Camille venait de s'agripper à un pan de mur en ruine pour passer de l'autre côté. Cela faisait cinq jours maintenant qu'elle vivait dans les Cavités. Pas incroyable. Pourtant, en temps ressenti, elle avait l'impression que ça faisait des siècles. Elle n'avait aucune nouvelle, ni de Dresden, ni de la Matriarche, ni même de Sola. Juste cette douleur qu'elle associait à sa séparation d'avec son Kachnefer.
En dehors des entraînements, nombreux et de plus en plus exigeants, elle se retrouvait seule. Naïm ne voyait pas l'intérêt de faire du baby-sitting et semblait peu apprécier les questions dont elle le harcelait dès qu'elle était en sa présence. Il était aussi assez désinvolte sur le silence des autres Znūntāks, comme si ça n'avait aucune importance pour le moment, et qu'il trouvait futile qu'elle s'en préoccupe au lieu de se concentrer sur la maîtrise de son élément.
Bref, en attendant la prochaine séance d'entraînement, Camille explorait donc les Cavités avec une craie et une torche électrique, histoire de ne pas se perdre. Ça lui permettait de ne pas trop tourner en rond et de ne pas penser constamment à l'absence de son Kachnefer.
Ce jour-là, elle avait jeté son dévolu sur un ensemble de sentiers étroits, encadrés de roches peintes d'une multitude de scènes qui partaient d'une grotte secondaire et minuscule. Pour elle, les fresques étaient comme un livre ouvert, mais écris dans une langue étrangère qu'elle ne maîtrisait pas. Elle suivait donc les dessins avec intérêt, mais se forgeait une histoire personnelle, consciente qu'elle ignorait totalement de quoi pouvait parler ces ensembles picturaux.
Elle aboutit bientôt à une salle vide, dans laquelle elle entra par une petite porte, qui la força à s'accroupir pour la franchir. Ici, point de décoration. Le dénuement le plus absolu. De la pierre taillée à la perfection, mais vierge et uniforme. Elle s'avança avec curiosité. Il était rare qu'il n'y ait absolument rien. Même pas un sarcophage ou des vestiges de ce qui avait été des offrandes. Et puis, elle remarqua le symbole au sol. Il n'était pas plus grand qu'une paume de main. La poussière l'avait partiellement recouvert.
Camille le dégagea, s'attentant à voir un sceau de pharaon ou un hiéroglyphe. Mais il n'en fut rien. Suivant un cercle parfait, il y avait un serpent qui se mordait la queue, animé d'ondulations stylisées. Et au centre, une étoile avec des milliers de branches. Curieuse, elle coinça sa torche entre ses jambes et prit une photo pour poser des questions à Naïm. Il était probable qu'il sache de quoi il retournait.
Au moment de se relever, elle remarqua les traces autour du cercle. Cinq ronds inexact et incertains. Mue par une intuition, Camille déposa ses doigts selon le schéma et fut surprise quand elle sentit qu'elle pouvait les enfoncer légèrement.
Une vibration la fit tomber sur les fesses, et elle vit le centre de la pièce bouger. Elle recula alors précipitamment, cherchant à rejoindre la porte, mais elle avait disparu. « Oh ! Merde ! » pensa-t-elle en s'adossant à un coin de mur, tandis que le sol se dérobait à moins d'un mètre. Puis tout s'arrêta et, chassant la poussière que les mécanismes anciens avaient soulevé en se mettant en action, elle se retrouva devant un escalier qui s'enfonçait dans la terre.
Point d'aventure sans un minimum de curiosité, et la curiosité amenait presque toujours du risque. Camille embrassa la pièce une dernière fois. De toute façon, elle n'avait pas vraiment le choix. À moins d'en appeler à son élément pour tenter de lui ouvrir un chemin à travers la roche, - ce qu'elle rechignait à faire car personne n'aurait été à l'abri d'un accident dans les Cavités -, elle ne pouvait qu'avancer. Et en l'occurrence ici, s'enfoncer plus profondément.
Lorsqu'elle posa le pied sur la dalle recouverte d'arabesques stylisées, Camille sut qu'elle foulait un secret. Un secret enfoui et même, peut-être, oublié. La salle était immense, vaste et haute. Camille avait beau lever sa torche, elle n'en voyait pas le bout. Des colonnes sculptées avec finesse, dont la peinture lépreuse s'écaillait en copeaux légers, jalonnaient l'espace à un rythme régulier, offrant une allée centrale majestueuse et vide. De chaque côté, des sarcophages s'alignaient sages et silencieux. Au-dessus de chacun d'entre eux, un cartouche rempli d'une écriture inconnue. Et chacun d'entre eux était orné de la même manière, d'un masque de pierre hiératique et froid aux yeux éteints mais grand ouvert.
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De notre sang
Любовные романыCamille est un être double. Par son prénom et son physique, elle brouille les pistes. Elle cache un lourd secret qui l'a forcée à être ce qu'elle est : indépendante et méfiante à l'excès. Sa rencontre avec un inconnu, aussi énervant qu'inquiétant, l...