De notre sang

30 / La pire des trahisons

Camille arracha brutalement son téléphone à Lara et s'écarta suffisamment pour que la jeune femme, bloquée spontanément par Lucie, ne puisse l'atteindre.

— Rends-moi ça ! Rends-moi mon téléphone ! Qu'est-ce qui te prend ?

Le visage de Lara avait déjà changé, mais Camille ne le remarqua même pas, trop consternée par ce qu'elle voyait. Les messages d'Antoine s'affichaient, mais aussi ceux d'autres personnes qu'elle ne connaissait que de nom, mais qui gravitaient autour d'elle. Elle prit alors la mesure de l'ampleur du filet dans lequel elle était prise. Mais pourquoi un tel acharnement ? Pourquoi une telle volonté de la recruter ? Était-ce la procédure habituelle des sectes ? Camille avait toujours cru qu'elles s'en prenaient essentiellement à des personnes psychologiquement faibles, isolée ? Elle n'avait pas vraiment le profil. C'était vraiment de plus en plus étrange.

— Laisse Lara tranquille ! dit alors la voix en colère d'Antoine, près du trio de filles.

Il s'adressait à Lucie qui desserra sa prise sans libérer la blonde, en jetant un coup d'œil à Camille qui fixait le nouveau venu avec fureur.

— Toi ! Toi ! Espèce d'enfoiré ! Tu crois que tu peux diriger ma vie ? Tu crois que tu peux me forcer à faire ce que je ne veux pas ?! Personne ne dirige ma vie ! Tu entends ! Personne ! finit Camille en fracassant le téléphone de Lara au sol avec violence.

— Mon téléphone ! Putain ! Mais quelle connasse ! hurla alors Lara, révélant son vrai visage, en se débattant pour se libérer de Lucie.

Camille la fixa un bref instant avant de reporter son attention sur Antoine qui n'avait pas bougé.

— Pourquoi maintenant ? Pourquoi a-t-elle joué la comédie pendant sept mois ? Pourquoi moi ? Pourquoi tout court ! Bordel !

— Je te répondrai quand ta pote aura lâché Lara et qu'elle se sera barrée, dit alors Antoine sèchement.

— Elle va lâcher Lara. Mais elle reste, répliqua Camille. Tes petits camarades ne sont jamais très loin et ils sont armés. Je n'ai pas confiance.

Lucie laissa Lara et se positionna près de Camille, effectuant une surveillance rapide des environs. Elle n'avait pas choisi cet endroit par hasard, pensant qu'un coin tranquille serait l'idéal pour tester Camille. Elle n'avait pas anticipé que les ennemis seraient aussi nombreux, et que son « coin tranquille » se transformerait en piège. Sola et Dresden n'avaient pas bien évalué le danger qui rodait autour de l'étudiant. Elle commença à calculer la meilleure stratégie pour s'en sortir indemne et espéra que Sola ne soit pas loin.

— Si elle reste, tu n'en sauras pas plus, lança froidement Antoine en aidant Lara à s'écarter de son ancienne amie.

— Et toi, Lara ? Tu n'as rien à dire ? Quel calvaire tu as dû vivre pendant ces sept mois ! Obligée d'être amie avec moi... et pour quoi ? Finalement, votre plan n'a pas fonctionné !

Lara releva alors son visage habituellement angélique, qui, sous le coup des sentiments violents qui l'animaient maintenant, avait pris une teinte rubiconde fort peu seyante.

— Tu as raison ! Ça a été un calvaire ! Tu te crois tellement supérieur à nous, hein ? Tu penses tellement que tu es la plus forte ! Ta pote, là ? Elle sait ce que tu as fait dans ta cité ? Elle sait quel genre de personne tu es vraiment ? Je suis sûre que non, hein ?! Tu ne lui as rien dit ?! Comme à moi ! À faire la fille modèle, alors que tu as toujours eu du sang sur les mains !

— Putain, Lara ! Je t'ai rien demandé ! Fallait pas accepter cette mission si ça te répugnait tant ! Et puis merde ! Pourquoi vous voulez me recruter alors que vous me détestez autant !