Chapitre 45

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Une explosion retentit, suivie d'une colonne de feu. Une bête sortit tout droit des flammes, avec sa fourrure incandescente. Ses yeux de glace brillèrent un instant, avant qu'elle ne disparaisse dans la nuit en grondant. Soudain, elle hurla son chant de désespoir.

Valérian lâcha un gémissement d'inconfort et rejeta la couverture épaisse qui le couvrait. Tout son corps semblait brûlant, il étouffait. Hagard, il tenta de se redresser, mais une main l'en empêcha.

— Le Loup, souffla-t-il.

— Reste tranquille. Comment tu te sens ?

Valérian referma les paupières, pas certain d'avoir saisi la question. Il déglutit avec difficulté, la gorge sèche, et tenta de repousser le chant qui résonnait dans son esprit. Il ne voulait plus l'entendre ! Pourquoi refusait-il de le laisser tranquille ? Il se recroquevilla sur le côté, effrayé par quelque chose dont il ne se souvenait pas.

Soudain, les souvenirs ressurgirent en flashes verdâtres.

— Les autres !

Le noble se débattit une nouvelle fois pour se redresser. La main qui le maintenait immobile s'envola et son souffle se coupa lorsqu'il se raccrocha à la distance qui les séparait désormais. Il redressa la tête et écarquilla les yeux. L'arrière de sa tête frotta contre la toile de la tente. Il se retrouvait piégé dans cet espace réduit, bien trop près d'Elijaï. Seuls vingt-six malheureux centimètres les séparaient.

Il expira profondément par la bouche, le cœur étrangement apaisé, moins douloureux. Il avait renoué son lien avec Elijaï. Il était bien là, doré et brillant, s'étendait entre eux de façon magnifique. C'était doux et familier, infiniment réconfortante. Même si cette distance semblait intolérable, il était si près.

Valérian détourna les yeux, tandis que les larmes montaient.

— Je crois qu'ils vont bien, l'informa Elijaï. Nous avons été séparé, la glace s'est brisée. Ils ont dû faire demi-tour pour trouver un endroit où traverser, ou alors ils ont regagné la forêt et vont devoir contourner le lac. La dernière fois que je les ai vus, ils avaient réussi à se débarrasser des Kranorh.

— Ils sont en train de contourner le lac, annonça Valérian en tirant sur ses liens pour les localiser.

Un soupir de soulagement lui échappa lorsqu'il repéra également Epona, à plusieurs kilomètres, probablement perdue, mais en vie.

— Comment tu te sens ? T'as été mordu, mais je t'ai administré un antidote. Le poison a dû disparaître.

— Ça va, souffla-t-il. Je... Merci.

Il murmura ces quelques mots du bout des lèvres. Elijaï l'avait porté, mis à l'abri et pris soin de lui pendant qu'il était inconscient. L'hypothermie aurait pu avoir raison de lui.

— C'est rien. Je n'ai fait que mon devoir.

Le Messager pinça les lèvres. Son devoir ? Il fut un temps que sa protection était l'obsession d'Elijaï, non une contrainte due à une quelconque mission. Son cœur se brisa une nouvelle fois. Comment était-ce encore possible ? Jusqu'où pouvait-il être blessé ? N'avait-il pas déjà atteint sa limite ? Visiblement, non.

— Et ça, tu peux m'expliquer ? demanda Elijaï d'un ton froid en désignant la blessure du Démon au-dessus de son cœur.

Vieille de quatre ans, elle s'étendait en sillons, tels des coups de griffes, noirs et brûlants.

— Ça ne te regarde pas !

Dans un réflexe de protection, il resserra contre lui la couverture en laine lorsqu'il se rendit compte qu'il était nu. Avait-il déjà été aussi vulnérable qu'à cet instant ? Il le foudroya du regard dans une tentative de garder le contrôle de la situation, mais ne récolta qu'un sourire ironique en retour.

Le Requiem du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant