Chapitre 16 : Explications - Partie 1

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Mille et une questions trottaient dans la tête d'Evy alors qu'elle longeait les couloirs. L'Avocat avait habilement joué contre elle. Lors des débats, elle avait réussi à lui tenir tête mais elle avait plongé tête la première dans le piège qu'il lui avait tendu. Évoquer l'espionnage dont les siens étaient victimes ne pouvait que la faire réagir. La jeune femme était bien consciente de son erreur mais sa colère et son inquiétude avaient pris le dessus sur tout le reste. Elle restait une simple humaine après tout.

Gabriel avançait d'un pas vif. Il avait refusé de lui donner la moindre explication au sein de la salle du tribunal malgré l'impatience de la jeune femme. Comprenant qu'il ne céderait pas à ses suppliques, Evy avait dû se ranger à ses raisons. De toute façon, elle n'avait pas vraiment le choix si elle voulait des explications.

Il ne leur fallut que quelques minutes pour rejoindre la résidence de l'androïde. Les escaliers furent rapidement dévalés. L'impact des pas fit raisonner le métal des marches. Gabriel avançait rapidement mais l'humaine ne se laissait pas distancer.

Depuis leur départ, aucun mot n'avait franchi les lèvres de l'androïde qui lui tournait le dos. Il ne lui adressa aucun regard, ni le moindre coup d'œil. Une attitude inhabituelle pour lui qui avait toujours été attentionné et prévenant. C'était forcément lié à la bombe lâchée par leur adversaire.

« Alors, c'est quoi cette histoire de surveillance ? »

La militaire venait de faire exploser la bombe en plein dans le salon. Figée, bras croisés sur la poitrine et regard sombre, elle refusait de continuer de le suivre sans avoir de réponses.

L'androïde s'arrêta à son tour mais ne fit pas mine de vouloir se retourner. Il ne disait rien non plus. Une attitude qui ne lui ressemblait pas et qui commençait à sérieusement exaspérer l'humaine. Evy détestait ce genre de comportement. De nature franche, elle préférait la vérité, même douloureuse, aux non-dits.

« Vous m'avez dit que le camp était sous surveillance mais votre alter ego connaissait des choses qu'il ne devrait pas. Il a quasiment rapporté mot pour mot ce que j'avais dit à Josh et il n'y avait que nous deux dans la pièce. Comment pouvait-il avoir cette info ? »

Comment les machines pouvaient-elles avoir connaissance de cette conversation ? Jusqu'où exactement allait leur technologie pour avoir ce type d'information ? Evy n'en avait aucune idée mais elle avait besoin de savoir à quel point les siens étaient à la ramasse face aux monstres qu'ils devaient affronter.

« Je ne vous ai pas menti. »

La voix calme de l'androïde tira la jeune femme de ses réflexions. Il continuait de lui tourner le dos, refusant de lui faire face. S'il lui avait menti, il pouvait au moins assumer et la regarder en face !

« Ce n'est pas l'impression que j'ai ! Comment... Oh et arrêtez de me tourner le dos, c'est énervant ! »

Tout en parlant, elle alla se poster devant lui, les bras toujours croisés en signe de mécontentement. Les traits de son visage s'étaient durcis sous l'effet de la colère. Ceux de Gabriel le montraient soucieux.

« Expliquez-vous ! »

L'attitude ferme de la militaire lui montrait qu'elle n'allait pas renoncer à avoir des réponses.

« Je vous l'ai dit, je ne vous ai pas menti. Le camp est sous surveillance mais il s'agit d'une surveillance plus étroite que ce que vous imaginiez.

– C'est-à-dire...

– Quand j'ai parlé de surveillance, vous avez certainement imaginé quelque chose de similaire à ce que vous faites lors de vos gardes. Une observation à distance.

– Et... Ce n'est pas ce que vous faites ?

– Non, pas exactement - Gabriel se frotta la tête, donnant l'impression à la jeune femme qu'il cherchait à lui livrer une explication crédible - Notre technologie est plus évoluée que ce que vous pensez. Pour faire simple, certaines machines ont été créées afin de ressembler à des insectes comme des cafards ou des mouches. Des bestioles auxquelles vous ne feriez pas attention mais qui nous permettaient de vous surveiller de près. Elles nous transmettent toutes les informations possibles. On peut ainsi suivre chaque humain de sa naissance à sa mort. On peut ainsi suivre votre évolution dans tous les domaines : démographie, technologie, médecine, militaire etc...

– Putain de merde ! »

Les jambes de la combattante vacillèrent avant de céder. Le choc était rude. Lorsqu'elle était arrivée chez les machines, elle avait bien compris que les humains n'avaient jamais été de taille pour affronter leurs adversaires. Mais là, ça dépassait l'entendement. Elle n'aurait jamais imaginé une technologie si avancée qu'on ne puisse distinguer un vrai animal d'un faux.

En observant l'androïde, une idée lui traversa l'esprit, la faisant péniblement déglutir. Avait-elle côtoyé, sans le savoir, une machine à l'apparence humaine ? Après tout, si Gabriel ne lui avait pas dit ce qu'il était, elle ne l'aurait pas deviné. Au départ, elle l'avait pris pour un simple humain. Alors, il n'était pas inconcevable que d'autres comme lui aient pu infiltrer le camp.

« Et... Et pourquoi pas un... un androïde... comme vous ! - elle le désigna d'un doigt accusateur en se remettant sur ses pieds - Est-ce que... est-ce qu'il y a des... des comme vous dans le camp ?

– Non. Mère n'a jamais voulu prendre le risque d'envoyer des cyborgs au sein du camp. C'était trop hasardeux. Une simple blessure dévoilerait rapidement la supercherie. Sans compter qu'il aurait fallu trouver une explication sur la venue d'un étranger chez vous. Cela aurait suscité la suspicion des vôtres. Et puis, la surveillance aurait été moins pointue. »

En y réfléchissant, c'était à la fois inconcevable et parfaitement logique. Pour autant, Evy avait du mal à faire face à cette nouvelle révélation. Cette fois, ce fut elle qui lui tourna le dos. Son cerveau avait besoin d'un break, le temps d'assimiler toutes les nouvelles données qui venaient de lui être apportées. Elle n'était pas une machine après tout.

Elle rejoignit le canapé et s'assit avec une certaine lenteur comme si elle se déplaçait au ralenti. Max vint rapidement se blottir contre ses jambes comme si, encore une fois, il cherchait à lui remonter le moral. Ce chien avait une sensibilité hors norme. A moins que tous les chiens soient tous capables d'une profonde empathie. Mécaniquement, la main féminine vint gratifier l'animal de quelques caresses. Une façon de le rassurer mais surtout un moyen de se rassurer elle-même et de garder un contact avec la réalité.

Extinction [terminé - en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant