Partie deux

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Être séparés pour toujours reste une manière d'être ensemble à jamais.

Ma haine s'estompe progressivement en courant en direction de ma meilleure amie et ses bras grands ouverts, croulant ainsi sous les regards curieux des gens qui patientent dans le parking. Beck est un rayon de soleil, la fièvre qui vous anime lorsque votre monde s'effondre et que vous ne croyez plus en rien. Plus la distance entre nous se fait mince et plus mon rythme cardiaque en devient que plus douloureux en tombant finalement dans ses bras. Ses cheveux ont un goût de shampooing mais a quoi bon me battre avec cette tignasse brune quand la source de votre propre bonheur apaise enfin tous vos maux.

— Bordel de merde, tu es vraiment avec moi.
Me dit-elle pinçant fort ma chair entre ses doigts. Merde, désolée. Pourquoi ce putain de mot se rajoute dans toutes mes phrases.

La peau de mon poignet vient prendre une teinte cramoisie en me tordant d'un rire stupide.

— Parce que tu es heureuse tout simplement ?

— Heureuse ? June.. j'ai enfin convaincue ma meilleure amie de venir vivre avec moi en colocation dans un autre pays. Je suis ravie, non super ultra vraiment ravie même.

Je referme la portière de la voiture comme la dernière page d'un livre mais aussi qui veut dire le commencement d'un nouveau. La voix de Beck ne cesse de monter dans les tours durant tout le chemin en sens inverse. Fière, elle me montre toutes les options de sa coccinelle rouge vielle comme le monde mais un modèle d'exception d'après les louanges qu'elle lui voue. Les kilomètres s'égrènent a une vitesse folle en contemplant derrière la fenêtre de son bolide les paysages impressionnants de la grosse pomme. Pendant un court instant mes yeux se perdent dans la grandeur de cette ville regorgeant de hauts buildings tout fait de verre.

— Je peux te promettre que tu ne regretteras pas ton voyage. Me dit-elle en parlant plus fort encore que la musique. Tu as déjà tout d'une vraie New-yorkaise.

— Comme quoi par exemple ?

Ses doigts vernis de rouge tripotent son volant entièrement recouvert de strass et de paillettes.

— Premièrement tu es la copie conforme de Serena dans Gossip Girl.

— Et toi Blair, je suppose ?

Ses yeux brillent de reconnaissance en coupant la route a une voiture qui ne tarde pas a nous exploser les tympans avec son klaxon. Ma poitrine rate un battement en me cramponnant au siège comme dans une voiture de rallye. Elle est comme ça Beck, imprudente et maladroite. Une genre de tornade qui rase tout sur son passage tant elle est authentique.

— On va finir aux urgences si tu continues.
La menaçai-je d'un regard assassin. Dire que je me suis déjà presque tout foulé a cause de toi.. Tu veux ma mort en fait.

Ses traits se durcissent en affichant une moue boudeuse.

— Ne soit pas aussi dure, au moins tu as toujours eu de beaux dessins sur tes plâtres.

— Des zizis de toutes les couleurs, c'est ça les beaux dessins dont tu parles ?

Je ne peux pas m'empêcher de sourire en ravivant les souvenirs qui affluent dans mon crâne. Beck dormait presque tous les week-ends a la maison et la veille de chaque rentrée. Un petit rituel que ma mère acceptait volontiers tant l'amitié pour elle est sacrée.

— Des zizis de qualités ma chère, souviens-toi du business qu'on c'est fait grâce a mon talent en dessin.

Il suffit d'une œillade dans la direction de mon amie pour se perdre dans un nouveau fou rire incontrôlé. Peut-être que cette idée saugrenue de tout laisser tomber pour venir vivre a New-York a du bon finalement. Après un trajet haut en couleurs en chantant a tue-tête l'album complet de Katy Perry, la coccinelle s'immobilise enfin en contre-bas d'un immeuble digne d'un gratte-ciel tant il survole les nuages. Nous sortons rapidement de la voiture, mes deux grosses valises sous nos petits bras menus. Certainement aussi surexcitée que moi, Beck me fait signe de la suivre en trottinant comme une gamine vers les ascenseurs au centre de l'entrée.

— Bienvenue dans ta nouvelle maison, Juno.

Les yeux aux bords des larmes, je m'imprègne des couleurs chatoyantes de la pièce principale sur une petite cuisine ouverte. Il y a quelque chose de chaleureux qui fait de cet endroit un cocon ou je sais déjà que je vais bien me sentir. Je visite mon nouveau chez-moi en finissant par la chambre où je ne cherche même plus a essuyer les larmes qui menacent de couler sous mes yeux. Beck a encore fait des siennes en me gâtant de petites attentions en tout genre. Une combinaison neuve en pilou-pilou, beaucoup de chocolats et des photos diverses de nous deux et d'autre de ma famille qui recouvrent les murs.

— Je me suis dit que ça t'aiderait a te sentir comme chez toi. Me dit-elle en me prenant dans ses bras. Si tu compter faire couler mon maquillage, bravo tu as gagné espèce de garce.

— Tout est parfait mais il manque quelque chose.

Ses sourcils se relèvent dans un petit froncement.

— Quoi donc ?

Je saute sur ma valise et sors mon appareil photo en pointant son objectif dans notre direction. Comme une vraie mannequin, elle ne tarde pas a se mettre en position dans un rire entêtant qui m'avait tant manqué. Le Polaroïd fraîchement imprimé sort et s'ajoute aux autres. Les heures s'égrènent rapidement ou nous retrouvons après des mois d'absence nos petits rituels. Nos combinaisons imprimés et infâmes sur le dos, je sort les pizzas du four pendant que Beck choisis un film.

— Alors raconte-moi tous les derniers potins. Me dit-elle excitée en nous servant un verre. Je veux tout savoir.

— La routine, quoi que j'ai assisté a un porno grandeur nature durant mon vol.

Ses yeux s'exorbitent en attrapant son verre d'un vin qu'elle avale d'une traite comme pour m'inciter a poursuivre. Je ne tarde pas a faire de même et lui raconte mon trajet cauchemardesque sans oublier d'insister sur cet homme qui doit encore sentir la sensation de brûlure de ma main sur sa joue.

— Merde, le pauvre il n'est pas tomber sur la plus marrante. Murmure-t-elle ahurie. Pourquoi ça ne m'arrive jamais a moi ce genre de chose ?

Je la fusille des yeux en reprenant mon histoire.

— Il voulait me punir, Beck c'est pas drôle.

— Pas drôle ? Tu as la doublure parfaite de Christian Grey dans ton avion et toi tu lui colles une claque parce qu'il veut ta bouche sur..

Je saute du divan pour la faire taire en positionnant la paume de ma main sur ses lèvres entrouverte ce qui la fait rire. Il avait beau être charmant sans faire quoi ce soit, il m'en faut plus pour me laisser aller complètement. Je parie que ma meilleure amie n'est pas en reste pour m'apprendre les bases de la perversion tout au long de mon voyage en sa compagnie.

— Ils ne sont pas tous comme Matt, tu sais.

Mon ventre se retourne sur lui-même devant cette remarque. Ils ne sont peut-être pas tous comme lui mais en attendant, c'est bien la première fois que j'ai cru y laisser ma peau pour de bon.

My only one Où les histoires vivent. Découvrez maintenant