Chapitre 37

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Je me souviens du téléphone qui s'explose contre le mur au-dessus de ma tête et qui tombe à côté de moi dans la baignoire. C'est à ce moment-là que j'ai su que j'étais dans la merde. J'ai entendu Benjamin marmonner quelque chose, et la seconde d'après il m'a agrippé par les bras pour m'extirper de la baignoire. J'ai senti mes jambes s'écrouler sous mon poids, et il m'a retenu de toutes ses forces pour ne pas que je m'effondre au sol. Je me suis accroché à ses épaules comme-ci ma vie en dépendait et le regard que j'ai croisé n'avait plus rien du regard qu'il avait la première fois qu'il m'a dit « Je t'aime ». Ses yeux étaient éclatés. Tellement rouges que j'avais du mal à discerner leurs verts naturels. Je me souviens que ses mains étaient accrochées à mon dos et me collait contre lui, à la limite de l'étouffement.
- Plus personne nous empêchera d'être ensemble maintenant.
J'entends encore cette putain de phrase résonner dans ma tête. J'étais tellement mal que j'arrivais à peine à sentir le sol sous mes pieds. J'avais l'impression de flotter.
- Je me sens pas bien...
J'ai cru que j'allais lui vomir dessus à ce moment précis.
- C'est normal.
L'une de ses mains a quitté mon dos pour venir écarter mes cheveux de mes yeux. Je me souviens que cette seconde de douceur m'avait replongé des mois en arrière, lorsqu'on était encore ensemble.
- Qu'est-ce que tu m'as donné ?
- Je ne t'ai rien donné du tout. T'as sûrement pris le verre de quelqu'un d'autre.
Je me suis sentis partir sur le côté et il m'a rattrapé par les hanches pour me pousser jusqu'à je ne sais quoi. Je me rappel seulement de cette sensation d'être soulevé du sol pour atterrir sur quelque chose de haut. Lorsque je me suis retrouvé assise, je me suis tout de suite sentie en danger. En une fraction de seconde j'ai compris que ce n'était pas moi qui me suis assise sur cette machine à laver. Je n'avais pas choisi ça, et l'angoisse m'a réanimé en un claquement de doigts. Au moment précis où il s'est immiscé entre mes cuisses et m'a agrippé par les hanches avec tellement de force que ça m'a pincé la peau.
- Aïe putain ! Tu me fais mal !
J'ai essayé de le repousser. J'ai essayé. Mais il avait plus de force que moi. J'ai senti ses lèvres frapper les miennes avec une pression que je ne supporte pas. Je n'ai jamais aimé ses baisers forcés, et encore moins à ce moment-là. Il a forcé l'entrée de ma bouche de sa langue, et je me suis appuyé sur son torse pour le repousser de toutes mes forces. Je suis même parvenu à descendre de cette foutue machine, mais à peine les pieds posés au sol, il m'a plaqué de tout son corps contre l'électroménager. Je me souviens encore de la douleur dans le bas de mon dos à cause des boutons.
Sa main s'est agrippée à l'arrière de ma tête, ses doigts se sont emmêlés à mes cheveux et je me suis retrouvé prise au piège. Prisonnière de ses lèvres. J'avais beau essayer de parler, tout ce qui sortait de ma bouche était étouffé par la sienne. J'ai même cru que j'allais manquer d'air. Que j'allais crever sous ses baisers que je n'ai pas choisis. Je me souviens surtout que j'avais chaud. Trop chaud. Tellement que j'en avais mal à la tête.
J'ai réussi à le repousser d'un coup de genou, mais à peine il s'est écarté de moi je me suis effondré au sol. La terre tournait tellement que je ne voyais plus rien. Mes mains posées sur le carrelage étaient floues, et j'étais certaine que j'allais vomir dans la minute. C'est là qu'il m'a attrapé par les épaules pour me forcer à me relever, mais j'ai réussi à le repousser dès le début cette fois-ci. Je me souviens m'être accroché au lavabo pour ne pas tomber à nouveau.
- Me touche pas putain ! Je t'interdis de poser les mains sur moi !
Je le voyais tellement flou que je n'arrivais à distinguer que sa barbe et ses cheveux mi-longs sur le dessus de son crâne.
- Pourquoi ? Il n'y a que ton acteur porno de merde qui peut poser les mains sur toi ?
- Va te faire foutre pauvre taré ! J'espère que tu crèveras de chagrin lorsque je vais me barrer avec lui dans un autre pays ! Loin de ta sale gueule de putain de connard dégénéré !
Je crois que c'est à ce moment-là que c'est vraiment parti en vrille. Il s'est rapproché de moi tellement vite que lorsque j'ai heurté le mur de la salle de bain, mes poumons se sont bloqués pendant de longues secondes. Je me souviens parfaitement de cette sensation de souffle coupé. Et de sa main qui m'empoigne la gorge pour me plaquer un peu plus contre le mur glacial. Son visage était tellement proche du mien qu'il est redevenu parfaitement net. Et ses yeux injectés de sang me hantent encore lorsque j'essaie de m'endormir.
- Parce que tu crois que je vais te laisser partir ? T'iras nulle part sans moi, Elena !
Ses doigts se sont resserrés autour de ma gorge, et je me souviens de chaque seconde où j'ai perdu le droit de respirer. Son visage était déformé par la colère. Ce visage que j'ai tant aimé me donnais l'impression que j'allais mourir au milieu de cette salle de bain. À cette fête où je n'aurais jamais dû mettre les pieds.
- Je ne laisserais personne t'emmener loin de moi ! Personne !
Son poing a frappé le miroir à côté de ma tête qui a volé en éclats. C'est grâce à ça qu'il a relâché la pression autour de ma gorge et que j'ai enfin pu reprendre mon souffle. Je me souviens m'être accroché au lavabo comme-ci ma vie en dépendait, et avoir vu la main ensanglantée de Benjamin recouverte de morceaux de verres. J'ai croisé son regard à peine dix secondes, et la porte de la salle de bain s'est ouverte. Deux types ont déboulés, et l'un d'eux s'est aussitôt occupé de moi. J'ai mis plusieurs secondes avant de comprendre de qui il s'agissait.
- Putain, Elena... est-ce que ça va ?
J'ai secoué la tête et il m'a agrippé les épaules pour m'aider à me relever. Je revois parfaitement son regard paniqué. Et j'entends encore la voix de Benjamin s'en prendre à lui.
- Arrache tes mains de là putain !
Je me suis accroché à Miguel au moment où Benji s'est écarté de l'autre type pour nous foncer dessus. Je n'ai pas compris tout de suite ce qu'il s'était passé. Je me suis juste écroulé au sol avec une douleur si forte au visage que j'ai cru pendant une seconde que mon œil était tombé. J'ai perçu des cris, j'ai vu Benjamin se débattre du coin de l'œil pendant que la moitié gauche de mon visage semblait paralysée, totalement endolori. C'est lorsque Miguel m'a aidé à me relever que j'ai compris. Benjamin m'a frappé en voulant l'atteindre lui. Je l'ai vu se faire embarquer par des mecs que je ne connaissais pas, et la dernière chose qui me revient c'est Miguel m'aidant à rejoindre ma voiture, et Charlie en train de secouer son visage paniqué devant moi. Le reste, je ne m'en souviens pas. Je me suis réveillé chez moi, dans mon lit, Miguel à mon chevet. Je ne sais même pas comment il a su où j'habitais. Je ne sais même pas s'il a profité de moi pendant que j'étais dans les vapes. Tout ce que je sais, c'est qu'il m'a sorti de cette salle de bain. C'est lui qui m'a sorti de là.

Unexpected [FR/EN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant