Dominic

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La soumission à première vue peut sembler être une voie vers la paix, un moyen de se conformer aux attentes de chacune des parties. La soumission lorsqu'elle est loyale et constante mène à une forme de libération. C'est une libération des responsabilités, un soulagement temporaire de la charge de la décision. Le Dominant ordonne, je suis donc obligée d'obéir. En obéissant on a plus à porter le poids de l'incertitude, du oui, du non, du je ne sais pas, on s'abandonne à un ordre supérieur, il n'y a plus de questionnement, plus de doute, juste l'acquiescement. C'est un lâcher-prise, une sorte de tranquillité mentale qui évite le conflit avec soi même, qui met en avant sa personnalité profonde sans avoir à se remettre en question.  Cette libération s'accompagne du renoncement à sa propre volonté, à l'effacement de soi.

Mais la soumission ne peut elle pas conduire à l'emprisonnement de soi, l'emprisonnement de l'esprit, plus on obéit plus on s'oublie, plus on s'oublie, plus la prise de décision personnelle devient silencieuse, on se perd dans les attentes des autres, dans les ordres imposés, on s'enferme dans une sécurité illusoire. On devient le reflet des attentes de l'autre, de celui qui nous domine.

Perle avait peur. Peur de disparaitre. Elle avait peur de disparaitre non pas physiquement mais dans son âme, dans l'essence même de ce qu'elle était. Comme si  chaque instant où elle obéissait effaçait une part d'elle même. Elle avait peur de perdre cette petite étincelle qui faisait d'elle ce qu'elle était. Pourquoi cela arrivait il aujourd'hui après tout ce qu'elle avait endurée. Elle ne voulait pas devenir une ombre, un être manipulé, elle avait l'impression qu'un jour se lèverait sans plus reconnaitre la personne qu'elle était. Un ordre, un tout petit ordre insignifiant l'avait fait basculé et Dominic s'aperçut qu'en fait elle était paralysée par la peur.

Elle se sentait tiraillée entre l'envie d'affirmer cette étincelle qui brulait au creux de son ventre et l'envie de retrouver son identité, c'était une lutte intérieur, une tension qui faisait s'éterniser l'instant inconfortable dans lequel elle s'était coincée. Elle avait peur, mais cette peur était la plus grande limite qu'elle devait franchir, s'accepter ou renoncer.

Dominic n'intervenait pas, c'était à elle et à elle seule de décider de rester ou d'abandonner. A elle de savoir trouver sa voie. Lui avait déjà vu son potentiel. Le temps semblait suspendu à la décision qu'elle allait devoir prendre. Elle était seule dans ce moment d'incertitude, seule avec ses doutes, ses peurs. Elle sentait comme un vertige face à la réalité de ce choix. Qui allait elle devenir entre les mains de Dominic ? Allait elle se perdre en chemin ?

Lui, de son côté l'observait, les mains dans les poches. Le moment s'étirait mais ce n'était pas à Lui de choisir, il n'avait pas à lui imposer sa volonté. C'était à elle de faire les premiers pas. Il est vrai que la situation aurait été beaucoup plus simple s'il n'y avait pas eue cette somme d'argent en jeu et là il jouait l'égoïste et laissait planer le doute. Il voulait qu'elle prenne le contrôle de son propre destin, qu'elle prenne conscience de cette force intérieur qu'elle ignorait encore et ce n'était pas en abandonnant maintenant qu'elle allait se découvrir. Pour Lui la décision était évidente mais il comprenait que pour elle c'était différent, il espérait qu'elle finirait par comprendre qui elle était. Elle allait devoir s'affirmer en tant que Soumise et il savait que cela n'allait pas se faire sans heurts. La voie qu'elle choisirait si elle était la bonne serait celle qui la conduirait à sa véritable liberté, encore fallait il qu'elle choisisse la bonne.

Etait elle capable de laisser derrière elle tout ce qui venait de se passer durant ces derniers jours et  retourner à sa vie normale. Etait elle capable d'oublier tous ces moments intenses qu'elle avait vécue avec Lui. Voulait elle vraiment partir.

Après un temps interminablement long, il vit son corps se relâcher doucement, comme si un poids invisible s'était lentement évaporé de ses épaules, ses muscles se détendirent, ses mains encore crispées un instant auparavant s'ouvrirent lentement, les tremblements qui secouaient ses doigts disparurent et ses paumes se posèrent à plat sur le sol, ses épaules lourdement enfoncées s'assouplirent. Elle ne s'était pas rendu compte qu'elle s'était autant  raidie, son visage aussi se décontracta, la crispation de ses yeux et la tension dans ses mâchoires se dissipèrent laissant place à une expression plus douce, plus apaisée. Le poids de ses doutes et de sa peur disparaissait doucement. Elle avait encore une peur oui, celle de voir son Maître être déçu d'elle et la rejeter. Elle savait qu'elle allait vivre des moments difficiles, qu'elle allait encore ruer dans les brancarts mais Zéro était son défi.

Il la laissa se retrouver dans ce calme fragile. Cet instant était un tournant vers quelque chose de concret. Ce relâchement était un premier pas sur le chemin qu'elle venait de choisir. Elle avait lâché prise, du moins pour ce moment mais c'était une évidence qu'elle acceptait de se soumettre. Elle se redressa, descendit lentement ses fesses sur ses talons, posa ses mains paumes en l'air sur ses cuisses qu'elle écarta largement, bomba le torse, seins en avant, le regarda.

Il avança, s'accroupit pour se mettre à sa hauteur.

"Merci, mais tu es consciente que ce mot ne se répètera pas et que tu vas avoir l'impression de vivre l'enfer".

"Oui Monsieur".

Dominic était un homme qui imposait le respect, la crainte. Ce n'était pas un tyran mais une figure de pouvoir silencieux. Sa réputation n'était plus à faire dans le monde des affaires comme celui du BDSM, elle le précédait partout où il allait. Ceux qui le croisaient savaient que son regard froid et calculateur savait percer à jour les faiblesses de ses adversaires. Les soumises qui lui étaient confiées tremblaient rien qu'en entendant leur Maître leur dire qu'elles allaient faire un petit séjour dans ses caves. Ce n'était pas le genre d'homme à rechercher compagnie ou s'allier pour obtenir ce qu'il désirait, il s'était fait tout seul et continuait ainsi. Il agissait toujours en solitaire, comptant uniquement sur ses propres forces, restant toujours maître de son destin. L'idée même de devoir quoi que ce soit à autrui lui était insupportable. Il n'aimait pas les obligations. Il savait que toute faveur pourrait être un jour retournée contre Lui, ainsi il ne permettait à personne de détenir ce levier sur Lui. Aucune dette, aucune promesse, aucun lien qui pourrait un jour lui être imposé. C'était sa manière à Lui de conserver son autonomie, de rester maître de ses choix. Il vivait selon ses codes, il pouvait se le permettre, chaque victoire, chaque succès en rapport avec ses donjons qu'il avait à travers le monde était le fruit d'un travail acharné. Il pouvait se permettre de ne dépendre de personne pour obtenir ce qu'il voulait. Son indépendance était précieuse mais elle avait un prix. Il côtoyait beaucoup de monde mais entretenait peu de relations durables en dehors de son monde à Lui. Ceux qui le rencontraient le respectaient et le redoutaient et peu pouvaient se vanter de le connaitre véritablement, heureusement car si certains avaient appris ce qu'il était, ils s'en seraient immédiatement servi pour l'anéantir. Sa vie aurait pu paraitre triste mais ne l'était en aucun cas. Et le petit trésor qu'il avait découvert allait l'occuper pendant un long, très long moment. Cette jeune femme avait réussit l'exploit de lui faire dire merci. Dominic n'avait jamais eue à dire merci de sa vie à qui que ce soit sauf peut être à lui même.

Perle sans le comprendre s'était imposée dans son monde. Chaque geste qu'elle faisait, chaque parole prononcée et dieu sait qu'elle lâchait quelque fois de belles tirades tissait autour de lui une toile invisible. Un fil après l'autre sans qu'elle ne s'en rende compte, elle était devenue essentielle, son comportement s'intégrant parfaitement dans l'ordre qu'il avait créé, ce qui pouvait paraitre paradoxale vu le tempérament de Dominic. Elle était totalement à son opposé. Elle était différente. Elle ne cherchait pas à plaire par des actes visibles ou des mots flatteurs. Elle agissait avec spontanéité, sans attentes. Son indépendance et sa force d'esprit la rendait fascinante. Elle ne minaudait pas, elle restait naturelle. Elle était un défi pour lui. La soumettre tout en lui permettant de garder sa personnalité. Cela allait être grandiose. Leur deux caractères s'opposant allaient faire des étincelles.


Le ScarifieurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant