Unexpected [FR/EN]

Chapitre 57

Vous vous demandez sûrement si je culpabilise de ne pas lui avoir dit toute la vérité. Et bah la question elle est vite répondue. Je culpabilise à mort. Je sais que c'était le moment parfait pour lui dire. Mais j'ai vu dans son regard qu'il n'était pas prêt à l'entendre. La question à se poser c'est quand est-ce qu'il sera prêt ? On n'est jamais prêt à entendre un truc pareil. Ça nous tombe juste dessus, comme une énorme averse inattendue. Comme ça m'est tombé dessus à moi aussi. Je sais qu'il mérite de savoir la fin de l'histoire et que je serais forcée de lui dire tôt ou tard. Mais c'est trop dur. Il avait l'air tellement... tellement triste. Comment j'aurais pu le rendre malheureux encore plus qu'il ne l'était déjà ? J'ai pas envie de ça. Je veux pas le rendre malheureux. Je veux juste... je veux juste vivre une vie heureuse et épanouie avec lui. Mais c'est super égoïste quand j'y pense en fait. Parce que là, tout ce que je vois, c'est mon bonheur à moi. Je ne dis rien parce que je ne veux pas le faire souffrir mais en vérité ça ne change rien. Il souffre quand même de ne pas savoir. Le silence est parfois plus lourd à porter que la vérité. Putain je suis vraiment trop nulle.
- Hey babe !
Je délaisse mon reflet dans le miroir où j'étais en train d'essayer de faire disparaître les cernes sous mes yeux, pour me tourner vers la porte de la salle de bain où Tom attend, affublé de son costume d'Halloween.
- How do I look ?
Alors... comment vous dire ? Il est juste habillé en espèce de joueur de basket, vous savez avec un short super large qui lui arrive aux genoux. Sauf que je crois que ce n'est pas en joueur de basket qu'il est déguisé. Ah et aussi que son ensemble est entièrement jaune super flashy presque doré avec quelques bandes rouges. L'assortiment de couleur bien ringard quoi. Mais bon... heureusement que j'aime le type en dessous de ces vêtements.
- Well... you look really... good.
J'acquiesce pour me convaincre moi-même, lorsqu'il esquisse un sourire super heureux.
- Thank you baby. And you haven't seen the wig yet !
Il me tourne le dos, tout fier de lui alors que je n'ai même compris ce qu'il vient de dire. Bon, c'est pas grave, il faut que je termine de me maquiller si je ne veux pas les faire attendre. Je me remets à ma tâche lorsque la silhouette jaune de Tom dans le miroir attire mon attention. Je pose les yeux sur lui à travers le reflet pour le retrouver avec une perruque énorme sur la tête, dont les cheveux blond platine sont coiffés en forme de mulet. What the fuck ! Pourquoi est-ce que même avec une perruque aussi immonde et un costume aussi ringard j'ai envie de l'épouser ? Lorsqu'on dit que l'amour rend aveugle, je vous assure que je sais maintenant d'où vient cette expression. Son sourire est tellement joyeux que je ne peux pas retenir mon rire. J'essaie tant bien que mal de ne pas éclater de rire, mais c'est plus fort que moi.
- What ? You don't like it ?
Je pose mon crayon sur le rebord du lavabo pour me tourner vers lui.
- You look ridiculus.
- Really ?
Ses sourcils se fronces mais il n'a pas l'air blessé, au contraire. Il a l'air même plutôt content.
- That's the point !
Ah parce qu'en plus c'est fait exprès ? Enfin, heureusement en fait.
- Great ! This is a success !
Il me fait le plus beau des sourire, le plus grand dont il est capable, celui où ses yeux sont presque fermés et où leurs rides sont beaucoup trop mignonnes. Puis il traverse la distance qui nous sépare en quelques pas, retirant cette affreuse perruque de sa tête pour glisser ses mains brûlantes sur mes hanches.
- You're ready ?
J'acquiesce en laissant mes mains caresser ses bras. Mon regard se balade sur son visage pour en admirer chaque détail. Et franchement... j'adore ses sourcils. Ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien. Je délaisse un de ses bras pour poser délicatement ma main sur sa joue, la chaleur qu'elle dégage m'arrache un sourire, tandis que du bout du pouce je retrace la ligne de son sourcil gauche, celui qui est déviant. Il ne me quitte pas des yeux, et j'adore sentir son regard sur moi. Ça m'enflamme le cœur.
- Why you're not wearing a disguise ?
Mon regard croise le sien, et je délaisse son charmant sourcil pour caresser la ligne de son nez, et la légère bosse qui la casse en plein milieu.
- I don't need a disguise.
Il fronce les sourcils, ce qui a pour effet de plisser son nez. Je souris bêtement en dérivant mon pouce au coin de sa bouche.
- Why ?
J'observe la fine moustache qui pousse au-dessus de sa lèvre, clairement pas suffisante pour être qualifiée de moustache à vrai dire, mais qui lui donne quelque chose en plus.
- Because I'm naturally terrifying.
Je croise son regard une seconde et la désapprobation qui l'habite me force à rire.
- That's not funny.
Mes yeux retombent sur ses lèvres roses, toutes petites mais si importantes pour moi.
- Of course it is.
Je laisse mon pousse se balader sur le contour de sa lèvre inférieur, celle qu'il ne cesse de mordre lorsqu'il se retient de rire, ou lorsqu'il réfléchit. Franchement je suis hyper jalouse de cette lèvre. C'est vrai quoi, moi aussi je veux qu'il me morde. Bon OK, je suis chelou, je m'en excuse d'avance. Mais merde... ce qu'il est sexy.
- It's not.
Ses lèvres se mouvent lorsqu'il parle, interrompant le chemin de mon pouce qui atterrit au milieu de sa bouche. Je suis clairement amoureuse de cet homme. Et de sa bouche par la même occasion. Je laisse mon pouce retomber sur son menton, et continuer son chemin le long de sa mâchoire. Bordel ce que j'aime cette mâchoire.
- Are you gonna stroke every part of my body like that ?
Je lève les yeux vers ses deux prunelles brunes qui me scrute avec attention, lorsqu'il se met à sourire.
- Because if you do...
Ses mains agrippent un peu plus mes hanches pour m'attirer à lui, me forçant à coller mon ventre au sien.
- I'm not gonna keep these clothes on for very long. And we'll never set a foot on this Halloween party.
Son sourire enjôleur m'arrache un fou-rire, tandis qu'il colle tout son corps au mien, m'obligeant à m'appuyer contre le lavabo derrière moi.
- What's funny again ?
J'attrape ses bras à pleine mains, j'aime sentir ses muscles sous mes doigts. Ça me ramène aux brefs souvenirs que j'ai de la première nuit où je les ai sentis pour la première fois. Cette nuit où Miguel avait mis de l'extasie dans mon verre. Je me souviens parfaitement de cette sensation. Et j'adore la retrouver.
- I don't know... I hesitate between your wig and your enthusiasm for wanting to undress you.
Il esquisse un sourire si doux que je sais qu'il est absorbé dans ses pensées. Mais je ne sais pas à quoi il pense.
- And me... I hesitate between making love to you or taking you to church to give you my last name.
Mon estomac tout entier semble en apesanteur pendant deux bonnes secondes, et c'est vraiment désagréable comme sensation. C'est comme-ci je me prenais un coup de poing dans le ventre, sauf que ce n'est pas douloureux. What the fuck he just said ? Je n'arrive pas à croire que j'ai entendu le mot église associé à sa volonté de me donner son nom de famille. Non franchement, s'il ne me tenait pas fermement par les hanches je serais déjà en train de faire un AVC sur le carrelage de cette salle de bain.
- Qu... quoi ?
Son sourire fait repartir mon cœur qui était en plein infarctus depuis trente secondes déjà.
- I love you so much, you can't even imagine.
OK... respire. Inspire, expire, tout va bien se passer. Ne tombe pas dans les pommes. Je répète, ne tombe pas dans les pommes putain !
- Maybe I can't imagine it, but I love to hear you say it.
Ses mains accrochent un peu plus mes hanches, tandis qu'il ne me laisse même pas une seconde pour admirer son joli sourire et embrasse mes lèvres à pleine bouche, comme-ci c'était la dernière fois qu'il en avait l'occasion. J'aime vraiment cet homme, mais lorsqu'il fait ça il ne s'en rend absolument pas compte de la pression que doit supporter mon pauvre petit cœur. Un jour je vais vraiment finir par faire un infarctus et là il sera vraiment emmerdé. Je me laisse porter par ses lèvres, oubliant totalement tout ce qui nous entoure, et pour la première fois depuis que je suis arrivé ici, j'oublie également ce que Benjamin m'a fait. Je me laisse juste transporter dans une autre dimension où cette bouche serait le portail vers un avenir heureux et paisible. Je sens sa poigne se faire plus forte, jusqu'à pincer ma peau pour me soulever du sol. J'ai à peine le temps de me rendre compte que mes pieds sont dans le vide que mon corps se retrouve hissé sur le lavabo dont j'admire à présent les doubles vasques qui me permettent un confort bien moins rudimentaire qu'avec un lavabo individuel. Mes mains ont déserté ses bras et je ne sais comment se sont retrouvées sur son visage. Je me laisse aller à caresser ses cheveux, et la nostalgie de sentir les boucles sous mes doigts me sort de notre baiser. Comme-ci j'avais eu un déclic et que mon cerveau s'était demandé pendant une seconde s'il s'agissait bien de Tom.
Lorsque mon regard plonge dans le sien, ce stupide cerveau assimile enfin qu'il s'agit bien de l'homme qu'on aime tous les deux lui et moi. Lui et mon cerveau, je veux dire. Parce que je commence vraiment à croire qu'on est deux êtres totalement à part dans un seul et même corps. Je vous jure il prend vraiment des décisions parfois dont je me demande d'où elles peuvent bien venir.
- What ? You wanna stop ?
Je secoue la tête pour lui dire non, mais mon cerveau n'est absolument pas d'accord avec ça, et commence à envoyer des images pas très sympa provenant directement de ma mémoire. Putain de cerveau à la con ! J'ai à peine le temps de me retrouver à nouveau dans cette salle de bain avec Benjamin que les lèvres de Tom efface ce mauvais souvenir en une seconde. Bordel, je vous avais bien dit qu'un seul baiser de lui pouvait réparer mon petit cœur brisé. Tiens-toi bien cerveau, parce que t'es pas près de gagner sur ce coup-là. Je ne vais pas laisser l'homme que j'aime m'échapper parce que tu refuses de me laisser me concentrer sur lui lorsqu'il essaie désespérément de me déshabiller.
Ses mains glissent sous mon T-shirt et je dois combattre les images qui me reviennent pour me concentrer uniquement sur la chaleur qu'elles dégagent sur ma peau. Elles remontent le long de mon dos, collant ma poitrine contre son torse, et lorsqu'elles atteignent les agrafes de mon soutien-gorge, elles s'arrêtent nettes, et notre baiser aussi. J'ouvre à nouveau les yeux pour plonger immédiatement dans ceux de Tom. Pourquoi est-ce qu'il s'est arrêté au juste ? Pour une fois que j'étais en train de combattre ces putains de souvenirs !
- Qu'est-ce qu'il y a ?
Parfois j'oublie pendant quelques secondes qu'il ne comprend pas un mot de Français, mais là en l'occurrence, ça n'a pas l'air de le déranger. Il avale sa salive d'un air nerveux, avant de laisser ses mains glisser sur mes hanches, laissant mon T-shirt reprendre sa place initiale.
- I don't want to force you.
Il baisse les yeux quelques secondes, avant de s'écarter complètement de moi, laissant un vide immense entre mes jambes, et dans mon cœur par la même occasion. Sa chaleur me manque déjà. Il attrape sa perruque dans le lavabo derrière moi, et m'adresse un sourire pincé, presque désolé. Non mais attendez une seconde... pourquoi est-ce qu'il a l'air désolé alors que j'étais prête à le faire ? Putain mais j'étais chaude là !
- Harry's waiting for us.
Il baisse la tête vers la perruque dans ses mains avant de me tourner le dos pour quitter la salle de bain. What the fuck just happened ? Bordel la vie est vraiment contre moi sérieusement.