33 / Piégée

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Antoine avait donné rendez-vous à Camille à un endroit qu'elle connaissait. La jeune femme en fut étonnée, mais y alla sans appréhension. Si les sethiens avaient la possibilité de manipuler quelques passants, il ne pourrait en aucun cas étendre leur influence sur la totalité de la faune nocturne qui hantait le quartier où elle allait ce soir. Et puis, là-bas, elle était sûre d'y trouver Asterios. Le Forest, dont Antoine lui avait envoyé le nom, n'était-elle pas une boite de nuit familière pour le mystérieux malfrat ? Elle était peut-être même à lui, vu comment avait réagi le personnel quand ils s'y étaient rendus tous les deux ? Il y était entré sans difficulté avec elle, en tout cas.

Parce qu'elle était prévoyante et particulièrement méfiante, Camille avait revêtu une tenue dans laquelle elle était à l'aise. Si elle devait se battre, elle ne voulait pas être entravée par ses vêtements. Elle avait donc préféré superposer les polaires plutôt que prendre sa veste, et portait des leggings sur des collants. Elle marchait d'un bon pas avec ses bottes qui dissimulaient l'une de ses lames. L'autre était accrochée à l'arrière de sa ceinture, recouverte par le bord des polaires. Elle n'avait pas pris sa besace. Juste le minimum : ses papiers d'identité, sa carte de transport, sa carte bleue et un billet. Le tout avait été glissé dans une sacoche de voyage collée à sa peau sous la superposition de couches qui recouvrait son torse. Elle avait donc les mains libres, pour le moment glissées dans les poches de sa polaire. Son bonnet enfoncé jusqu'aux oreilles et son masque anti-pollution dissimulé par son foulard complétait sa tenue, elle était prête. Quoi qu'ait prévu Antoine, elle était prête.

Camille le vit immédiatement. Et pour cause. L'étudiant était seul sur le trottoir, devant la façade sombre de l'établissement dans lequel il avait prévu d'entrer. Ne remarquant aucun danger alentour, - voiture suspecte, groupe étrange, etc.. -, Camille se cala près de lui.

— C'est pas encore ouvert ? demanda-t-elle.

— C'est fermé, dit Antoine d'un air distrait.

— Ça ouvre à quelle heure ?

— Ça n'ouvrira pas. Ça n'ouvrira plus. Ils ont fermé la boite.

— Pardon ? Si c'est encore un de tes pièges à la con, Antoine...

— C'est pas un piège. Cette boite... cette boite était encore ouverte il y a deux jours !

— Je sais ! C'est là que je t'ai rencontré samedi soir. Tu m'expliques parce que tu es encore cryptique ?!

— Cette boite, j'avais eu un tuyau sur le fait qu'il y avait un vampire à l'intérieur. Certains des nôtres s'y étaient senti observés. Et quelques-uns avaient même disparus après y avoir mis les pieds.

— C'était peut-être une coïncidence ?

— Dans mon monde, il n'y a pas ce genre de coïncidence.

— Dans le mien si, dit Camille en haussant les épaules, prête à repartir.

— Attend ! Ne pars pas !

— Antoine, commença-t-elle en faisant volte-face, je ne suis venue que pour une chose. Manifestement, ça ne va pas arriver. Donc, je repars.

— Je sais où en trouver un vivant, mais il faut... aller au siège de l'Ordre.

— Comme par hasard ! Et ensuite, je n'en sors plus vivante, c'est ça ? Pchiiit ! Plus de Camille Dorville !

— L'Ordre ne cherche pas à t'éliminer, Camille.

— Il cherche quoi, alors ? Ah ! Oui ! À me recruter ? Alors, il s'y prend comme un manche !

— C'est de ma faute. Je ne m'y suis pas bien pris avec toi. Je croyais... je croyais pouvoir te convaincre, mais je ne suis pas à la hauteur. Je suis désolé, dit finalement Antoine en s'asseyant sans façon sur les marches de l'établissement fermé, en se prenant la tête entre les mains.

De notre sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant