Chapitre 64

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TW : suicide, combat, sang.

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- Votre Majesté, nous venons d'essuyer au moins trente pour cent de pertes, informa le premier lieutenant en se postant devant son souverain, essoufflé. Le major Dehane a pu scanner l'essence du Chasseur : avec une épaule déboîtée, deux doigts brisés et des organes internes touchés, il n'est pas en état de recommencer.

- Abattez-le, ordonna Lore.

Trop tard. Le camp de Risza, parfaitement organisé, évacuait déjà le blessé grâce à deux cavaliers et un Mage. Eckyo se retrouva rapidement hors de portée de leurs flèches.

- Qu'attendez-vous pour lancer l'assaut ? fulmina Lore.

Des étincelles rouges apparurent aux bouts des doigts du magicien, témoins de sa colère mal maîtrisée.

- Et ça, elle l'avait prévu, la Déesse ? interrogea Valérian. Lore ?

Ce dernier lui jeta un regard assassin.

- Non, avoua Solior, ses doigts grattant la surface de la muraille dans un geste compulsif.

- Parce qu'elle n'a rien à voir là-dedans ! s'énerva le Messager en saisissant le souverain par les épaules. Ouvrez les yeux, vous vous faites manipuler.

Un Garde aurait dû l'arrêter. Pourtant, aucun de ses hommes n'esquissa le moindre geste pour venir en aide à son roi. Valérian frissonna d'effroi : Solior avait été abandonné.

- C'est lui, accusa-t-il en désignant Lore. Il vous a menti, il a déjà pris votre place. C'est vos ordres que vos Hommes devraient attendre, pas les siens.

Le roi fronça les sourcils et jeta un coup d'œil en direction du Mage.

- C'est le trône que tu veux ?

- Il me revient, je suis l'aîné.

- Tu n'es pas prince.

- Seulement parce que je suis né bâtard, d'une femme que notre père n'a pas choisie pour reine.

Valérian retint son souffle, conscient d'apprendre là un secret supportant le poids du danger. C'était un rebond inédit pour ce royaume déjà fragile. Qui était au courant ? Les Hommes les plus proches de Lore, probablement. Ce dernier avait-il représenté un espoir à leurs yeux ? L'espoir qu'un roi digne monte sur le trône et sauve leur royaume en déclin ? Même s'il était né bâtard, du sang royal coulait dans ses veines. Il avait trouvé le soutien nécessaire à force de promesses.

Un ricanement s'échappa des lèvres de Solior, qui se frappa le front du plat de la main.

- Si c'est ça que tu veux, insista le souverain en désignant son royaume d'un mouvement, je te le donne. Je n'en ai jamais voulu. Rends-moi simplement ma vie d'avant. Je veux que tu me rendes ce qui m'a été pris.

- C'est impossible. Pauvre imbécile, tous les Mages te l'ont dit : ta malédiction ne peut pas être brisée. Personne ne peut t'aider. Nous annoncerons au peuple que tu as péri pendant la guerre.

Un assassinat. Ce n'était rien de moins qu'un fratricide planifié. Les deux frères se toisaient, l'un avec animosité, l'autre avec la neutralité qui le caractérisait. Solior ne semblait pas savoir comme réagir. Privé de tout sentiment, comment pouvait-il savoir quelle attitude adopter ? Pas de haine. Pas de colère. Pas de trahison. Rien ne l'animait assez pour qu'il dégaine l'épée qui pendait le long de sa jambe et tente de défendre son honneur. Il attendait, tout simplement, las et fatigué devant sa mort annoncée.

- Je serai celui qui ramènera les dragons sur mes terres et personne ne remettra en cause ma légitimité pour monter sur le trône. Risza nous en a trop longtemps privé. En les retenant, elle nous prive de leur magie.

Le Requiem du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant