Chapitre 58

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On est restés dans les bras l'un de l'autre, assis au sol pendant ce qui m'a semblait être une éternité. Dans le silence le plus total. Mais ça m'a fait du bien. Lorsqu'on s'est enfin allongés sur le lit je me suis endormie en deux minutes à peine, épuisée par tant d'émotions. J'ai dormi d'un sommeil sans rêves, ce qui est vraiment très rare. Encore plus depuis que je suis partit de chez moi. Mais c'est reposant de ne pas rêver. Je n'ai pas à revivre ce cauchemar.
D'ailleurs en parlant de réveil... lorsque j'ouvre les yeux en sortant de mon sommeil, la première chose que je vois c'est Tom. Il est là, allongé à côté de moi entrain de fixer le plafond. Son regard semble vide, comme-ci il dormait les yeux ouverts. Je glisse une main sur son bras, appréciant la chaleur de son biceps, lorsqu'il sursaute brusquement en posant les yeux sur moi. La vache il dormait vraiment les yeux ouverts ou quoi ? La surprise dans son regard s'éteint rapidement et il pose une main brûlante sur la mienne en esquissant un bref sourire. Trop bref pour être sincère.
- Hey baby...
Il se tourne sur le côté pour me faire face et entrelace ses doigts aux miens sans plus me quitter des yeux.
- Did you sleep well ?
J'acquiesce doucement, surprise par le ton cassé de sa voix. On dirait qu'il a hurlé toute la nuit et qu'il n'arrive plus à parler correctement. Son visage a une teinte grisâtre, et je devine que c'est à cause de ce qui s'est passé hier soir. La douleur a marqué son teint, c'est dingue quand même. Et quand j'y repense j'avais la même tête que lui lorsque je suis sorti de la salle de bain ce soir-là.
- Et toi ?
Il baisse les yeux vers nos deux mains, comme-ci il avait compris ma question. Je pense qu'il commence à comprendre un peu lorsque je parle Français. Si ce n'est pas une longue phrase ça lui arrive de ne pas me demander de traduction. Son pouce caresse le dos de ma main tandis qu'il retarde sa réponse.
- I didn't sleep actually.
Ses yeux bruns me retombent dessus et au vu de la dilatation de ses pupilles la colère a eu raison de son sommeil en effet.
- I couldn't stop thinking.
Sa mâchoire se serre une seconde seulement, avant qu'il glisse sa seconde main sur mon bras pour caresser ma peau avec son éternelle douceur.
- I have this anger... and this pain... I feel like it's gonna kill me.
Waouh... c'est dur d'entendre ça. De l'entendre dire exactement ce que j'ai ressentis pendant mes premiers jours ici. Ce que je n'ai jamais pu dire à personne. Il baisse les yeux vers nos mains, et je sais qu'il ne veut pas que je voie ses yeux briller. Il a les larmes aux yeux, et c'est de ma faute.
- I don't know how you can handle this.
Ses yeux bruns croisent à nouveau les miens, et je sais maintenant qu'il se retient de pleurer. Cette lueur dans son regard, cette tristesse me serre le cœur si fort qu'il arrête de battre pendant une longue seconde. Je suis forcé de retenir mes larmes moi aussi. Je n'ai pas envie qu'on se mette à pleurer encore une fois. On a suffisamment pleuré.
- How you can handle this pain ? It hurts so bad.
Sa voix se brise sur ce dernier mot et une larme se fraye un chemin sur sa joue. Une larme que je fais immédiatement disparaître du bout de mon pouce sur sa pommette. Je déteste le voir pleurer. C'est réellement la chose la plus douloureuse que je puisse endurer. Même un viol ne m'a pas fait aussi mal. Lorsqu'il pleure c'est tout mon corps qui pleure. Chaque atome qui me permette d'exister ressentent sa tristesse et la retranscrive à mon cerveau multiplié par mille.
- How can you be so strong baby ? I don't know if I could be too.
Il attrape ma main restée sur sa joue et déglutit difficilement.
- It's because of you.
Ses sourcils se froncent une seconde seulement, comme-ci il n'avait pas compris.
- I'm strong because of you. You're the one that making me strong enough to handle this. I'm hurt by pain and anger, but your love... your love is saving me right now. And... I love you so much...
Mes larmes m'échappent, et ça ne sert plus à rien de les retenir. Elles ne m'écoutent jamais de toutes façons ces garces.
- I love you so much, Tom... that's making me strong. My love for you is the answer of that shit. It's because of this that I'm breathing right now.
La surprise dans son regard, me fait comprendre que je viens d'avouer quelque chose auquel il ne s'attendait pas. Qui s'attendrait à ce que je me suicide après tout ? Mise à part Benjamin, bien sûr.
- That's why I came here. I came here to be saved, and free, and... and happy. And you're giving me all I want. I couldn't be more grateful to have you in my life. That's why I never want to hear you say that all this shit is your fault again. Because if you weren't in my life right now... I would be dead.
Tout son visage se crispe à l'entente de ce dernier mot, et je sais que c'est dur à entendre. Mais il faut qu'il l'entende. Il faut qu'il sache qu'il m'a sauvé.
- Benjamin would have done it anyway, whether you came into my life or not. Because he's like this... he always loved to hurt me. And he loved even more than I apologize for it. Because he's an asshole. And... that's why you're the best choice I've ever made. I'm glad you're a part of my life.
Il serre ma main dans la sienne en appuyant un peu plus sa joue contre la paume de ma main, incapable de retenir ses larmes lui aussi. Et on va se remettre à pleurer encore une fois.
- And I'm so sorry to be part of yours.
Son regard se fronce à nouveau, parce que de toute évidence il ne s'attendait pas à ça.
- I'm hurting you, and I'm sorry for that.
Il secoue la tête en retirant ma main de sa joue pour y déposer ses lèvres au creux de la paume.
- No, you don't have to be sorry, baby.
Ses jolis yeux bruns replongent dans les miens et je me sens tellement stupide de pleurer maintenant.
- If you suffer, I suffer. That's how a team works. And you're the best partner I've ever had in my entire life.
Le sourire qui étire ses lèvres est sincère cette fois-ci, tellement qu'il me force à l'imiter.
- You're only twenty-three years old, you still have time to have better partners than me.
Son sourire s'agrandit tandis qu'il secoue la tête.
- No, that's not possible. But if you want to play on words...
Il serre ma main dans la sienne en la collant sur son torse pour approcher son visage du mien, monopolisant la moitié de mon oreiller. Il est tellement proche que son souffle tombe sur mes lèvres pour les couvrir d'un voile éphémère de chaleur. J'adore cette sensation. J'ai tellement l'impression qu'il n'appartient qu'à moi dans ces moments-là.
- You're the best partner I've ever had in the last twenty-three years and...
Il avance un peu plus son visage pour s'arrêter à l'embrasure de mes lèvres, les yeux toujours plongés dans les miens. C'est dingue ce qu'ils sont foncés d'aussi près.
- I want you to stay that way for the rest of my life.
Mon cœur ne supporte pas cet aveu plus d'une seconde et frappe ma poitrine avec l'envie de plonger dans celle de Tom pour rejoindre son propre cœur à lui. Je vous avais dit qu'ils sont connectés. Sauf que cet imbécile n'a pas encore compris que s'il sort de ma poitrine je vais mourir. Bon en fait je vais continuer de vivre, mais dans la poitrine de Tom. Ça ne semble pas être une si mauvaise idée finalement.
Je n'ai pas le temps de réfléchir plus longtemps que les lèvres de l'homme le plus beau de cette planète embrassent les miennes avec une douceur dont je ne me lasserais jamais. C'est étrange parce que, ce baiser me semble tellement plus fort maintenant qu'il sait. Comme-ci la douleur de ce qui s'est passé avait intensifié son amour pour moi. Et je suppose que mes lèvres doivent vraiment lui plaire car il ne s'en décroche plus pendant de longues, très longues secondes. Il délaisse même ma main pour glisser la sienne sur ma fesse et m'attirer à lui de toutes ses forces. J'enlace sa hanche gauche de ma jambe en me collant un peu plus à lui. J'adore le sentir contre moi, c'est vraiment la seule chose qui peut me faire oublier n'importe quelle douleur. Je pourrais être en train de crever d'une hémorragie interne que je ne ressentirais rien, rien d'autre que la chaleur de ses hanches, de ses mains et de ses lèvres.
Il se tourne sur le dos en m'entraînant avec lui, me forçant à l'étouffer de mon poids. Mes cheveux cachent malencontreusement son visage et je m'écarte volontairement de lui pour le laisser respirer. On se met à rire comme deux idiots, oubliant totalement ce qui s'est passé, et ça fait du bien. Ses mains sur mes hanches sont accrochées tellement fort que je ne peux plus bouger. Mais c'est pas grave, je reste assise sur lui, mes yeux dans les siens, pour le plus grand bonheur de mon petit cœur abîmé. Il se passe quelques secondes de flottement, quelques secondes de silence où on reste là à se regarder dans le blanc des yeux. Moi j'adore observer son visage. Je pourrais faire ça toute la journée. La Joconde n'a plus qu'à aller se rhabiller.
Je m'apprêtais à caresser ses joues lorsqu'il m'arrêta en plein vol, accrochant une main à ma nuque pour me forcer à baisser la tête vers lui. Ses lèvres heurtent les miennes de plein fouet, et il relâche vite ma nuque pour attraper à nouveau ma hanche. Je sens sa main glisser sous mon T-shirt pour caresser mon dos, remonter jusqu'à mes omoplates, comme-ci elle cherchait à dégrafer mon soutien-gorge qui n'est plus là depuis hier soir. Ses doigts caressent ma peau et atterrissent sur mes épaules, lorsqu'il arrête de m'embrasser. Je rouvre les yeux pour plonger dans son regard, me demandant bien ce qui peut l'arrêter.
- Do you think of what he've done to you when I touch you ?
Mon cœur dérape dans ma poitrine, comme après un mauvais dépars au Triathlon des J.O. Comment il fait pour penser à ça ? Comment il fait pour savoir ce que je ressens ?
- Sometimes, yeah.
J'acquiesce comme pour ne pas en dire plus, parce que je n'ai pas envie de penser à ça. J'ai pas envie que ça recommence. Je ne veux pas avoir l'impression d'être là-bas à nouveau alors que ce sont ses mains à lui qui sont sur ma peau. Je veux juste penser à lui. Me concentrer que sur lui.
Sa main glisse de mon épaule pour longer ma colonne vertébrale, vertèbre par vertèbre, le plus doucement du monde.
- And now ? Do you think about it ?
Ce qui est étonnant c'est que la réponse est non. Je ne sais pas si c'est parce que je refuse d'y penser, ce qui n'a absolument pas marché pour ses quatre dernières semaines, ou si c'est simplement parce que j'ai l'impression de ne plus avoir à lutter. J'ai l'impression que maintenant qu'il sait, je n'ai plus à lutter contre mes souvenirs, je n'ai plus besoin de les cacher. Et ça a l'air de marcher.
- Non.
Je secoue la tête, et ses lèvres esquissent un sourire si bref que je n'ai pas eu le temps d'en profiter. Ses deux mains se mettent à glisser le long de mon dos en remontant doucement mon T-shirt jusqu'à mes épaules et il n'a pas besoin de demander pour que j'acquiesce, acceptant la demande qui attend patiemment au fond de ses yeux et qui n'a pas encore atteint ses lèvres, transformée en mots clairs et précis. Il me retire mon haut en deux secondes à peine et ne perd pas de temps pour me coller entièrement à lui, sa bouche emprisonnant la mienne. Et aussi fou que ça puisse paraître, je ne ressens que lui. Il n'y a plus aucune image de Benjamin. Je ne ressens plus cette douleur sourde qui se déclarait sous les doigts de Tom, comme pour me rappeler les horreurs que j'ai subis. Je ne ressens que lui. La chaleur de son corps est un antidote naturel à la douleur. Et je trouve ça dingue qu'on soit là, entièrement nus, oubliant totalement les pleurs, la peine et la colère. Comme-ci il ne s'était rien passé. Il n'y a plus que nous. Rien d'autre. Et je pensais tellement qu'il refuserait de me toucher après avoir appris ça. Je pensais qu'il aurait du mal à poser les mains sur moi sans penser à ce que Benjamin a fait. Mais il est plus fort que ça apparemment. Il a combattu la douleur tellement plus vite que moi. En une seule nuit il a réussi à passer au-dessus pour ne voir que moi. Pas la victime, juste moi. C'est vraiment... c'est vraiment inattendu.

Lorsque j'entre sous la douche, ça fait déjà deux minutes que j'attendais devant la porte de la salle de bain, pas certaine de pouvoir sauter le pas. De pouvoir entrer dans cette cabine de douche pour rejoindre Tom. Mais il faut que je saute le pas, sinon je ne pourrais pas avancer. Il est là, sous le jet d'eau, les yeux rivés sur le sol. Il me tourne le dos, et c'est plus facile pour moi d'entrer. La chaleur étouffante de l'eau me ramène un mois en arrière. J'ai l'impression de me faire à nouveau étrangler pendant deux secondes à peine, avant de reprendre le contrôle de mon esprit. De reprendre place dans cette cabine de douche avec Tom en face de moi, et non Benjamin. Je laisse mon regard parcourir son dos musclé jusqu'à la courbe de ses reins. C'est dingue ce qu'il a de magnifiques fesses. Franchement je suis jalouse que les miennes ne soient pas aussi belles. Il lève les mains jusqu'à son crâne, et m'offre en spectacle ses biceps contractés où l'eau ruisselle pour tomber en filés au sol. Je pose enfin une main sur son dos. Du bout des doigts seulement je caresse son omoplate, appréciant la chaleur de l'eau qui coule sur sa peau. Certaines goutes restent intactes, et d'autre glissent pour rejoindre la courbe de ses reins. Waouh... qu'est-ce que j'aimerais être une goutte d'eau. Ne me soucier de rien, juste glisser sur cette peau marquée de tâches de rousseurs, gonflée par les muscles, et finir ma course sur les fesses les plus belles de Grande-Bretagne. Louis Tomlinson n'a qu'à bien se tenir. Lui qui était mon fessier préféré de Grande-Bretagne, ma vision a complètement changée lorsque j'ai rencontré Tom.
Mes doigts suivent le chemin qu'empruntent les gouttes d'eau pour atterrir à la courbe de ses reins. J'arrête mes caresses à l'embrasure de sa fesse droite, lorsqu'il se retourne brusquement. Je recule sous la surprise, croisant ses yeux bruns cernés par la fatigue. L'eau tombe sur l'arrière de son crâne, laissant quelques gouttes se balader sur son visage. Et il y a cette goutte qui perle à ses lèvres. Cette seule et unique goutte qui attire à présent toute mon attention. Je m'approche à nouveau, d'un pas seulement pour sentir la chaleur de son corps alors qu'il n'est pourtant pas collé au mien. Mes mains rejoignent ses biceps, et ne me demandé pas pourquoi, je fais disparaître cette goutte du bout de ma langue. Tom ne bouge pas d'un cil, et je trouve son sang-froid impressionnant. Même moi j'ai du mal à garder mon calme. Ne vous méprenez pas, je n'ai pas l'irrépressible envie de me coller à lui pour faire une multitude de bébés, non pas du tout, bien que la proposition semble être géniale, je pense qu'il est suffisamment fatigué pour ne pas recommencer. Non, en réalité, j'ai envie de rire. Mais je ne sais pas pourquoi. C'est certainement nerveux, mais dans le bon sens du terme. Je suis juste tellement soulagée d'être là devant lui, sans plus aucun secret, que j'ai envie de rire. Et le sourire qui perle à ses lèvres me fait prendre conscience que j'ai craqué et que je suis actuellement en train de rire.
Je m'accroche à ses biceps pour ne pas m'écrouler au sol, lorsque ses mains glissent sur mes hanches, attirant mon corps à lui. Et bien qu'il soit nu, la chaleur de son corps est apaisante. Pas excitante du tout, juste... apaisante. Je pose mon front sur son épaule gauche, laissant l'eau couler doucement sur mes cheveux et perler au bout de mon nez. Ses mains glissent dans mon dos et me serrent contre lui.
- I will make him pay. I promise you that he will pay.
Je sens les battements de son cœur sous la paume de ma main se faire plus forts, contrôlés par la colère. Je n'aime pas cette colère qui grandit en lui, mais elle est inévitable. Je l'ai ressenti moi aussi. Mais elle est partie maintenant.
Je n'ai pas besoin de répondre pour qu'il me serre un peu plus contre lui. Je n'ai pas envie de répondre, parce que je sais déjà qu'il fera tout ce qu'il peut pour me venger. J'en suis certaine. Je préfère juste me concentrer sur l'instant présent et sur la chaleur de son corps collé au mien. Et on reste là, je ne saurais dire combien de temps, en silence, l'un contre l'autre. En paix. Il n'y a plus d'images horribles, plus de souvenirs cauchemardesques. Il n'y a que ses mains à lui, que son amour se mélangeant à la chaleur de l'eau pour m'entourer d'un nuage protecteur. Et bon sang ce que je l'aime. Je ne suis même pas capable de dire à quel point, ni jusqu'où j'irais pour lui. Tout ce que je sais, c'est que je l'aime. Et je sais que lui aussi. C'est ça qui m'importe le plus. C'est qu'il m'aime lui aussi. Si on s'aime, qu'est-ce qui pourrait bien nous arrêter ? Rien n'arrête l'amour, pas vrai ? Sauf peut-être... la haine. Est-ce que cette haine pour Benjamin peut nous briser ? Est-ce qu'il ne va pas finalement gagner quoi qu'il arrive ? Peut-être qu'en fait, ne rien dire à retarder le moment où il gagnerait. Peut-être qu'en fait, maintenant que Tom sait... la fin arrive.  

Unexpected [FR/EN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant