Chapitre 58

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Valérian s'éveilla en sursaut, désorienté. Il ne s'était pas senti glisser vers le sommeil, se souvenait vaguement du ciel rosé par le lever du soleil quelques heures plus tôt. Des cris déchirants lui glacèrent le sang, alors qu'il s'approchait de la fenêtre, le cœur désordonné. Savoir qu'Elijaï et Caspian se trouvaient toujours loin ne le rassura qu'une seconde.

Au-dessous, dans les jardins, Syn plaquait au sol un louveteau blanc, qui tentait de se débattre à grand renfort de grondements et gémissements. La douleur étreignit sa gorge et ton torse lorsqu'il remarqua la tache noire sur l'oreille droite de la jeune louve.

— Non... souffla-t-il en se détournant.

Valérian traversa la chambre sans réellement s'en rendre compte. Il ouvrit la porte à la volée et ignora l'étonnement des deux Gardes qui se redressèrent aussitôt. Un lien vieux de quatre ans s'étira, lui donnant l'énergie nécessaire pour parcourir les couloirs et dévaler les escaliers jusqu'aux jardins, les deux hommes sur les talons.

Syn avait libéré le louveteau de son poids, mais le menaçait de toute sa hauteur, les yeux rougeoyants. Le Messager se glissa entre deux Loups qui observaient la scène en retrait et se posta devant Nala.

— Ne la touche pas ! ordonna-t-il.

Son souffle irrégulier hachait ses mots. Dans sa tenue de bal de la veille et avec ses poings pour seules armes de défense, il avait conscience du ridicule de sa position. Pourtant, sa colère brûlait tout. Jamais il ne s'était senti à ce point prêt à exploser. Comme si son esprit saturait et menaçait de basculer dans la folie. Plus rien ne semblait avoir de sens. Il soutint le regard de l'Alpha sans flancher. Pas même lorsqu'il gronda tout près de son visage, les crocs à quelques centimètres de sa peau.

Syn avait tenté de rattraper son fils, en vain. Valérian l'avait suivi une partie de la nuit jusqu'à ce qu'il renonce et rebrousse chemin. Passait-il ses nerfs sur sa meute ? Depuis quand Nala était-elle ici ? Accaparé par ses propres problèmes, il en avait oublié sa mission de Messager.

— Assez. Je ne veux plus rien entendre.

Valérian jeta un coup d'œil à Solior, lasse et plus pâle que jamais, encadré de ses deux Gardes. Le souverain poursuivit son chemin en direction des serres en massant ses tempes.

Alors c'était tout ? Il n'y aurait aucune répercussion à propos de la veille ? Bien loin d'en éprouver du soulagement, il eut la sensation qu'un étau se refermait sur lui. Quelque chose frapperait bientôt.

Un louveteau s'approcha de Syn en remuant faiblement la queue, mais l'Alpha l'ignora et gagna le château, non sans lancer un dernier regard assassin à son ancien élève. Tendu, Valérian l'observa jusqu'à ce qu'il disparaisse.

— Je suis désolé, s'excusa Valérian.

Le noble s'agenouilla devant la louve tremblante, qui le renifla. Le bout de sa queue remua lorsqu'elle le reconnut et elle posa sa tête contre son torse. Il caressa patiemment son cou, tandis que ses gémissements lui brisaient le cœur. Aïden devait être fou d'inquiétude.

— Ça va aller. Ils vont venir nous chercher, tu verras.

Valérian y croyait vraiment. Il y croyait dur comme fer, puisque c'était la seule certitude à laquelle il pouvait s'accrocher. Peu importait le temps que cela leur prendrait, ils viendraient.

Autour de lui, les louveteaux l'observaient avec crainte ou curiosité. Les plus téméraires s'approchèrent assez près pour humer son odeur, d'autres se contentèrent de se coucher sans le lâcher des yeux, comme s'il pouvait à tout moment leur faire du mal. Certains lui semblaient maigres, arboraient une fourrure terne, peu fournie au vu des températures froides.

Le Requiem du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant