— C'est de ta faute ! s'écria Valérian en lançant un gobelet en bois en direction de son meilleur ami.
Ce dernier l'évita avec facilité dans un éclat de rire. Le futur Messager le foudroya du regard, mais son ire se heurta à son euphorie, glissant dessus sans même l'ébranler.
— C'est rien. Personne n'y fera attention, tenta Elijaï.
— Ben... Quand même, le contredit Caspian.
Valérian baissa à nouveau les yeux sur son poignard et la lame lui renvoya son reflet. Son œil droit arborait la Marque de son Chasseur, pas tout à fait estompée.
— C'est censé durer combien de temps ? s'enquit-il.
— Un ou deux jours, peut-être.
Valérian serra les dents. Bien entendu, Elijaï s'était bien gardé de lui révéler cette information. Son amant s'approcha de lui en ajustant sa tunique et se pencha pour déposer un baiser sur son front.
— Je vais chercher le petit-déjeuner.
— Mmh.
Valérian le suivit du regard jusqu'à ce qu'il quitte la pièce. Une main recouvrit alors la sienne et lui prit son arme des mains pour la repousser. Caspian embrassa son dos avec une lenteur calculée.
— J'aime le voir aussi heureux, confia-t-il au creux de son oreille.
L'apprenti Messager esquissa un sourire et laissa retomber sa tête contre son épaule.
— Ouais. Moi aussi, avoua-t-il.
Elijaï rayonnait depuis son réveil. Et son regard... Il brillait de fierté dès qu'il se posait sur lui. Ses prunelles foncées étaient plus qu'explicites, elles chantaient : à moi. C'était beau de le voir si confiant, si épanoui. Pourtant, il refusait de l'encourager, trop embarrassé par la situation. Il avait cédé, accepté sa Marque, mais il ne se sentait pas plus en sécurité ou puissant. Il n'était pas comme ces aristocrates qui payaient des fortunes pour s'acheter la protection d'un Chasseur puis arboraient fièrement le symbole de leur Marque. Non. Au contraire, Valérian voulait la cacher aux yeux du monde, la garder jalousement. Il ne venait pas de s'assurer une protection à vie, il avait littéralement donné son cœur à Elijaï, s'était laissé enchaîner. Pour toujours. Elijaï demeurerait toujours implanté en lui, dans ses chairs.
Personne n'avait besoin de le savoir, ce moment n'appartenait qu'à eux. Seul Caspian pouvait en être témoin. La chaleur lui monta aux joues, alors que son nouvel amant caressait son bras d'un index léger. Tout avait basculé en si peu de temps. Valérian ferma les paupières, alors que sa gorge se nouait sous une prière silencieuse.
Pourvu que ce ne soit pas juste un jeu.
— Tout va bien ? s'enquit Caspian, hésitant. Est-ce que... Je veux être sûr que tu es bien d'accord avec tout ça.
Tout ça. Qu'est-ce que c'était, exactement ? Un simple moment intime ? Une amitié qui se greffait à la leur ? Un amant ? Un amour ? Il n'y avait toujours eu qu'Elijaï. Lui seul avait été là, s'était intéressé à lui. Et pourtant, Caspian... C'était fort, irrésistible.
Le futur Chasseur saisit sa mâchoire pour lui faire redresser la tête, l'obligeant ainsi à le regarder. Une étincelle de peur brillait dans ses iris. Craignait-il ta réponse ? Une nouvelle fois, l'ombre du démon dansa dans ses yeux. Sa bouche s'entrouvrit plusieurs fois, comme s'il souhaitait lui confier quelque chose, mais qu'il se retenait. Son front se posa contre le sien, ses doigts tremblaient.
— Laisse-moi une chance, souffla-t-il. Je sais que ça peut paraître bizarre, que j'ai aucun droit de te demander ça, mais...
Sa respiration semblait difficile, il serra les mâchoires et déglutit, ferma les paupières quelques secondes. Quand il les rouvrit, ses iris présentaient une nuance sombre. Valérian ne cilla pas lorsque sa main descendit sur sa gorge. Un frisson agréable dévala son échine. Aurait-il dû avoir peur ? Rien ne l'effrayait chez Caspian, pas même cette part de ténèbres inconnues.

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Le Requiem du loup
RomantikaEntre Valérian et Elijaï, c'est une évidence, un don, une odyssée. Valérian a beau résister, le Chasseur détient depuis toujours des droits sur son âme, ce n'est qu'une question de temps avant qu'il ne s'abandonne entièrement. L'arrivée de Caspian d...