Lorsque j'arrive au commissariat, mon père est déjà là, accoudé au comptoir en train de discuter. Il me jette un œil avant de saluer la flic pour me rejoindre.
- T'es en retard.
Je jette un oeil à mon téléphone, fraichement acheté beaucoup trop cher avec le peu d'argent qu'il me reste de ma paye.
- Il est huit heure six.
- C'est ce que je dis, t'as six minutes de retard.
Putain mais il est sérieux ?
Il me laisse même pas le temps de rétorquer et me tourne le dos pour s'aventurer dans les bureaux.
- Il est déjà installé dans une salle, il n'attend plus que nous.
OK... je prends une grande inspiration en sentant la pression gonfler ma poitrine. Putain j'ai tellement pas envie de le voir. Mais tellement pas.
- Surtout tu ne dis rien et tu me laisse parler. Il ne faut absolument pas lui donner raison, il faut faire extrêmement attention à chaque mots. C'est pour ça que je veux pas que tu ouvres la bouche.
Ah bah merci ! Il est remonté comme une pendule ou quoi ? Je sens que Benjamin va en prendre plein la gueule.
Mon père s'arrête devant une porte close et me lance un dernier regard avant d'entrer en trombe. Bon aller... j'ai pas le choix de l'affronter. Il faut que je le fasses. Pour Tom.
Je passe la porte à contre coeur, et mon regard tombe immédiatement sur Benjamin, assis à une table au milieu de la pièce, un café fumant devant lui. Ses yeux verts me tombent dessus, et c'est la voix de mon père qui me délivre de son regard.
- Ferme la porte.
Je croise ses yeux glacials avant de m'exécuter.
- Donc... Monsieur Diaz. Je supposes que j'ai pas besoin de me présenter ? Tu te souviens certainement de moi.
Je me retourne doucement, essayant de réprimer mon envie de fuir. Mon père s'est déjà installé face à Benjamin, une simple feuille de papier sous les yeux avec quelques annotations griffonnées dessus. Je pose les yeux sur Benjamin qui me lance un regard meurtrier. Bordel de merde... il est défoncé. Tout le côté gauche de son visage a prit cher par rapport au reste. Son oeil est gonflé, à tel point que sa paupière n'est ouverte qu'à moitié. Il est tellement rouge la vache. À côté, son arcade ouverte et sa lèvre éclatée et gonflée paraissent presque superficielles. Ce qui me surprend en revanche, c'est que son nez est intact. Comment il a pu être épargné avec tous les coups qu'il s'est prit ?
- Qu'est-ce que vous foutez là ?
Je jette un oeil à mon père pour ne pas croiser le regard de Benjamin.
- Tu veux porter plainte apparemment, je suis là pour ça. Tu m'excuseras, j'ai pas apporté les croissants. Mais bon vu l'état de ta tête, tu n'aurais peut-être pas pu les mâcher.
Putain... les emmerdes commencent. Je m'adosse contre le mur près de la porte en essayant de ne pas croiser les yeux foudroyant de Ben. On dirait qu'il m'en veut plus qu'à Tom.
- Donc, résumons... tu as dis que tu t'étais fait tabasser par...
Mon père fait mine de loucher sur la feuille qu'il a sous le nez.
- Tom Holland.
Sa mâchoire est tellement serrée qu'on aurait dit un grognement.
- Tom Holland ? Et c'est qui ce type ? Est-ce que tu le connais personnellement ?
Mon père a vraiment un don pour feindre l'ignorance. Et je crois que j'en ai hérité, d'après les dires de ma mère.
- Vous savez très bien qui c'est. Mais demandez lui.
Je sens le regard de Benjamin me tomber dessus avec une lourdeur qui m'étouffe brusquement.
- Puisqu'elle couche avec lui, elle doit bien savoir qui c'est non ?
Je baisse les yeux pour me forcer à ne pas soutenir son regard. J'entend mon père pouffer de rire et je sens que c'est mauvais.
- T'es un marrant toi hein ? Et si tu me racontais plutôt ce qui s'est passé ?
Benjamin s'enfonce dans sa chaise en croisant les bras sur son torse.
- C'est pas à vous que je veux parler. Je veux un autre flic. Un vrai.
Mon père rigole à nouveau, et j'avoue que c'est super agaçant comme rire.
- Ouais, alors ça c'est pas possible tu vois. C'est pas à la carte ici, t'es pas dans un restau chinois.
Waouh ! J'aimerais pouvoir rire, mais vu le regard noir de Benjamin, ce serait de la provocation.
- Bon aller, raconte moi ce qui s'est passé.
- Bah vous avez qu'à lui demander puisqu'elle était là !
Il s'est redressé pour s'accouder à la table, comme-ci affronter mon père était une bonne idée.
- T'es en train de la citer comme témoin ?
- Ouais c'est exactement ce que je fais.
Il pose les yeux sur moi et malheureusement je croise ses yeux verts que j'avais l'habitude d'aimer avant.
- Elle était là et elle a pas bougée. Elle a pas levée le petit doigt pour empêcher ce connard de me tabasser !
Putain le fils de pute ! Il a oublié de dire qu'il m'a jetée au sol je crois. Il a vraiment de la chance que je sois forcée de me taire.
- Mais c'est pas à vous que je veux parler.
Il se renfonce dans sa chaise en posant les yeux sur son café.
- Écoute gamin, t'es pas chez ta mère ici. C'est pas toi qui prend les décisions, alors soit tu me racontes ce qu'il s'est passé, soit tu ne dis rien. Mais si tu ne dis rien, il n'y aura pas de plainte. À toi de voir.
- Pas de plainte ? Putain mais vous avez pas le droit de faire ça ! Vous avez vu comment il m'a défoncé ? Je veux un autre flic putain ! Amenez moi un autre flic je vous dit !
Mon père me jette un bref coup d'oeil, et j'ai l'impression qu'il est content de le voir s'énerver.
- Pourquoi ? Qu'est-ce qui te plaît pas chez moi ?
- Putain mais vous savez très bien ce qui me plaît pas ! Vous pouvez pas me blairer ! Je suis sûr que vous allez même pas l'enregistrer ma plainte !
Il passe une main tremblante dans ses cheveux avant de me foudroyer du regard, et de me désigner d'une main méprisante.
- Et puis d'abord qu'est-ce qu'elle fou là elle hein ? Elle a rien à foutre là putain !
Je baisse la tête en m'efforçant de la fermer. Il faut que je la ferme putain. Pour Tom. Je ferme les yeux deux secondes à peine pour me réfugier dans mes souvenirs, auprès de son sourire.
- Elle n'a rien à foutre là ? Mais je croyais qu'elle était témoin ?
Waouh ! Il est vraiment très fort putain.
Benjamin s'enfonce dans sa chaise, la mâchoire tellement serrée que je pourrais presque l'entendre grincer.
- Putain vous me cassez les couilles ! Je dirais plus rien tant qu'il n'y aura pas un autre flic ici !
Mon père lève les yeux vers moi quelques secondes, et je vois au fond de son regard qu'il essai de me rassurer.
- OK, très bien. Dit plus rien. Mais si tu ne dis rien, il n'y aura pas de plainte.
Je jette un oeil à Benjamin qui me foudroie du regard, me coupant le souffle. C'est exactement le même regard qu'il avait avant chaque coups qu'il m'a donné.
- T'es contente de toi ? Je suis sûr que c'est toi qui a manigancé toute cette merde. Comme ça t'es sûr que ton Anglais de merde aura rien c'est ça ?
Il lève un doigt accusateur vers moi, et pendant deux secondes j'ai eu l'impression qu'il allait se lever pour me foncer dessus. Et c'est certainement ce qu'il aurait fait si il n'y avait pas mon père.
- Mais tu va pas t'en tirer comme ça ma belle. Ça je te le jure !
Son regard vacille sur mon père avant de me retomber dessus.
- Si ils prennent pas ma plainte, je peux te garantir que je vais le faire tomber. D'une manière ou d'une autre il va tomber, même si pour ça tu dois tombe avec lui.
Mon coeur s'emballe et c'est à ce moment que mon père frappe du poing sur la table, attirant toute l'attention sur lui.
- Oh ! Tu menace ma fille là ?
Benjamin se penche sur la table pour affronter mon père avec une folie qui me dépasse et qui commence à m'angoisser à mort. La tension est trop forte là.
- Je menace personne ! Tout ce que je veux c'est porter plainte, alors soit vous faite votre boulot et vous la prenez, soit il va payer. Ça je peux vous jurer qu'il va payer !
Ses yeux de serpent me pétrifie sur place. Dieu merci, mon père ne lui laisse pas le temps de me dévisager.
- Écoute gamin... regarde bien son visage. Regarde dans quel état tu l'a mise, parce que je sais parfaitement que c'est toi.
Benjamin repose aussitôt les yeux sur son café, comme-ci la culpabilité l'empêchait d'admirer son oeuvre.
- Tu vois, jusqu'à preuve du contraire elle n'a pas porté plainte. Donc dit toi bien que ce qui t'ai arrivé là, c'est rien. Ça aurait pu être bien pire. Parce que t'as de la chance que quelqu'un t'ai chopé avant moi. Alors maintenant le One Man Show est terminé ! Soit tu me dis ce qui s'est passé, soit tu la ferme. Mais si tu te décides enfin à la boucler, alors t'as plutôt pas intérêt de t'en prendre à ma fille. Ni à ma fille, ni à lui, est-ce que c'est clair où est-ce que t'as besoin que je te l'enregistre ?
Merde... même moi il me fait flipper. Benjamin soutient son regard avec plus de facilité que moi.
- Et quelles preuves vous avez contre moi au juste ?
- Ah tu veux parler de preuves ? Mais quelles preuves tu as contre lui toi ? Vas-y, sort moi tes preuves, parce que franchement je serais heureux de savoir comment un type comme Tom Holland, acteur et actuellement aux États-Unis à pu te casser la gueule hier soir, ici à Paris, au milieu d'une fête de paumés à qui t'as refourgué ta came.
Oh la vache ! Il est trop fort !
- Il était là et vous le savez ! Mais demandez lui putain ! Puisque je vous dit qu'elle est témoin !
Il me lance un regard noir que je m'empresse de fuir.
- Mais si vous voulez je peux porter plainte contre elle aussi. Pour non-assistance à personne en danger ça devrait passer ça, non ?
Il se renfonce dans son siège avec un air satisfait qui ne va pas rester longtemps sur son visage.
- Et si on demandé plutôt à un vrai flic ? Un qui n'aurait pas son ADN par exemple, ce serait nettement plus objectif déjà.
Je jette un oeil à mon père qui ne le quitte pas des yeux et esquisse même un sourire. Oh putain ça sent pas bon ! Je le connais ce sourire, j'en ai hérité. Et croyez-moi, lorsqu'il apparaît c'est pour signaler le remake de Tchernobyl.
- Toi t'es un marrant. Un vrai petit rigolo, ça c'est certain. T'es sûr que tu veux t'en prendre à ma fille ? T'as vu dans quel état elle est ? Estime toi heureux de tenir encore debout petite merde ! Parce que si c'est moi qui t'avait chopé tu serais pas assis là à chialer comme une mauviette !
Oh merde... j'espère que Benjamin ne va pas se la jouer Marty McFly. C'est super dur de ne rien dire putain. Mais faut que je laisse faire mon père, c'est terrain ici.
Il s'enfonce lui aussi dans sa chaise, tellement à l'aise que ça me fait peur.
- Alors maintenant on va jouer carte sur table toi et moi. Si tu porte plainte, elle en fait autant. Pour coups et blessures, harcèlement moral et que sais-je encore. Enfin t'auras compris que t'as aucune chance de gagner. Mais je peux t'assurer qu'en tôle tu ne tiendras pas deux mois. Parce qu'il faut quand même que tu saches qu'en cas de circonstances aggravantes je peux te faire prendre jusqu'à sept ans.
Il se redresse pour plonger son regard un peu plus dans celui de sa proie et augmenter la pression dans la pièce.
- Quel âge tu as toi déjà ? Vingt-sept ? Vingt-huit ? Sept ans ça va faire long. Tu va ressortir à trente-cinq ans, t'auras plus de maison, plus de travail... ta mère t'aura laissé tomber. Tu seras tout seul.
Le regard de Benjamin change aussitôt lorsque sa mère entre dans la conversation.
- Mais pour ça il faudrait encore que t'arrives en prison, parce qu'admettons... et je dis bien admettons, que quelqu'un te tombe dessus avant ? Quelqu'un d'armé, qui sait où tirer pour que tu te vides de ton sang le plus lentement possible. Pour que ce soit douloureux. Ou dans le meilleur des cas pour que tu finisses tétraplégique, sans plus pouvoir parler. Tu pourras même plus te branler tout seul.
Le rire méprisant qui s'échappe de mon père est terrifiant.
- Je peux te garantir que si ça t'arrives, tu regretteras de ne pas avoir pris sept ans. T'as vraiment pas fait le bon choix en levant la main sur elle.
Benjamin se recoiffe à nouveau, la main toujours tremblante.
- Vous n'avez aucune preuve que c'est moi qui l'ait frappée.
Mon père s'enfonce dans sa chaise, un sourire narquois au coin des lèvres. Je connais ce sourire. Là il est prêt à lui montrer qui est l'alpha.
- Oh si des preuves on en as.
Il me jette un oeil complice.
- Comment il s'appel déjà ?
Je n'ai pas le temps de comprendre de quoi il parle qu'il repose les yeux sur Benjamin.
- Miguel, je crois que c'est comme ça qu'il s'appel. Lui il était là lorsque tu l'a frappée, non ?
What the fuck ? Comment est-ce qu'il est au courant de ça ?
Benjamin a pâlit en un quart de seconde.
- Et Charlie ? Tu la connais Charlie ? Ma belle-fille. Je suis sûr qu'ils seraient prêt à témoigner contre toi tous les deux. Sans parler de la drogue que tu lui a fait ingérer en douce. Et ouais, je suis au courant pour ça aussi.
Bordel où est-ce qu'il a appris tout ça ?
Benjamin me jette un oeil, et je peux vous dire qu'il a perdu sa confiance en lui.
- D'ailleurs, puisqu'on parle de drogue, ton dossier est déjà bien chargé, autant que la dope que tu fume. Je suis pas sûr qu'un juge acceptera de te laisser en liberté avec tout ça.
Benji frappe si fort sur la table que son café fait un bon et manque de se renverser.
- Putain mais vous savez que c'est lui qui m'a frappé !
Le sang froid de mon père est impressionnant. Il n'a même pas cligné des yeux.
- Alors ça non, j'en sais rien en fait. Sinon il serait déjà arrêté, pas vrai ? À moins bien sûr que tu ais des témoins. Autre que ma fille.
- Putain mais des témoins il y en a des dizaines ! Il y avait plein de monde à cette fête de merde !
Il repasse une main tremblante dans ses cheveux, tandis que mon père ne se démonte pas.
- Très bien, donne moi des noms.
Benji relève les yeux vers lui avec un air paniqué.
- Tu dois bien avoir des noms, non ? Je supposes que tu connaissais pas mal de monde là-bas ?
Mon père se penche sur la table tandis que Ben plonge sa tête dans ses mains. Ça y est. Il sait qu'il n'a aucune chance.
- Mais dit moi... tous tes témoins là, ils étaient défoncés, non ? Ah mais attend ! C'est pas toi qui les a aidés à se défoncer par hasard ? C'est peut-être pour ça que tu ne peux pas me donner de noms, pas vrai ?
Benjamin baisse la tête en semblant s'arracher les cheveux.
- Putain mais c'est un interrogatoire ou quoi ?
Il essai de foudroyer mon père du regard, ce qui est totalement inutile.
- Si c'était un interrogatoire on serait filmé.
Benji cherche une caméra des yeux, lorsque mon père l'interpelle en tapant sur la table. Comme-ci ce n'était qu'un enfant qui manque de concentration.
- Hey ! Arrête de loucher sur le plafond, on est pas dans Esprit Criminel. Il y a pas de caméras, parce que c'est pas un interrogatoire.
OK... la pression est nettement montée d'un cran.
- Mais ça tu le sais. C'est pas la première fois que t'es ici, c'est pas la première fois que t'as affaire à la drogue. Mais je peux t'assurer que la tôle te tend les bras, et c'est soit ça, soit une jolie boîte en bois que ta mère aura choisi pour toi avec l'argent de ton assurance décès.
Oh merde, il a pas osé ?
Benji, en actuel meilleur connard de l'univers n'a pas compris qu'il est temps pour lui de la fermer.
- Attendez, vous me menacez là ?
- Moi je te menace ?
Son air offensé est de retour. Il lève les yeux sur moi, comme-ci il allait enfin me laisser parler.
- Est-ce que je le menace là ?
Bien entendu, il ne me laisse pas le temps de répondre.
- Non, je crois pas. Parce que tu vois gamin, si j'étais en train de te menacer j'aurais certainement commencé par sortir mon flingue. Je te l'aurais peut-être même pointé sur le crâne, et je t'aurais dit qu'au lieu d'être assis là à raconter des conneries tu pourrais très bien finir dans un frigo. À la morgue. Là, en effet, ce serait une menace.
Merde... merde, merde, merde ! Même moi j'ose plus respirer putain. Ça va trop loin là.
- Mais là s'en est pas une. Est-ce que tu vois mon flingue quelque part ? Non, parce qu'il est actuellement rangé à ma ceinture et pas collé sur ton front. Mais si tu veux que je te menace, ça peut s'arranger. Touche encore à ma fille et tu verras ce que c'est qu'une menace.
Benjamin lève les yeux vers moi une seconde, m'infligeant un micro-infarctus.
- Putain mais vous êtes sérieux là ? Je viens ici pour porter plainte parce qu'on m'a tabassé, et tout ce que vous faites c'est me traiter comme un coupable ! Mais je suis la victime putain, pas le coupable !
Mon père se penche brusquement sur la table avec un air enragé.
- T'es sûr de vouloir parler de victime et de coupable avec moi ? Parce que dans cette histoire la seule victime c'est ma fille, espèce de petit branleur. Et est-ce qu'elle a portée plainte elle ? Non. Elle n'a rien dit à personne, parce qu'elle avait peur des représailles. Tu sais ce que c'est que des représailles ? C'est ton putain de nom gravé sur une pierre tombale !
Oh fuck !
Benjamin soutient son regard et je ne comprend même pas comment il fait.
- Vous ne me laisserez pas porter plainte, pas vrai ?
Un sourire terrifiant se coince à l'angle des lèvres de mon paternel.
- Non, en effet. T'es très perspicace comme gars.
Benji baisse la tête, réalisant soudainement que c'est peine perdue.
- Je suis désolé de casser ton délire, mais un dealer qui porte plainte parce qu'il s'est fait tabasser dans une fête remplie de jeunes mineurs défoncés, je peux t'assurer que ça passera pas. Alors qu'une fille qui vient porter plainte en pleurant, couverte de bleus, parce que son mec l'a tabassé, qu'en plus de ça il est dealer et qu'il était défoncé à ce moment là, je pense que c'est nettement plus recevable. Mais vas-y, je te laisse faire le calcul.
Il croise les bras sur son torse, sûr de lui. Ce qui est dingue c'est que Benjamin a recommencer à l'affronter du regard. Il est complètement taré lui aussi !
- Si je porte pas plainte je trouverais un autre moyen de le faire tomber.
- Oui, c'est ça. Bon courage ! Étant donné qu'il a certainement de meilleurs avocats que toi, t'a très peu de chance d'y arriver.
- Putain mais vous me détestez en fait ?
Mon père se met à rire avec arrogance. Une arrogance que j'ai complètement hérité de lui.
- Et bah, on a pas tout perdu. Il a retrouvé un semblant d'intelligence, c'est déjà ça.
Il me lance un regard complice, avant de reposer les yeux sur Benjamin.
- Ça c'est sûr que je t'apprécie moyen. Surtout depuis que j'ai retrouvé ma fille aussi bleu qu'un Misterfreeze. Mais comme je te l'ai dit, tu devrais t'estimer heureux que quelqu'un te soit tombé dessus avant moi. Parce que sinon je serais pas assis là à écouter tes conneries.
- Non ça c'est sûr, vous seriez en tôle !
Mon père pouffe de rire, et je me tiens prête à le voir sortir son flingue d'une minute à l'autre.
- Waouh ! T'es vraiment très drôle comme type. Franchement, t'as raté ton coup, t'aurais dû faire carrière dans la comédie, pas dans la drogue.
Il se penche sur la table avec un sang-froid de dingue.
- Tu sais où je serais là surtout ? Entrain d'annoncer à ta mère que son fils unique a été retrouvé mort au milieu de son appartement à la suite d'un règlement de compte.
- Et ça ressemble pas à une menace ça peut-être ?
Mon père retient un sourire et me jette un oeil complice.
- Non, ça c'était plutôt une promesse. Tu sais ce que c'est qu'une promesse ? Tu sais, c'est ce que t'as jamais réussis à tenir avec ma fille. Comme celle d'arrêter le Poker. Ou la drogue.
Benjamin me lance un regard terrifiant, avant de se tourner vers mon père.
- Vous avez tout prévus, pas vrai ? Vous me laisserez jamais sortir d'ici avec ma plainte dans les mains.
Je jette un oeil à mon père qui ne quitte pas sa cible des yeux.
- Vous avez vu dans quel état il m'a mit ? Qui vous dit qu'il ne va pas faire ça à votre fille ? Si il est capable de me tabasser comme ça, pourquoi il pourrait pas lui faire la même chose ?
Oh putain l'enfoiré de merde ! Jamais Tom ne serait capable de me faire ce qu'il a fait !
- Peut-être parce qu'il l'aime, lui.
Waouh... moi-même je viens de ressentir le coup de poignard. Benji a totalement changé de couleur.
- Peut-être aussi parce que c'est pas un drogué. Ou peut-être parce que lui, contrairement à toi, il est parfaitement conscient de ce qui va lui arriver si il ne fait que penser à lui faire du mal.
La simple idée que mon père puisse s'en prendre à Tom me retourne l'estomac.
- Mais continue de faire le malin, t'as raison. Tu va juste finir entre quatre planches, ou entre quatre murs. Tu vois, je suis pas si cruel que ça, je te laisses le choix. Toi qui te croyais dans un restau chinois ça devrait te plaire d'avoir le choix.
Oh putain le sarcasme de malade !
- Bon j'avoue que le choix est limité. On est à cours de stock en ce moment, mais je te conseille la formule du midi, celle où tu t'en tires bien finalement, sans une balle dans la tête par exemple. Il y a même une réduction, si tu fais le bon choix t'auras le droit de revoir ta mère ce soir. Par contre, je t'ai enlevé le privilège de voir ma fille du menu, tu comprends pourquoi j'espère.
Il tape sur la table en faisant glisser sa chaise sur le sol.
- Bon aller ! On te laisse cinq minutes pour réfléchir. Mais prend pas tout ton temps, t'es pas le seul client.
Il se lève enfin, et je me décolle du mur au moment où il ouvre la porte. Benjamin profite de son dos tourné pour croiser mon regard, et je peux vous assurer qu'il n'y aucune douceur dedans. Je suis mon père en dehors de la salle jusqu'au distributeur de boissons. Il reste silencieux le temps que mon chocolat chaud ne se fasse, et attend que je me brûle les mains avec pour m'interpeller.
- Alors ? Il est partit ?
J'acquiesce doucement, encore triste de l'avoir laissé filer.
- Il est monté dans le premier avion.
- Bien.
Il attrape son café, et me lance un regard inquiet. C'est rare de le voir comme ça. D'habitude c'est comme-ci il me faisait entièrement confiance. Comme-ci il ne s'inquiétait de rien.
- Hey, ne t'inquiète pas. On va réussir à le faire plier, je te le promet. Je le laisserais plus jamais te faire du mal.
Tel Chuck Norris il boit déjà son café qui doit être aussi brûlant que le Vésuve. Je ne sais pas comment il fait, moi il va me falloir trois jours de RTT pour pouvoir le finir.
- Je veux pas qu'il s'en prenne à Tom, papa. Qu'il me frappe c'est une chose, mais Tom n'a rien à voir là dedans. Il mérite pas toute cette merde, il mérite déjà tellement mieux que moi, alors si en plus Benjamin s'attaque à sa réputation, il n'aura vraiment aucune raison de rester.
- Bien sûr que non, ma fille. Il a toutes les raisons du monde de rester. Qui serait assez fou pour partir ?
Je souffle sur mon chocolat comme une débile dans l'espoir de pouvoir le boire un jour.
- Assez intelligent tu veux dire ?
- Elena, arrête de t'en faire. On va gagner je te dis. Je te le promet.
Je lève les yeux vers lui, jalouse de son assurance.
- Il peut pas gagner, OK ? C'est impossible avec toutes les charges qui pèsent contre lui. Et croit moi, je ne lui laisserais aucune chance. Il n'a pas d'autre choix que de se taire.
Benjamin ne sait pas se taire. Il en est incapable.
- On va y arriver. Mais à partir de maintenant je veux que tu me préviennes si il te recontacte. Ne serait-ce que si tu le croise dans la rue, je veux être au courant.
- T'en fais pas un peu trop là ?
Ses yeux de glaces me refroidissent aussitôt, et je crois même que mon chocolat chaud est devenu un milkshake.
- T'as vu la tronche que t'as ? Si j'en faisais trop il serait pendu à l'arc de triomphe.
- Je vais bien, papa.
- Ça t'as plutôt intérêt ! Déjà que j'ai envie de le butter alors ne me tente pas plus que ça.
Il avale une nouvelle gorgée de son Vésuve au goût caféiné.
- Mais entre nous, ton copain a fait du bon travail. Il l'a vraiment défoncé.
Le sourire qui illumine son visage me détend un peu, mais pas suffisamment pour que je sois sûr que son plan va marcher.
Lorsque mon père entre à nouveau dans la pièce, les yeux verts de Benjamin me glace le sang.
- Bon alors, t'as choisis ton menu ? Avec ou sans cercueil ?
Je referme la porte en espérant que personne n'ai entendu ça.
- Je dirais rien.
Mon père s'arrête avant même d'avoir pu s'asseoir.
- En voilà une bonne décision ! T'es pas si con que ça finalement.
Il me lance un regard complice, lorsque Ben en fait autant, avec beaucoup plus de rage.
- Bon on va quand-même t'accompagner à la caisse, mais t'inquiète pas l'addition est pour moi. Après tout, t'as l'air d'avoir payé assez cher. Quoi que t'as eu le tarif réduit. Mais trêve de plaisanterie, j'ai pas que ça à faire ! Allez, lève toi !
Il s'exécute et je m'écarte immédiatement de la porte. J'ai trop peur de lui pour le laisser m'approcher à moins d'un mètre, même sous les yeux de mon père. Je les laisse passer devant et leur emboite le pas. Benjamin jette des coups d'œil furtifs vers moi, mais mon père l'a très vite remarqué et n'attend pas d'arriver devant la porte pour lui en parler.
- Bon on est d'accord, tu t'approches plus de ma fille. Si jamais tu la revois, ne serait-ce que par hasard dans la rue, tu changes de trottoir. Si tu peux tu change même de rue. Vaut mieux pour toi et ton assurance décès que tu ne t'en approche pas à moins de trente mètres, est-ce que t'as compris ?
Ils s'arrêtent devant les portes, et s'affrontent du regard pendant de longues secondes.
- Pense à ta mère gamin, elle n'a pas besoin que tu lui inflige autant de paperasses à gérer, sans parler du deuil.
La mâchoire de Benjamin est tellement serrée qu'on pourrait s'en servir comme ouvre boîte. Sa mère c'est tout ce qui lui reste, c'est son seul point faible, et mon père l'a très bien compris.
- Mais bon allez, je crois en toi !
Il lui donne une énorme tape dans l'épaule, si forte que Ben vacille sur ses appuis.
- Je suis sûr que t'es suffisamment intelligent pour comprendre que ta meilleure option c'est de ne plus jamais revoir ma fille.
- Aller, rentre bien surtout. Et pas la peine de refoutre les pieds dans un commissariat, tu les connais déjà tous par coeur de toute façon. Ça n'a plus rien à d'intéressant pour toi.
Benjamin jette un oeil vers moi, et mon père réagit au quart de tour. Il lui attrape le menton pour lui détourner les yeux et monopoliser son regard.
- Hey ! Tu la regarde pas, je t'interdis même de penser à elle, est-ce que c'est clair ?
Il relâche son emprise et Ben met aussitôt de la distance entre eux.
- Je peux te garantir que même si tu penses à elle, je le saurais. Et là tu verras ce que c'est qu'une menace. Surtout lorsque je la met à exécution. Maintenant casse toi ! Et vaut mieux pour toi qu'on ne se recroise pas.
Benjamin serre les dents, et je suis sûr qu'il se retient de me foudroyer du regard. Il tourne les talons et Dieu seul sait à quoi il pense, mais ses poings serrés ne présage rien de bon.
- Aller, je te ramènes chez toi !
Je pose les yeux sur mon père en sortant de mes pensées.
- Papa, c'est bon, je peux y aller toute seule.
Il me dévisage un moment de son regard méfiant, avant d'acquiescer.
- Comme tu veux. Mais tu fais comme on a dit. Au moindre doute, tu m'appelles. La prochaine fois je te garantis qu'il pourra pas porter plainte.
Ça j'en suis convaincu ! Et c'est ce qui me fait le plus peur en réalité.

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Unexpected [FR/EN]
Fanfiction"- Elena !" C'est mon nom. Mais prononcé avec son accent ça me retourne l'estomac, à chaque fois. J'étais pas prête. Rien dans ma vie ne me prédestinait à rencontrer quelqu'un comme lui. Quelqu'un comme lui ? Il n'a rien d'anormal pourtant, ce n'es...