~Thirty-five

986 79 68
                                    

-"Bien dormi ?"

Athalia leva les yeux et sourit à Espérance qui toquait à sa porte.

Elle se leva pour aller lui ouvrir, en chemise de nuit, et Espérance lui posa son petit déjeuner sur la table basse comme d'habitude.

-"On sort chercher Remus. On revient d'ici quelques dizaines de minutes."

Athalia hocha la tête et Espérance partit, refermant la porte derrière.

Il ne lui restait que quelques semaines. Deux, lui semblait-il, avant la rentrée.

Le mois et demi passé chez les Lupin lui avait plu, ils avaient été gentils et doux.

Mais c'était différent. Différent de la sensation qu'elle avait lorsqu'on parlait de grandes vacances. De la sensation qu'elle avait lorsqu'elle tentait de se souvenir de ses vacances chez sa famille.

Aurait-elle du leur dire, la veille, à ses parents, qui elle était réellement ? L'auraient-ils cru ? L'auraient-ils acceptés ?

Avec un soupir elle s'habilla, resserrant la robe rouge sang d'Esperance qui avait une taille moins fine que la sienne.

Il fallait dire, et Athalia ne s'en rendait peut-être pas compte mais tout les autres si, qu'elle avait perdu énormément de poids. Qui aurait cru que voyager dans le temps serait difficile ? Ses délires durant le début d'année, ses cauchemars qui avaient recommencé, et en général sa santé physique avait fait que tout s'était dégradé. Il fallait croire que son métabolisme ne s'était pas habitué à ce changement de temps.

Elle n'avait jamais été au-dessus de la norme de poids pour son âge, ses parents s'en étaient assurés. Elle avait eu quelques rondeurs par ci par là, critiquée par son père, complimentée par sa mère, parce qu'ils avaient toujours leurs mots à dire.

Mais alors que la robe dans laquelle elle était arrivée, il y a de cela si longtemps, avait toujours été exactement à sa taille, elle flottait désormais dedans, et son déni continuait néanmoins de grandir, accusant les robes certainement trop grandes d'Espérance.

Elle attrapa son petit déjeuner et l'engloutit en quelques bouchées, fit son lit et sortit prendre l'air dans le grand jardin.

Les fleurs fanaient de son côté, laissant d'autres éclore. Cette éphémérité leur donnait cette beauté fugace, qui s'évanouissait soudain un jour de printemps tandis qu'elle rendait leur dernier souffle de vie.

-"Mademoiselle !"

Athalia se tourna vers le couple qui s'approchait, un panier en main. Elle s'avança, méfiante, regrettant que tous soient partis.

-"Savez-vous où se trouve les Lupin ? Ils ne semblent pas chez eux."

La femme la regarda d'un air suspicieux, ne l'ayant jamais vu auparavant.

-"Je suis amie avec Remus, je suis ici pour les vacances." Elle leur sourit. "Ils sont partis le chercher, il dort chez un ami. Je pourrai leur dire que vous êtes passés."

-"Merci beaucoup jeune fille." La dame lui donna un panier rempli d'oeufs. "Frais de ce matin !"

L'homme eut un sourire.

-"Nous sommes leurs voisins, on repassera une autre fois."

Leurs voisins. Elle se figea soudain et eut un sourire compatissant.

-"Je vois, j'ai entendu parler de vous. Je suis sincèrement navrée pour votre fils."

La femme regarda son époux et éclata de rire.

-"S'il souhaite épouser une poissonnière, ce n'est pas nos affaires de toutes façons. Mais ravie de savoir que vous êtes tout autant déçus que nous le sommes."

Athalia fronça les sourcils.

-"Veuillez me pardonner, je croyais que vous étiez les voisins dont le fils se meurt."

Le tact. Elle soupira, se massant l'arête du nez.

-"Voisins ?" L'homme fronça les sourcils. "Nous sommes les seuls voisins des Lupin à dix kilomètres à la ronde jusqu'au village."

Athalia ne comprit pas.

-"Ce n'est pas chez vous que Remus est allé dormir, cette nuit ?" Demanda-t-elle et la femme hocha négativement la tête.

-"Je le saurais, si le petit Lupin dormait chez nous. Je ne l'ai vu que de rares fois lorsqu'il était enfant."

Athalia tentait de déchiffrer en vain les pièces du tableau qui manquaient.

Et soudain la lanterne s'éclaira, dans son esprit.

Elle regarda la forêt, silencieuse soudain, les branches n'osant craquer de peur de tout lui révéler mais c'était trop tard. Elle savait déjà.

-"Ravie de vous avoir rencontré en tout cas, je suis Athalia." Elle leur serra la main et les invita poliment à partir, ce qu'ils firent ravis d'avoir fait connaissance avec une aussi charmante jeune femme.

Elle resta seule sur la propriété, la respiration saccadée.

Elle avait finalement trouvé la dernière pièce du tableau.

                            *****

-"Ça va ?"

Remus leva ses yeux de son livre et hocha nonchalamment la tête.

-"Je lis." Expliqua le garçon comme si ce n'était pas évident.

Athalia sourit et fit semblant de se concentrer sur son dessin.

Colorier cette partie en noir. L'autre en rouge. Celle-là en gris.

Elle leva distraitement les yeux vers le garçon dont les yeux glissaient sur le livre jauni.

-"J'ai fini." Elle enleva les crayons de son papier et souffla dessus. "T'en penses quoi ?"

Elle le lui donna et il posa son livre pour le regarder.

-"Alors ?" Insista la jeune femme sans voir son expression, cachée par le dessin qu'il avait placé devant son visage.

Ledit garçon ne répondit pas, fixant le dessin avec les yeux presque aussi gros que la tête du loup qu'elle venait de faire.

-"C'est un loup-garou." Dit-elle innocemment. "C'est joli ?"

Il reposa lentement le dessin sur la table et la fixa, sans rien dire, la bouche entrouverte.

-"Très beau." Murmura-t-il en n'osant bouger. "Mais tu devrais dessiner des choses qui existent."

Elle eut un sourire satisfait et attrapa son dessin avant de le signer.

-"Mais ça existe, Remus." Elle fit exprès de ne pas croiser son regard, cherchant sur les murs où le coller. "J'en connais un."

Il eut un soupir et se leva, attrapant son dessin avant de le déchirer devant ses yeux ternes.

-"J'espère que ce loup-garou que tu sembles connaître, te fais confiance. Pour ne pas révéler son secret, tu sais. Ca doit être dur, pour lui."

-"Je n'en doute pas. J'aurai tout de même espérer qu'il me l'avoue plus tôt, tu sais, puisqu'il connaissait déjà mon secret."

Remus ne dit rien durant un instant.

-"Certains ne veulent peut-être pas révéler ce qu'eux-mêmes n'osent s'avouer."

Il attrapa son livre, le referma violemment, et sortit du salon.


❛𝑃𝑜𝑢𝑟 𝑡𝑜𝑖, 𝑖𝑙 𝑦 𝑎 𝑣𝑖𝑛𝑔𝑡 𝑎𝑛𝑠❜ [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant