Chapitre 34

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La bête. Elle était là. Elle rôdait dans les bois.

Cours. Cours, Valérian, si tu veux avoir une chance.

Mais il faisait noir, si noir dans cet endroit inconnu. Ce Loup lui était également étranger, alors comment savoir où il se trouvait exactement ? Il n'avait aucun lien, avançait à l'aveuglette avec une servitude glaçante : la créature savait de façon précise où il se tenait. Elle le regardait. Et elle hurla son chant maudit, annonciateur d'une tragédie. Un sinistre requiem.

Valérian s'éveilla en sursaut, le cœur agité. Durant de longues secondes son corps se retrouva paralysé, à la merci de frissons. L'air froid piquait sa peau moite de sueur.

— Valérian... souffla Elijaï à ses côtés.

Il prit alors conscience que ce n'était pas seulement sa respiration saccadée qui résonnait dans la chambre, celle de son amant y faisait écho. La plainte du Loup s'éloigna lentement.

— Il se passe quelque chose ! constata Elijaï.

Le Chasseur avait déjà bondi hors du lit pour s'habiller plus chaudement et ajuster son fourreau à sa taille. Les yeux écarquillés et les mains tremblantes, Valérian écoutait le son de la cloche qui s'envolait au loin. Ce n'était pas celle de l'école, mais celle du village.

Le noble se leva et, tel un automate, revêtit ses habits de la veille. Il attrapa son poignard et se laissa entraîner par Elijaï à travers le château. D'autres élèves avaient également été tirés de leur sommeil et se pressaient à l'extérieur. Au loin, une lueur orangée brillait dans la nuit.

— C'est un incendie ! devina Emyr en apparaissant à leurs côtés. Il y a peut-être des démons. Si c'est le cas, nous devons protéger les Mages pour qu'ils l'éteignent.

— Allons-y ! valida Elijaï.

Valérian suivit le mouvement, traîné par la main de son amant. Il n'avait pas le temps de réfléchir, ni de comprendre ce qu'il disait. Ses jambes avançaient, suivaient le rythme imposé. Pendant ce temps, il continuait de chercher. Il cherchait, cherchait, cherchait.

Le noble fronça les sourcils, recommença. Pourquoi ça ne fonctionnait pas ? La frustration lui fit lâcher un grognement. Ce n'était pourtant pas compliqué ! Peut-être était-il mal éveillé ? Encore plongé dans un rêve qui virait au cauchemar ? Non, il devait forcément être là, quelque part. Valérian devait simplement mieux chercher. Il s'y employa de toutes ses forces, mais rien n'y fit, le lien restait coupé, sans éclat.

Valérian trébucha contre quelque chose sans même s'en rendre compte. Il ne songea pas à faire l'effort de se retenir. Ses genoux et ses mains heurtèrent le sol, mais il ne ressentit aucune douleur. Il n'entendait plus les cris, ni la course des élèves et des villageois. Pas même Elijaï qui semblait hurler, le visage soucieux. Il ne comprenait pas les mots que formaient ses lèvres, sentait tout juste ses mains sur ses joues. Le Messager posa les siennes sur ses poignets. Pourquoi n'arrivait-il plus à respirer ? Quelque chose oppressait sa poitrine.

— Je ne le trouve pas, haleta Valérian. Il n'est pas là !

Elijaï attrapa ses épaules, le secoua légèrement, mais il ne l'entendait pas, ne comprenait pas.

— Je ne le trouve pas ! répéta-t-il dans un hurlement de colère. Où est-il ?

Pourquoi Elijaï le forçait-il à se mettre debout et à avancer ? À quoi bon ? Apathique, il s'appuya contre son amant et fixa le spectacle désolant des flammes qui s'élevaient. Il leva la tête et fixa le ciel. Il y voyait les étoiles, la fumée. De la cendre et des braises. Ça sentait le bois brûlé, le métal fondu et la peur.

Le Requiem du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant