine, je te hais car tu as été contraint de me donner. Je te hais mais plus encore, je hais la vie. Néanmoins, ne t'en fais pas papa. Ne t'en fais pas. Car auprès de cet haine, tu trouveras mon amour pour toi. Cet amour qui n'a jamais cessé d'exister, notre amour.

Que devais-je faire, mes sentiments envers toi sont partagés. Et pourtant, j'affirme avoir grandement besoin de ta présence. De ta chaleur, de tes bras. J'ai besoin d'une épaule sur qui déployer mes larmes avant qu'elles ne me noient. Mais, n'est-ce pas toi qui avait causé ce malheur ? Alors, pourquoi voudrais je de ton épaule ?

Je passais délicatement ma main dans mes cheveux rabattus en un chignon avant de cette fois ci, répondre à la remarque de Houley. Une réponse qui, saura au moins avoir l'effet voulut. Un minimum de réconfort.

- Ça ira. Ne t'en fais pas pour moi, ça ira. Un jour tout ira bien.

Je créais un sourire sur mon visage alors que je n'arrivais pas à recaler les larmes qui ne cessaient de dévaler mes joues. Des bras venaient alors entourer mon corps. Désormais revêtu d'un drap blanc, mon front était posé sur l'épaule droite de Houley. Déposant ainsi, toutes les larmes que j'avais à lui offrir.

Lentement, elle caressait mon dos. Répétant son geste plusieurs fois avant de s'arrêter subitement. Ses douces mains passaient de mon dos à mes joues aussi rapidement que cela puisse paraître. Alors, elle colla son front au mien. Me regardant ainsi dans le blanc des yeux, avant d'essuyer les dernières larmes qui avaient résistés.

- Même si tu me dis que tout va bien, je vois dans tes yeux que ce n'est qu'un frasque mensonge. Alors, même si je dis connaître l'objet de tes souffrances, il n'en reste pas moins que je crois et je persiste que tu ne devrais pas continuer à te taire. En tant que femme tu as des droits, et ils doivent être respectés. Ce n'est pas en accumulant les coups que ça s'arrêtera.

Elle s'arrêta un moment alors que je fermais doucement les yeux pour ainsi analyser ses paroles. Elle n'avait pas tord, mais. Elle ne savait pas de quoi était capable Bassir, pire encore, Monsieur Samir. Alors, je préférais subir, car je savais. J'en avais même la conviction, qu'un jour ça ira.

Dieu n'abandonne jamais ses enfants, m'avait toujours dit maman. Elle se détachait lentement de moi, à mon tour, j'ouvrais les yeux. Fixant ses magnifiques yeux en amande avant qu'elle ne continue ses paroles.

- Un jour, laisse moi te dire que ça s'aggravera. Et ce jour là, il serait peut-être déjà trop tard. C'est maintenant que tu dois agir, réfléchis y. Car, ceci n'est pas un conseil que je te donne, c'est bien plus que ça. En espérant que tu le prennes en considération.

Je n'osais rien dire alors, je me contentais de baisser la tête. Parler et peut-être recevoir un minimum de liberté ou me taire, et continuer à éprouver ? Même si le choix semblait facile, les conséquences elles, paraissaient désastreuses.

Alors, je préférais oublier cette alternative en attendant ce bonheur dont je ferai peut-être face un jour ou l'autre. Mais, si par hasard ou du moins par malheur vous étiez à ma place. Qu'auriez vous fait?

- En venant ici, je venais t'annoncer la venue de Anta. Ça fait à peine quelques jours qu'elle est de retour de Thiès, alors j'ai jugé bon te prévenir.

À ses mots, je relevais vivement la tête. Anta, ici? De la joie avait naquit en moi à ce moment. Mais la réalité avait ressurgit en me rappelant que j'étais l'heureuse épouse de Bassir, mon arabe bien aimé.

Seulement, je savais que cette nouvelle allait créer un énorme problème lorsqu'elle parviendrait à ses oreilles. Je prenais donc ma tête entre mes mains alors qu'elle s'activait à continuer de parler.

- Et... Comment te dire. Elle a appris pour ton mariage avec Bassir, cet arabe. Et comme nous nous en doutions, cette nouvelle ne l'a pas réjouit. Mais, elle souhaite te voir. Demain, tu devras aller la voir chez oncle Adama.

Il n'y a pas d'amour sans haine, alors prend cette haine comme un amour sincère que je n'arrive pas à te décrire.

Bonne fête des pères à vous, malgré le retard j'espère que tout va bien chez vous.

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Vos avis seront les bienvenus pour cette fiction et j'espère que vous allez bien.

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                                 Lady_Sy

PROMISEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant