Chapitre 11

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À mon plus grand désarroi il s'écarte de moi, mais ses mains restent accrochées à mes épaules, et ses yeux plongent dans les miens avec une puissance qui me dépasse.
- How are you ?
Il baisse les yeux vers mon top fleuris au vu de la chaleur étouffante du mois de juillet, avant de recroiser mon regard.
- You look so...
Il s'arrête dans sa phrase et s'écarte brusquement de moi, comme-ci il avait pris conscience que ses mains sur mes épaules m'empêchent de bouger.
- You look so pretty.
Un sourire étire ses lèvres tandis que je viens à peine de réaliser ce qu'il vient de me dire. Mes sourcils se haussent sans mon consentement et il doit l'avoir remarqué car il arrête aussitôt de sourire.
- Hum, I mean... you look good. You look really good.
Il esquisse un sourire pincé, tandis que j'ai du mal à basculer mon cerveau en Anglais.
- Heu... toi aussi. Enfin, you too. You're pretty handsome.
Ça fait tellement longtemps que je n'ai pas parlé Anglais, c'est dingue. Je lui adresse un faible sourire, en essayant de paraître le plus accueillante possible, lorsqu'il sourit à son tour mais avec un malaise décelable à des kilomètres. Il jette un œil au type qui se tient derrière lui, et je prends de nouveau conscience que nous ne sommes pas seuls.
- Jake, this is Elena. She's a really good friend.
Le grand brun d'une tête de plus que Tom pose ses yeux bleus sur moi et m'adresse un sourire formel en tendant sa main à mon intention.
- Enchanté, Elena. Je suis Jake, a friend of Tom. And his partner in the movie.
Waouh ! Il parle bien français, presque mieux que moi. Je lui serre la main avec politesse en essayant de ne pas trembler, ce qui est évidemment impossible.
- Nice to meet you.
Je reprends ma main en posant les yeux sur Tom qui me dévisage en silence.
- Shouldn't we take the picture ?
Il cligne des yeux en sortant de ses pensées, avant de froncer les sourcils en semblant perplexe.
- You're here to take a picture with me ?
Et bah, il a toujours l'air aussi perdu qu'il y a trois mois.
- Yes, like everyone else here.
Il ouvre les yeux un peu plus grands en jetant un œil à la file d'attente derrière moi.
- Oh, well...
Ses yeux sombres tombent à nouveau sur moi et je n'arrive pas à faire redescendre ma nervosité.
- You don't have to wait to take a picture with me.
S'il savait qu'à la base c'était l'idée d'Emily, il serait déçu.
- Et bah... I've been waiting for three months, so... one more hour won't change anything.
Ses sourcils se haussent brusquement, comme-ci je venais de le gifler, tandis qu'il se mord la lèvre comme pour s'empêcher de faire quelque chose.
- I'm sorry...
- It's alright. We have to take the picture, people are waiting.
Je le coupe dans ses remords pour mettre fin à ce moment plus que gênant. Et aussi parce que la cinquantaine de filles qui peuvent nous voir doivent se demander ce qu'on fou.
- Hum... yeah, you're right.
Il échange un regard avec Jake, avant de se décaler pour se placer à côté de lui en me laissant un espace pour m'incruster. Je jette un rapide coup d'œil au grand brun avant de me frayer une place entre eux pour prendre cette maudite photo. À peine incrustée, je sens une main glisser dans mon dos avec douceur et une autre se poser sur mon épaule. Je lève les yeux vers Jake à ma droite qui est le propriétaire de la main sur mon épaule, lorsque celle dans mon dos me tire légèrement vers la gauche. Je sens la hanche de Tom se coller contre la mienne, lorsque le photographe nous fait un signe de la main pour indiquer qu'il va prendre la photo. Bon aller, il est temps de sourire ! J'esquisse à peine un sourire, qui doit plutôt ressembler à une grimace lorsque le flash apparaît. La vache, c'est du rapide ! Et encore, j'ai eu plus de temps que les autres. Je n'aime pas tellement ce sentiment d'être privilégiée.
- Suivant !
Le hurlement du photographe me sort de mes pensées. Jake reprend sa main, mais celle dans mon dos reste en place. Je lève les yeux vers Tom qui fait un signe de la main au photographe.
- One more, please !
Son regard croise le mien, lorsqu'il retire sa main de mon dos pour attraper les miennes sans ma permission. Je suis forcée de lui faire face tandis qu'il serre mes mains dans les siennes en m'infligeant un micro arrêt cardiaque.
- You have waiting for three months to take a picture with me, I think you deserve one more.
Oh merde... je sens la jalousie des filles derrière moi me compresser la poitrine dans le but de m'étouffer. Il esquisse un sourire si grand que les rides autour de ses yeux apparaissent à nouveau. Et avant que je n'aie le temps de dire quoi que ce soit, il pose un genou à terre, les mains toujours dans les miennes, avec ce sourire éblouissant qui a fait tomber Emily raide dingue de lui. Le flash me sort de mes pensées, et il se relève aussitôt en s'approchant pour me chuchoter à l'oreille.
- We have to prepare our weeding, do you remember ?
Mon cœur frappe violemment ma poitrine, lorsque son souffle caresse ma peau. Il replonge son regard dans le mien, et je vous assure que c'est tout sauf amusant. Je ne sais pas pourquoi, mais tout est différent entre nous. J'ai perdu cette aisance qui rendait tout plus facile. Là, j'ai juste l'impression d'être devant un type auquel j'ai pensé pendant trois mois, un rêve à la con qui se réalise et qui me rappelle qu'il n'y aura rien derrière. Rien ne ressortira de cette nouvelle rencontre. Je ne sais même pas pourquoi je suis venu ici. Et pourtant, face à ses yeux plantés sur moi, je n'arrive pas à regretter d'avoir attendu en espérant le revoir. Malgré tout, ça fait du bien. Et je crois que c'est ça le problème finalement.
Je retire mes mains des siennes en reculant brusquement, si vite que je vois son regard changer au même instant. Avec cette inquiétude que je n'ai pas vu depuis plus de trois mois.
- Je dois y aller.
Je jette un œil à Jake qui n'a pas l'air de comprendre, avant de croiser à nouveau le regard de Tom.
- Je suis désolé.
Je passe près de lui en vitesse pour rejoindre la sortie.
- Wait...
Je ne me retourne pas et fonce au bureau où les photos sont déjà sortis et m'attendent impatiemment. Je les attrape en une seconde chrono pour foncer sur Emily qui attend près de la sortie dans l'immense salle où tous les stands de goodies et d'autographes se regroupent.
- Alors ? Comment c'était ?
Je la foudroie du regard sans vraiment le vouloir, c'est mon principal défaut. Ne pas réussir à cacher mes sentiments au travers de mes yeux.
- Génial.
Je lui tends mes photos en dérivant les yeux sur les stands alentours.
- Putain mais t'es sérieuse ?
Je repose les yeux sur elle et ses yeux bleus me frappe avec jalousie.
- T'en as eu deux ! Et sur l'une d'elle on dirait qu'il te demande en mariage.
Si elle savait que c'est quasiment ce qu'il s'est passé, elle me tabasserait à mort.
- Je sais, merci.
Je reprends les photos pour jeter un œil dessus. Putain c'est fou ce que je ne suis pas photogénique. Tom lui, sourit de toutes ses dents.
- Qu'est-ce qu'il t'a dit du coup ?
Je lui jette un regard, pas sûr que lui dire la vérité soit la bonne solution.
- Que je n'aurais pas dû attendre pour prendre une photo avec lui.
- C'est tout ? Mais tu y es resté plus longtemps que moi.
Elle ne va pas me lâcher putain.
- Il m'a présenté l'autre type, Jake, et il m'a dit que je méritais une deuxième photo, c'est tout.
Ses yeux se plissent car de toute évidence elle sait que je ne dis pas tout.
- T'es sûr ?
Qu'est-ce que je vous disais ?
- Oui, je suis sûr.
- Mais il ne t'a pas pris dans ses bras ? Il n'a pas dit qu'il était content de te revoir ?
- Non !
Son regard suspicieux m'agace au plus haut point.
- C'est bizarre.
- Putain mais pourquoi tu veux absolument qu'il se soit passé quelque chose ? J'ai eu la même entrevu que toi parce que je n'ai rien à lui apporter de plus que les autres.
Elle saute d'un pied à l'autre et c'est mauvais signe pour moi.
- Pourquoi t'es pessimiste comme ça ?
Aller ça recommence ! Cette question j'y ai le droit toutes les semaines.
- Je ne suis pas pessimiste, je suis réaliste !
- T'es pessimiste !
- Absolument pas !
Elle hausse les sourcils avec ce regard hautain que je déteste tant.
- Pourquoi tu refuse d'admettre qu'il t'arrive quelque chose de bien ?
Je la foudroie du regard, consciemment cette fois-ci.
- Parce que ce n'est pas le cas !
- Oh arrête putain, c'est chiant à la fin. Je suis sûr qu'il s'est passé un truc, il n'aurait jamais fait deux photos sinon, dont une où vous n'êtes que tous les deux.
- Mais qu'est-ce que ça change ?
- Ça change tout, Elie.
Je repose les yeux au loin en essayant de ne pas me laisser déborder par mes émotions.
- Il a dit que je lui avais manqué. Il m'a pris dans ses bras, et il a dit que j'étais belle.
Je la vois du coin de l'œil commencer à se réjouir et ça m'exaspère déjà.
- Non, s'il te plaît, arrête.
Je croise ses yeux bleus noyés d'incompréhension.
- J'ai pas envie d'interpréter ça comme-ci c'était un signe de je ne sais quoi. Il a seulement fait ça par politesse, parce que je le connaissais déjà.
Cette fois c'est elle qui me foudroie du regard.
- Mais bordel pourquoi t'es comme ça ? Pourquoi tu ne te réjouis pas ?
- Me réjouir de quoi putain ?
Je plante mon regard dans le sien avec une intensité qu'elle n'aime pas, et je le sais.
- Ça ne rime à rien tout ça, OK ? Parce que demain il sera reparti et moi je serais toute seule ! Encore une fois ! Parce que depuis que j'ai eu le malheur de rentrer dans sa chambre tout est devenu un énorme bordel ! Benjamin m'a largué, je me suis incrusté chez toi et t'en as profité pour me foutre toutes ces conneries dans la tête !
Son regard devient noir en une seconde seulement.
- Attend de quelles conneries tu parles là ?
- Mais de tout ça putain ! Du fait qu'il y ait une chance sur un million que cette putain de rencontre mène à quelque chose !
- Non mais c'est quoi ton problème ?
- Mon problème c'est qu'à cause de toi je vois des signes où il n'y en a pas ! Que j'imagine des trucs qui n'arriveront jamais !
- Et c'est de ma faute ?
- Bien sûr que c'est de ta faute ! Je n'aurais jamais du te suivre ici putain !
Elle serre les dents et réfléchit déjà à sa prochaine réplique.
- Pourquoi tu ne veux pas y croire ?
- Mais parce que ça me fait trop mal !
Je dérive le regard en essayant de calmer mes nerfs, sans succès.
- Tu ne comprends pas que ça me fait du mal d'être ici ? De le revoir après trois mois à m'être imaginé des conneries, à avoir espéré comme une conne qu'il me regarde différemment des autres ! Mais ce n'est pas le cas ! Parce que tout ce que j'ai gagné après ces trois mois à la con c'est d'être devenu une putain de gourde !
Lorsque je repose les yeux sur elle, son regard s'est adoucit.
- J'ai pas envie d'attendre à espérer que quelque chose de fou se produise. Ça fait trop de mal, Emi.
Elle secoue la tête en glissant une main sur mon bras.
- T'es vraiment stupide comme fille, tu le sais ça ?
Ah bah merci du réconfort !
- Tu ne veux pas attendre que ça te tombe dessus mais tu refuses de foncer dans le tas. Ce type est là à te dire que tu lui as manqué et toi tu te barre comme une voleuse ? Putain Elie, ouvre les yeux ! T'es toute seule maintenant, et tu n'imagines pas le nombre de filles qui aimerait avoir ne serait-ce qu'un quart de ce que tu as eu avec lui.
Elle glisse sa main dans la mienne avec une douceur dont j'ai terriblement besoin.
- Alors ouais, il va partir, demain ou peut-être après demain, mais tout ce que tu pourras faire avec lui jusqu'à ce qu'il parte ce sera toujours mieux que d'espérer comme une gourde. T'as une chance de dingue, Elena, alors t'as pas le droit de la gâcher, parce que si tu fais ça je te jure que je te fou à la porte de chez moi et que tu n'entendras plus jamais parler de moi.
J'esquisse un faible sourire en serrant sa main dans la mienne.
- Et si ça fait mal au bout du compte ?
- Au moins tu auras tout donné, tu n'auras pas mal sans n'avoir rien tenté, avec l'ignorance de savoir si ça aurait pu marcher ou non.
Merde... encore une fois elle a eu raison de moi. Je ne sais vraiment pas comment elle fait pour voir le bien partout. Moi je suis vraiment nulle à ça.
Elle tire ma main pour me serrer contre elle avec sa force de moineau.
- T'es con comme fille, mais qu'est-ce que je t'aime.
Elle a toujours le mot qui réconforte, c'est dingue. C'est l'une de ses plus grandes qualités ça.
- Je te retourne le compliment.
Elle s'écarte de moi pour me donner un coup de coude dans le bras avec un sourire enfantin.
- Hey !
Franchement, je serais vraiment mal barrée sans elle.
- Bon on fait quoi maintenant ? Parce que je ne peux pas retourner le voir, et je ne sais même pas s'il est encore au Royal.
- Il est au Royal.
Je savais qu'elle allait le stalker, c'est tout elle ça.
- Me regarde pas comme ça, c'est mon boulot de savoir qui sont mes clients.
- Non, ton boulot c'est de nettoyer les chambres.
- Peut-être, mais s'il y a une chance pour que je rentre dans la chambre d'un acteur que j'aime bien, il est hors de question que je la laisse passer.
Je secoue la tête, désespérée.
- Donc ma seule chance de le revoir c'est au Royal ?
- Non. Il fait une conférence dans une heure à peu près, on peut y assister mais il va falloir faire la queue tout de suite si on veut les meilleures places.
- Il faut encore attendre ?
Elle sourit avec amusement, mais moi ça ne m'amuse pas du tout. Je déteste attendre. Je ne suis pas née pour ça putain !

En moins de quinze minutes on se retrouve dans une nouvelle file d'attente, beaucoup moins longue heureusement pour moi. Je suppose que le reste de la file est dans une autre file d'attente pour avoir leurs photos avec Tom et Jake.
- On n'aura pas de places devant je suis dégouté.
Je pose les yeux sur elle, surprise qu'elle soit autant obnubilée par lui. Je me demande ce que Simon pense de tout ça. À sa place je serais un peu jaloux quand même.
- C'est pas grave, tu pourras toujours le voir à l'hôtel.
- Tu parles ! Moi je vais pas dormir avec lui, contrairement à toi.
Elle me lance un regard méprisant qui m'arrache un sourire. Je me souviens de cette nuit-là comme-ci c'était hier. J'étais tellement bien, jusqu'à ce que je me rende compte que ce n'était pas Benjamin.
- T'es jalouse hein ?
- Je te déteste, tu veux dire.
Je ne retiens pas mon fou-rire. Elle n'a pas cessé de me dire qu'elle m'en voulait. Et pendant un moment ça m'a fait culpabiliser, jusqu'à ce que je comprenne que je n'y étais pour rien.
On entre dans le petit amphithéâtre et Dieu merci pour Emily, on atterrit au deuxième rang. Ce n'est pas le premier rang, mais c'est toujours mieux que rien. Elle reprend mes photos pour les immortaliser avec son téléphone.
- Qu'est-ce que tu fais ?
Elle me rend mes photos en pianotant sur son écran.
- Je vais les envoyer à Simon, et après je vais les mettre sur Insta.
- Ah non ! Pas Insta !
Ses yeux bleus me foudroient sur place.
- Si, sur Insta.
- Ce sont mes photos je te rappel. Qu'est-ce tu fais du droit à l'image ?
- Je m'en tape du droit à l'image, il faut que tout le monde vois à quel point il est mignon avec toi.
Je lève les yeux au ciel, exaspérée par son enthousiasme. Elle n'arrêtera donc jamais. 

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