Partie quatorze

13.9K 728 60
                                    

Mais vous savez, on peut trouver du bonheur même dans les endroits les plus sombres. Il suffit de se souvenir d'allumer la lumière.

~~~ Point de vue de June. ~~~

Les portes en verre se referment dans un bruyant vacarme où peut-être que mon coeur est en train de faire des bonds si violents que je ne distingue plus d'où provient ce brouhaha. La statue de glace dans mon dos me donne une frousse incontrôlable. Je transpire dans des endroits encore improbables jusque-là. Jared et ses lames de couteaux à la place des yeux me rappelle que je suis en position de faiblesse et je ne supporte pas ça.

— Deuxième porte à droite. Me dit-il en fermant la marche.

Je rentre dans une pièce sublime où une vue imprenable sur la ville me coupe le souffle. Dans un silence de plomb, il me fait signe de prendre place dans un fauteuil en face de son bureau mais je ne veux pas me soumettre, je sais déjà ce qui est en train de m'attendre.

— Non je ne vais pas m'assoir alors tu peux me dire mes quatre vérités et me mettre à la porte.

Je me renfrogne en croisant les bras contre ma poitrine. Il souffle en m'observant depuis son bureau.

— Emmerdeuse, est-ce que je te parle d'un licenciement ?

Je lève soudainement la tête de mes bottines.

— Pourquoi tu ne le ferais pas, tu as la réputation de celui qui vire à la moindre occasion.

Je crois que c'est la première fois que je vois un semblant de sourire poindre au coin de ses lèvres.

— Alors comme ça je suis une une grosse merde puis un con avec des grands airs ?

— Affirmatif, c'est bien ce que je viens de dire.

Je m'enfonce encore, à croire qu'il arrive à me rendre mauvaise naturellement. Être gentille avec lui me semble tout bonnement impossible pas après ce qu'il m'a dit ce matin.

— Tu as du caractère June c'est bien mais je vais te dire un truc assez simple à comprendre. Ici, tu fermes ta bouche et tu fais ce qu'on te demande, le travail c'est le travail.

J'ouvre la bouche comme un mauvais automatisme puis la referme en comprenant qu'il a raison.

— La vie privée reste hors de Massey's Industrie. Me dit-il en fourrageant dans ses cheveux. Si tu as un problème avec moi, on règle ça mais pas ici.

Je suis en colère parce que je suis consciente d'être devant mon patron à faire la maligne alors que mon avenir tient entre ses mains.

— Tu seras toujours confronté à de la merde dans ta vie, malheureusement c'est dommage de voir que c'est toi qui la provoque. Chuchotai-je en me perdant dans le vert de ses yeux. Laisse-moi te dire qu'on ne se connaît pas et je ne veux pas te connaître, tu es tout ce que je ne veux pas dans ma vie.

La haine se lit dans ses yeux en me regardant avec insistance.

— Je me la ferme pour ton bien tu peux me croire.

— A plus patron, ramène-moi ma veste à l'occasion.

Je sors en trombe de la pièce certainement parce que dans le fond je suis une froussarde qui a le trouille de ce qu'il pourrait vraiment faire.

~~~

Une semaine que je ne dors plus en sachant la tension qui règne chez Massey's Industrie depuis ma provocation envers Jared. Andrew qui semble compréhensif m'a simplement réprimandé sur mon comportement mais aucune sanction ne semble être de la partie. Je suis dans mon lit et je peux entendre les aiguilles bruyantes de mon horloge. Dans soixante secondes, j'ai dix-neuf ans. Mon cœur martèle ma poitrine en sifflant une bouteille de champagne provenant tout droit de la cave à ma sœur.

— Joyeux anniversaire, June. Dis-je à moi-même en levant la bouteille vide. Que cette nouvelle vie te soit favorable.

Je suis bougonne, la solitude me ronge ses derniers temps. Maman est à Paris seule dans sa petite maison pendant que je rêve de faire ma carrière aussi loin d'elle.

— Joyeux anniversaire mon grand bébé ! Elle chante gaiement derrière le combiné. comment vas-tu ? Et avec Angelina tout ce passe bien ?

— Merci maman, tu me manques tellement..

Les larmes me montent aux yeux en me rappelant de son visage, de son parfum encore sur certain de mes vêtements.

— On est ensemble, June. Elle renifle doucement mais j'imagine ses pleurs muets. Peut-être pas dans la même pièce, mais dans nos cœurs nous le sommes.

— Quand est-ce que tu viens à New-york ?

Je pose la question en connaissant ce qu'elle va me dire.

— Bientôt mon cœur, je travaille beaucoup mais promis je viendrais..

Je repousse une mèche derrière mon oreille en revenant tout droit à la réalité. L'argent manque aux besoins de notre famille depuis que mon père n'est plus là, enfin il est juste quelque part sur cette planète et ne se doute sûrement pas que nous sommes dans une merde inimaginable.

— Il faut qu'elle soit au courant, maman. Je regrette d'avoir cette conversation maintenant. Je vais lui dire, demain.

— Non, tu ne lui diras rien. Elle hausse le ton et pourtant elle sait que j'ai raison. Je ne veux pas qu'elle me donne d'argent, elle n'a pas à le faire.

La fierté de ma mère est remarquable mais elle manque à tout le monde ici.

— Ok, alors compte sur moi pour te faire venir jusqu'ici le mois prochain.

Je ne plaisante pas, j'ai besoin d'elle.
Nous parlons finalement de tout et de rien, pas de prise de tête, juste une conversation qui s'éternise entre une mère et sa fille. Je raccroche finalement après plus d'une heure en promettant que je ferais tout mon possible pour la faire venir. Ma bouteille encore à la main, j'ouvre la fenêtre de la terrasse en cherchant la voiture de ma sœur en contrebas. Évidemment, elle ne veux pas se morfondre toute seule avec moi.

— Putain mais ferme-là.

La sonnerie de mon portable m'agace. Je ne supporte pas les appels pour mon anniversaire surtout quand ça provient des réseaux sociaux vu que personne ne se souvient jamais de la date.

— Putain la vache c'est quoi cette gueule ? Me demande une voix juste en contrebas de ma terrasse. Tu peux ressusciter ma grand-mère comme ça. 

Une silhouette nonchalante et infinie sous une capuche sombre, des yeux de serpents hypnotisants. Il incarne le diable en personne.

— Elle se retourne déjà certainement tous les jours dedans vu la tienne.

Je m'accoude à la rambarde sous ses yeux de merlans frits, je crois lire entre ses lèvres une insulte mais je suis bien trop imbibée de champagne. Oh non Collins, tu ne m'auras plus aussi facilement.

My only one Où les histoires vivent. Découvrez maintenant