Partie quarante trois

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Si seulement les gens qu'on aime pouvaient se voir de la façon dont on les voit.

~~~ Point de vue de Jared. ~~~

Il est exactement huit heure du matin, la sonnette de la porte retentit de plus en plus fort dans toute la maison ce qui n'annonce rien de bon. Je me frotte les yeux, remarque Andrew qui dort encore dans le divan, tombe à la renverse en marchant sur un corps inanimé devant la cheminée. Pas de panique, mon prochain achat sera une panière pour chien à Marvin, promis. J'inspecte les lieux à la recherche de June qui joue à la belle aux bois dormant recroquevillée en boule dans un fauteuil.

— Manquerait plus que la sorcière..

Je tire à la racine de mes cheveux en ouvrant d'un coup sec la porte. Bingo, à la simple vision de ses hauts talons, je sais déjà que je vais en rogne une bonne partie de la journée.

— Un mauvais rêve ? Demandai-je en me pinçant avant insolence. Ah bah non finalement, c'est déjà Halloween ?

— Tu es comique à ce que je vois.

— Un balai ou une pomme ?

Ma mère qui ne semble rien comprendre me fusille de ses yeux bleus en soupirant.

— Qu'est-ce que tu racontes encore..

— Votre déguisement de sorcière, il vous manque un balai et un nez crochu.. oubliez ce que je viens de dire.. en ce qui concerne votre nez, on ne remarque que ça.. Bonne nuit.

Je referme la porte brusquement histoire de bien lui faire comprendre que je ne veux pas qu'on m'emmerde aussi tôt mais ma mère toque une nouvelle fois à la porte en tentant de se retenir de me mettre une gifle.

— Je connaissais déjà ton insolence mais à ce stade on peux dire que ça frôle le ridicule. Me dit-elle en croisant ses bras contre sa poitrine. Pourquoi tu ne veux pas me répondre quand je t'appelle ?

— Effectivement la technologie c'est pas ton truc pas vrai ? Tu fais partie de mes contacts indésirables depuis bientôt trois mois, ça se voit que tu m'appelles régulièrement en tout cas.

Je sens une colère insoutenable qui gagne du terrain. Mon arrogance de bon matin est en train de la mettre six pieds sous terre mais c'est une Collins et un Collins ne flanche jamais. Elle se contente de se mordre la lèvre silencieusement en reprenant son calme.

— Je veux qu'on parle boulot, laisse-moi rentrer.

Elle ne renoncera pas tant qu'elle ne rentrera pas dans cette maison où tout le monde dort encore. Je suis presque certain que de revoir Marvin qu'elle ne supporte pas ou même June pourrait être la cacophonie mais je tente toute de même cette nouvelle expérience.

— Tu ne m'en voudras pas mais il y a déjà du monde..

— Ah oui ?

Elle s'imagine certainement être la grande gagnante mais son petit sourire se transforme rapidement en petite rictus mauvais en regardant toute la pagaille dans le salon et ceux qui y dorment.

— C'est très gentil de ta part de faire dormir des sans-abris dans cette maison.

Elle enjambe Marvin avant de toucher doucement son corps du bout de son talon aiguille.

— Il est mort ou son odeur est habituelle ?

— Pas de douche depuis deux mois, c'est malheureux.

Son affolement est un bon divertissement en tous cas. Je crois que depuis la naissance, ma mère ce bousille avec ses règles alors vous n'imaginez pas ce qui se passe dans sa tête en regardant cette porcherie.

— Elle ne fait pas correctement son boulot en tout cas, pourquoi cette femme n'est pas déjà en tenue de travail ?

J'imagine qu'elle parle de June qui somnole toujours mais bizarrement cette dernière remarque m'agace davantage. Je savais déjà qu'elle n'aimait presque personne mais à ce point-là c'est humiliant.

— Ne parle pas comme ça d'elle. Dis-je dans un murmure en serrant les poings. Personne ne veut de toi ici, tu peux le comprendre ?

— Très bien, je ne dirais plus rien à ce sujet alors.

Nous retournons dans le jardin en s'installant à une table à l'ombre. Autant dire que j'aimerais vraiment que cette discussion se termine rapidement où même qu'elle n'est carrément pas lieu.

— On s'inquiète avec ton père, les derniers mois ne sont pas bons en terme de ratio.

— Je suis au courant, mais nous avons un bon chiffre à faire ce mois-ci.

Effectivement, elle a raison. Depuis mon absence injustifiée à cause de ma dispute avec June et Nina je n'avais pas du tout la tête à ça. Andrew gère comme il peut la société mais apparement pas ce n'est pas encore suffisant.

— Tu dois te reprendre en main, Jared. Me rappelle-t-elle à l'ordre en me sortant une pile de dossiers sur la table. Depuis que cette fille fait partie de ta vie, tu n'es plus le même.

— Il n'y a pas de rapport avec June, elle arrive à me rendre meilleur justement.

La femme aux cheveux mi-long me sonde de ses yeux bleus en tapotant de ses ongles rouge vif contre le plateau en verre de la table.

— Ah oui, tu trouves ? Enfin qu'est-ce qu'il t'arrive en ce moment, Jared.. Tu ne vois pas qu'elle te pousse du mauvais côté ?

— Absolument pas.

Je le pense vraiment, June est certainement tout ce qu'il y a de mieux dans ma vie à l'heure actuelle. Grâce à cette relation que nous entretenons, je vois enfin un petit bout de lumière tout au fond de ce putain de tunnel.

— Donc tu as des sentiments pour cette femme ?

Mon cœur se soulève automatiquement à cette question. Il n'y a pas de doute à ce sujet mais je n'arrive pas encore à le dire facilement. Elle est arrivée comme un boulet de canon dans ma vie avec ses peurs et ses aprioris mais nos sentiments sont sincères.

— Que tu le veuilles ou non, elle m'apporte bien plus que ce que vous m'avez donné avec Papa depuis ma naissance.

— Ne dit pas ça.. nous avons toujours fait du mieux que nous pouvons pour que tu sois heureux.

Cette dernière phrase me fait doucement rire.
Non, elle n'a pas idée de ce que la vie avec eux peut-être difficile.

— Pas assez apparement, je ne te parle pas d'argent ou de notoriété. Dis-je en avalant une gorgée de café. Je te parle de bonheur et d'être vraiment heureux. Je commence enfin à comprendre ce que c'est et je ne veux pas que ça s'arrête.

My only one Où les histoires vivent. Découvrez maintenant