Depuis quand Elijaï possédait-il autant de force ? Il la sentait à travers ses muscles bandés, entretenus par ses heures d'entraînement. Son étreinte ferme devenait acier et, pourtant, elle reflétait une certaine douceur. Les lèvres de son amant dévoraient les siennes avec un désespoir mal dissimulé, presque une supplique. Valérian ne pouvait que suivre la danse, se laisser fondre sous les vagues de frissons.
— Sois à moi ce soir, souffla Elijaï à son oreille.
Déjà, sa bouche s'appropriait son cou. Valérian tenta de répondre, mais le son s'étrangla dans sa gorge. Ses paupières papillonnèrent et il hocha la tête.
— A-attends, articula-t-il.
L'apprenti Chasseur se figea et lui jeta un coup d'œil presque déçu. Valérian posa une main sur son torse et le repoussa avec fermeté, jusqu'à ce que l'arrière de ses jambes rencontre le matelas.
— Laisse-moi faire, murmura-t-il en détournant les yeux.
Ces trois mots venaient de déclencher un brasier dans ses iris sombres. Ce regard-là, il ne pouvait le soutenir, quand bien même il l'élevait au rang de désir immuable. Elijaï retira sa tunique et s'allongea dans un froissement de draps, un sourire lubrique aux lèvres.
Valérian posa un genou sur le matelas, tout près de sa hanche, le second entre ses jambes, et se pencha pour l'embrasser, les joues chaudes. Ses lèvres s'entrouvrirent et il y glissa sa langue avec une certaine maladresse, le cœur troublé. Ses paupières se fermèrent, comme pour se soustraire à la réalité et se réfugier derrière une protection, aussi mince soit-elle. Où devait-il poser ses mains ?
— Tu te poses tellement de questions, devina Elijaï dans un murmure empli de regrets. Laisse-toi aller.
C'était bien le problème. Toute sa vie, il avait appris à contrôler, tant son corps que son esprit, si bien qu'il n'écoutait plus son instinct, mais sa raison et sa logique. Ce soir, il devait retenir le cœur d'Elijaï en otage avant de le laisser partir. Il cédait à ses avances pour se faire pardonner, pour qu'il continue de l'aimer.
Se laisser aller.
Savait-il seulement ce qu'il voulait, au fond ? Des iris bleus turquoises se dessinèrent derrière l'ombre de ses paupières, sa peau se mit à le picoter de façon désagréable. Il frémit lorsqu'Elijaï dessina du bout de ses doigts des arabesques imaginaires sur son torse. Ces frissons qui parcouraient sa peau, il ne les contrôlait pas. Pas plus que le plaisir qu'ils provoquèrent. Ses réflexes le priaient d'attraper son poignet afin de le stopper, rejetaient toute forme d'emprise capable de capturer ses sens.
Se laisser aller.
Ouvrir la porte à ses envies déraisonnables.
Qu'est-ce qu'il souhaitait, à cet instant ? Céder à Elijaï pour le consoler et resserrer sa propre emprise sur lui ? Non. Il voulait prendre son meilleur ami. Rechercher un plaisir sans pareil, connaître à nouveau la satisfaction de l'entendre crier son prénom. Il désirait laisser éclater une soif déroutante, ne plus se retenir ou mesurer ses gestes.
Elijaï était à lui. Il devait le prouver à cette paire d'yeux bleus qui le narguait. Il exigeait ce corps qu'il chevauchait, prétendait à le faire sien devant Caspian, son regard planté droit dans le sien.
— Alors, petit prince...
Valérian ouvrit les paupières, ses prunelles d'or étincelantes de colère. Il fondit sur ses lèvres pour le faire taire et plaqua une main à la base de son cou, afin de l'empêcher de se redresser pour lui imposer son rythme.

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Le Requiem du loup
RomanceEntre Valérian et Elijaï, c'est une évidence, un don, une odyssée. Valérian a beau résister, le Chasseur détient depuis toujours des droits sur son âme, ce n'est qu'une question de temps avant qu'il ne s'abandonne entièrement. L'arrivée de Caspian d...