41 / Réaliser

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Fuir était illusoire, parce, contrairement aux sethiens, les vampires avaient des capacités physiques bien au-dessus de la moyenne. À peine avait-elle atteint la berge que Lucie rattrapa Camille sans difficulté. La jeune femme, entravée par ses vêtements mouillés, et frigorifiée par le froid ambiant, - Il avait neigé ! -, n'avait réussi qu'à glisser maladroitement en sortant de l'eau. Lucie la plaqua sur le ventre, et la bloqua en s'asseyant sur elle, avant d'attendre Sola. Cette dernière avait échoué la barge sur un bord accessible, tandis que Camille hurlait des imprécations diverses, humiliée, et rageant d'être traitée ainsi.

— Camille, Camille, Camille ! Nous ne te voulons vraiment aucun mal... La preuve on t'a laissé dormir. On a veillé sur toi... Mais je vais finir par me mettre en colère si tu n'arrêtes pas de fuir sans arrêt ! Regarde-moi dans quel état tu es ?! dit Sola en remettant Camille sur le dos.

— Te mettre en colère ? Et tu vas faire quoi ? Me tuer ? cracha Camille très fâchée de sa posture et de sa faiblesse.

— Te tuer ? Je ne peux pas te tuer, Camille, dit alors Sola en approchant son visage à quelques millimètres de celui de la jeune femme.

— Pourquoi ?

— Il y a deux raisons : une que je ne peux pas révéler à moins de trahir un secret ; ce que je ne ferai pas, même si, sincèrement, ce serait trop claqué. L'autre, bien plus simple, et me concernant directement. Tu m'as sauvée la vie, Camille... ça n'est pas rien pour un Znūntāk.

— Les séthiens n'auraient pas réussi à te tuer.

— Bien sûr que si. Nous ne sommes pas immortels, et depuis le temps, les Dévoreurs ont compilé tout un tas de techniques pour nous affaiblir et nous trucider. C'est leur raison de vivre. Donc, tu m'as sauvée la vie et, cerise sur le gâteau, grâce à ça, la Matriarche a découvert comment ils arrivaient à faire naître leur oracle. C'est énorme, Camille ! Tu n'imagines même pas ! Alors nous ne voulons pas te tuer. Personne ne touchera à un cheveu de ta tête sans mon accord. Je suis ton ombre personnelle. Je serai dans tes pas jusqu'à ce que tu sois assez forte pour survivre sans moi. Et même là, je te suivrai jusqu'à avoir payer ma dette.

— Manquait plus que ça... J'ai pas besoin d'un chewing-gum de plus... dit Camille en claquant des dents, les bras serrés autour de son corps transit de froid.

— Je vais mettre cette réplique étrange sur le compte de la fatigue et du traumatisme, lâcha Sola en se redressant.

— Ahhh ! Sola ! Fiche-lui la paix ! Regarde ! Elle a les lèvres bleues. Il faut la réchauffer au plus vite !

— Merde ! Je la porte dans le bateau pour le moment, mais ça ne suffira pas. Trouve un abri !

— Nom de dieu ! s'écria soudain une voix d'homme, alors que Camille sentait ses paupières tomber sans qu'elle ne puisse rien y faire. Vous étiez censées le sauver ! Pas le mettre dans un ...

C'est à ce moment-là que Camille perdit connaissance en pensant « Putain ! Je suis dans la merde ! ».

***

Camille ouvrit les yeux sur la nuit. Elle voyait des étoiles. Pourtant, elle n'avait plus froid. Il faisait même très chaud, à vrai dire. Ce que son cerveau analysa immédiatement comme anormal, étant donné ses derniers souvenirs conscients : neige, fuite, eau gelée, vêtements trempés, hypothermie. Elle se redressa en grimaçant. Le combat contre les sethiens, et sa fuite, lui avaient laissé des traces. Ça attendrait parce qu'évidemment, elle n'était pas dans un endroit familier et surtout, elle n'était pas dehors.

À sa gauche, Camille pouvait voir une piste de danse vide avec, au fond, un bar devant lequel s'alignaient de hauts tabourets solitaires. Elle-même était couchée sur une banquette, près d'une table basse couverte de médocs, de pommades, de liquides désinfectants, de bandages et de pansements. Les étoiles au plafond n'étaient que de petites loupiotes de sécurité qui donnait à l'ensemble un air sinistre et abandonné, genre film post-apo avec zombies et nature hostile. Ah, non ! Dans le sien, il y avait des vampires... « Bordel ! Des vampires ! » songea-t-elle en se redressant un peu.

De notre sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant