53 / Tenter le diable

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Camille regarda par la baie vitré l'aube pointer le bout de son nez. Le silence était encore roi dans la maison. Enfin, au rez-de-chaussée, parce qu'à l'étage, Camille entendait de vagues gémissements étouffés par une porte close. « Le démon ! Il en avait encore une dans son lit », pensa-t-elle soudain furieuse. Alors qu'il lui avait interdit de coucher avec Mattéus ! Alors qu'il lui avait fait tout ce cinéma, la veille ! Ah ! L'enfoiré ! Très bien, Don Juan ! Tu veux jouer ? On va jouer !

***

Le volume de la musique était si fort que l'ensemble de la volaille de l'île pépiait en rythme. Dresden qui était tout occupé à embrasser les seins affolants de sa compagne de lit, redressa la tête, éberlué. Qu'est-ce que c'était que ce bordel !

Abandonnant son occupation, pourtant extrêmement plaisante, - sans être totalement satisfaisante malheureusement -, il attrapa son caleçon et l'enfila en vitesse, avant de sortir de la chambre. Il dévala les escaliers vers le rez-de-chaussée en quête de la source de la nuisance, tout en se doutant de qui en était à l'origine.

Il s'arrêta à mi-parcours de l'escalier en découvrant un spectacle réjouissant à ses yeux, même s'il était furieux contre Camille après ce qu'elle avait osé faire la veille et ce qu'elle faisait maintenant pour l'emmerder. La jeune femme était simplement vêtue d'un shorty et d'une ample chemise, et dansait dans l'immense cuisine dont il se servait si peu.

Elle avait déjà posé sur le comptoir tout un tas de choses appétissantes, fumantes ou fraîches. Elle se tourna pour ajouter un saladier contenant un fruit qu'il n'identifiait pas de là où il se trouvait, et elle le vit. Un grand sourire diabolique élargit alors ses lèvres.

— Éteint ça ! hurla-t-il reprenant un air peu engageant.

Elle tendit le bras armé d'une télécommande et prit tout son temps pour appuyer sur le volume du son qui diminua peu à peu. Il lui tourna le dos pour rejoindre celle qui attendait, frémissante, dans son lit. Le volume remonta aussitôt. C'était de l'électro. Insupportable au réveil. Il dévala les escaliers en trombe et frappa le comptoir en s'adressant à elle.

— Bordel, Camille !

— Bonjour à toi aussi, âme éternelle rayonnante de joie et de douceur ! s'exclama-t-elle en continuant de sourire.

— Tu m'expliques ! cria-t-il, hors de lui, face à son sourire, alors que le volume avait de nouveau diminué.

— Je cuisine.

— Tu cuisines, et donc, tu as besoin de faire chier tout le monde quand tu cuisines ?

— Je te signale que je n'ai pas demandé à être ici ! Alors assume ! Et puis, si tu pouvais t'habiller là, ce serait pas mal. Parce que, bon...

— Quoi ? Ça te dérange de me voir presque nu ? Je croyais que je ne te faisais aucun effet ? dit-il alors d'une voix doucereuse en s'approchant encore d'elle.

— Et c'est le cas, mais ta copine, là, elle pourrait se faire des idées sur ce qu'il y a entre nous ! Je suis censée être ta sœur de moins de 17 ans, je te signale ! Tu vois ?! Jalousie ! Tout ça ! dit-elle en désignant de sa cuillère en bois la fille enveloppée d'un drap qui venait d'apparaître dans les escaliers, et qui semblait se demander ce qui était en train de se passer.

Voyant Dresden distrait, Camille reprit alors la télécommande avec la ferme intention de remettre le volume au maximum.

— Donne-moi cette putain de télécommande, dit-il d'un ton froid en reportant son attention sur elle aussitôt que le volume commença à reprendre de l'ampleur.

— Pas question. Je cuisine et j'ai besoin de musique.

— Prends le casque dans ce cas.

— No way. Ça va me gêner.

De notre sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant