~Forty-three

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Un fil.

Un long fil, fin, blanc comme la neige, qui se teintait de rouge dès que quelque chose venait assombrir sa pâleur jusqu'à ce que, un jour, épuisé d'être tendu et tordu, épuisé d'être rougi et blanchi, épuisé d'être mouillé et sali, il ne finisse par se casser, et que d'un bout à l'autre il se perde dans l'immensité des vies déjà prises.

Celui de Sirius venait de l'être, cassé.

Et celui d'Athalia faisait son possible pour ne pas l'être également.

La noirceur reflétant les tréfonds de son coeur n'avait d'égale que la pâleur de son visage.

-"Ça va aller."

Lily ne savait pas quoi faire, mal assise sur un balai décidément trop dur pour sa pauvre peau qui souffrait. Elle tapota négligemment son dos, cherchant de l'aide dans le vide du ciel dans lequel elles volaient, la rouquine ayant attachée les deux balais pour ne pas que celui d'Athalia ne chute si elle décidait de tomber dans les vapes.

Son regard vide et fixe ne laissait pas de doute quant à l'endroit où se trouvait son esprit - coincé dans son enveloppe et ses pensées invasives.

Elle ne savait pas quand elles allaient arriver, mais ne pouvait penser qu'à ses professeurs et ses amis qui s'inquiétaient certainement. De James qui courrait l'enlacer, sentimental qu'il était, pendant qu'elle tenterait de le dégager pour pouvoir respirer.

Puis de son visage lorsqu'il demanderait où se trouvait Sirius.

Et de ses larmes qui finiraient par monter et rouler lorsqu'aucune des deux jeunes femmes ne répondraient.

Était-ce juste ? Était-ce normal ?

Peut-être, puisque Athalia avait déjà remonté le temps une première fois, pouvait-elle le faire une deuxième.

Oui, peut-être. L'espoir résidait, encore, dans le coeur des mortels qui ne pouvaient aspirer à plus.

-"On arrive, je crois."

Au loin, elles pouvaient apercevoir le château qui se dessinait sur l'horizon, vague tableau subjectif de leur salut mérité.

Athalia ne savait que faire, que dire, ses pensées semblaient tourbillonner dans son crâne et tenter de s'en extirper par les oreilles et les narines, gardant la bouche fermée pour ne pas les voir se glisser sur son palais.

Que pouvait-elle faire, pour empêcher son coeur de sombrer ? Quelque chose semblait s'être brisé.

Ou peut-être, simplement, s'était-elle brisée.

Elle fixait un point, vaguement, sans vraiment s'y attacher, comme une ancre qui n'arrivait pas à s'ancrer, perdue entre le néant de son coeur ou l'immensité du vide sous ses pieds ballants.

C'était étrange, ce sentiment qu'elle avait, alors même qu'elle ne le connaissait guère. Avait-elle ressenti cette absence, lorsque son hibou était mort, durant sa deuxième année à son époque ? Les souvenirs affluaient, sans queue ni tête, s'assemblant et se détachant comme les morceaux de son âme qui tentaient vainement de ressembler à quelque chose d'à peu près stable.

-"Athalia."

La voix crissante de Lily perçait ses pauvres oreilles qui peinaient à supporter le bruit de ses démons intérieurs.

Elle tourna la tête, sentant sa main serrer la sienne.

-"On y est." Murmura-t-elle avec des yeux de chiens battus et Athalia ne dit rien, fixant sa plaie béante sur la tête.

Elle aussi, elle sentait quelque chose de béant, mais c'était plus profond dans son corps, l'empêchant de respirer.

Leurs balais commencèrent leur descente, guidés par Lily dont la vision brouillée par ses blessures non soignées l'empêchait de bien se positionner.

Ce qu'elle arrivait, en revanche, à voir était les petits points dans la cour extérieure, par dizaines.

Était-ce eux ? Oui, c'était certainement eux.

James, qui les attendaient en se rongeant les ongles.
Peter, qui avait volé des paquets de bonbons et se rassurait comme il pouvait.
Remus, qui avec sa vision presque surnaturelle, avait déjà remarqué qu'une personne manquait à l'appel.
Marlène qui rassurait sûrement une Mary en larmes.
Dorcas, assise sur un banc à admirer ses ongles polis.
Regulus qui se serait caché derrière une poutre, faussement indifférent mais dit forcé par Dumbledore.
Et enfin Dumbledore avec McGonagall qui crierait à qui veut l'entendre qu'elle leur retirerait des centaines de points mais qui ne cessait d'avoir le hoquet tant son coeur battait.

Oui, ils étaient sans doute tous là, comme ça, à les attendre impatiemment, souhaitant à tout prix les voir en bonne santé.

Une journée et demi de manqué, Lily allait devoir tout rattraper durant la nuit.

Si nuit il y avait. Peut-être allaient-ils faire une veillée funèbre.

Peut-être allaient-ils la blâmer, parce qu'il était venu la sauver.

Oui, ils avaient tous les droits. Peut-être même que ce collant de James arrêterait enfin de la harceler pour obtenir un rendez-vous. C'était pour le mieux, elle le rejetait à chaque fois, cela signifiait qu'elle ne l'aimait pas.
N'est-ce pas ?
Alors quel était ce poids, sur le coeur, lorsqu'elle pensait à cette tournure d'événements ? James la blâmant. James la pointant du doigt. Ce stupide James Potter qui la toiserait, l'insultant de sang-de-bourbe comme le faisait Severus.

-"Tu pleures."

Elle releva les yeux vers Athalia qui la fixait avec nonchalance, ses grands yeux de la couleur des nuages posés dans les siens.

-"J'ai mal au dos." Inventa la jeune femme en se raclant la gorge, s'essuyant les yeux d'un revers de la manche.

Athalia ne dit rien, ses yeux se baissant vers le tee-shirt ensanglanté de la jeune femme qui, à contrario de ce qu'elle avait dit, ne sentait pas sa blessure.

-"Posons-nous." Athalia redressa son dos et posa ses deux mains sur le manche du balais, le serrant fermement avant de s'abaisser légèrement vers l'avant, reprenant les reines.

C'était égoïste de sa part de se laisser aller pour quelqu'un qu'elle ne connaissait, à dire vrai, que depuis peu. Lily l'avait connu des années de plus et elle l'avait forcé à diriger leur voyage pendant qu'elle se morfondait. C'était indigne de ce qu'elle était : une Malfoy.

Non, elle ne devait pas laisser ses émotions la submerger.
Ses larmes devaient rester où elles étaient, parce qu'elle n'avait pas le droit de pleurer celui qu'elle avait tué.

Mais Dieu que son coeur brûlait lorsqu'elle ne faisait qu'effleurer son nom avec la paume de son esprit.

❛𝑃𝑜𝑢𝑟 𝑡𝑜𝑖, 𝑖𝑙 𝑦 𝑎 𝑣𝑖𝑛𝑔𝑡 𝑎𝑛𝑠❜ [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant