Partie dix

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Et si ce n'était pas les liens du sang qui forgeaient une famille, mais plutôt les personnes qui connaissent nos secrets et nous aiment malgré tout, nous permettant d'être enfin nous-mêmes.

~~~ Point de vue de June. ~~~

Nous sommes sur une plage, les vagues se déchaînent sur les rochers en ne formant plus qu'une douce symphonie que j'aime particulièrement. Ma mère explique à papa le secret de son bronzage pendant qu'il s'occupe davantage à me surveiller depuis sa serviette. Je suis une enfant heureuse, mes parents sont mes meilleurs amis et je ne manque jamais de rien.

— Attention aux vagues, Juno.. Me rappelle-t-il en me couvrant de crème solaire. Trois.. deux.. un ?

Nous courons tout les deux jusqu'à ce qu'il rejoigne ma mère qui me parle au loin en agitant ses bras. Je ne comprends rien, mais l'eau est si chaude que je ne veux pas sortir tout de suite. Ça attendra un peu, non ? Je nage à contre courant avec un petit poisson qui a sûrement perdu son chemin.

— Je vais être ta maman petit poisson..

Je suis absorbée pas ses couleurs. Il ressemble à une perle brillante comme celle que maman porte souvent quand nous sortons. Pearl, ça lui va bien comme nom.

— June !

Je regarde ma mère, debout sur le sable en me faisant des grands gestes. Elle semble de plus en plus minuscule tout comme le reste de la plage. Je lui fais signe en lui disant que je vais bien mais en regardant mon nouveau copain, je remarque qu'il flotte presque hors de l'eau.

— Qu'est-ce que tu as, Pearl ?

Il nage bien moins droit que d'habitude, ses nageoires ne brillent plus comme des petits diamants.

— Ne bouge pas, papa adore les animaux.

Je nage à contre courant jusqu'à la berge mais les vagues me claquent douloureusement le visage. Pourquoi est-ce que je n'arrive pas à rejoindre mes parents ?

— Maman..

Je cherche du sable sous mes pieds mais je bois la tasse de plus en plus régulièrement. Je tousse de plus en plus comme si mon corps ne devenait plus qu'une tasse de gros sel.

— Reste a la surface, June ! Papa arrive !

Je regarde une dernière fois le petit poisson et les larmes coulent en abondance sur mon visage. Pourquoi je n'arrive pas à prendre sa main ? Je hurle de plus en plus fort mais papa ne semble pas m'entendre. La tête sous l'eau remplit mes poumons en même temps que mon ancien copain de nage. J'ouvre une dernière fois les yeux, il est toujours là.
Je ferme les yeux, personne ne vient me sauver.

— Non !

Je sursaute du divan en criant de plus en plus fort. Ce mauvais rêve est toujours là même après plus de quinze ans. L'oxygène s'amenuise dans la pièce faiblement éclairée alors que je suis recroquevillée en boule en tentant de reprendre une respiration convenable. Où est mon père maintenant ? Je me rappelle encore de cette journée, de ce petit poisson mort et de cette ressemblance avec une noyade. Sauf qu'il n'est plus là mais qu'il m'a pourtant sauvé la vie.

— Putain pourquoi tu ne me laisses pas tranquille..

Ça fait plus de quinze ans qu'il ne fait plus partie de ma vie et je dois bien reconnaître que c'est toujours autant douloureux. Il a prit la poudre d'escampette après une énième dispute violente avec maman puis c'est silence radio depuis. Je me rappelle encore de ce bisou contre le front en me disant qu'il m'aimait plus que tout au monde. Mensonge, on n'abandonne pas son enfant comme ça.

— Allez maman..

J'appelle ma mère mais les sonneries retentissent dans le vide. D'habitude, elle fait taire mes pleurs mais pas cette fois-ci. Je me lève finalement du divan en appelant ce garçon aux yeux clairs mais a croire qu'il n'a pas non plus de temps à m'accorder. Un verre d'eau fraîche à la main, je regarde derrière les carreaux de la fenêtre en constatant deux hommes dans le chemin menant à la maison.

— Ça devient une habitude de se mettre les deux pieds dans la merde, Collins.

J'avance jusqu'à eux sous la pluie en remarquant qu'ils sont en pleine dispute. Jared retient l'agent de sécurité de la veille en le tenant fermement d'une part et d'autre de son tee-shirt.

— Qu'est-ce qu'il se passe.. Jared, non !

Tout est tellement rapide que je n'ai pas le temps de rejoindre les deux hommes que son poing fracasse la mâchoire de Max. Mes mains saisirent sa nuque mais un deuxième coup s'enchaîne et je comprends que je ne le ferais pas revenir à lui-même.

— Ça devient une habitude maintenant. Chuchote Max en crachant une glaire de sang sous mes yeux. Tout est sous contrôle, vous pouvez partir.

— Non ça ne va pas ! Regardez votre visage..

Jared qui me tournait le dos jusque-là me regarde enfin de ses grands yeux qui virent plus noirs encore que possible. Il est flippant, même sous cette pluie torrentielle, mon corps tremble en me faisant davantage plus petite.

— Barre-toi de chez moi emmerdeuse.

Je reste silencieuse en me mordant tellement fort la lèvre que je jurais en être couverte de sang.

— Qu'est-ce que tu fais encore là ? CASSE-TOI DE CHEZ MOI JE VIENS DE TE DIRE.

— Arrête Jared, tu vas trop loin..

Un sanglot m'arrache la gorge mais je ne veux pas lui faire ce plaisir-là. Il est en colère pour je ne sais qu'elle raison et finalement peut-être que c'est bien que je ne le sache pas. Je revois mon père qui hurlait fort sur ma mère cette nuit-là et mon cœur se serre douloureusement.

— Je vais trop loin ? Barre-toi espèce de sangsue, je ne respire plus depuis que tu es là.

Mon cœur rate un battement, puis deux puis c'est le vide le plus complet. Je n'arrive pas à croire qu'il vient de me dire ça en pleine figure. Espèce de sangsue ? Je ne respire plus depuis que tu es là. Le goudron se dérobe sous mes pieds dans un silence effrayant. Max me retient d'une main en plaçant son tee-shirt au dessus de mon crâne pour qu'il me protège de la pluie.

— Merci de votre aide, je vais rentrer.

Jared se tient en arrière, la main en sang il se frotte nerveusement le visage avant de remettre un coup violent dans un tronc d'arbre. Il souffre autant que mon coeur meurtri de ses propos. Je ne m'attendais pas à des excuses mais je croyais que la veille il avait apprécié autant ma compagnie que j'ai aimée la sienne.

My only one Où les histoires vivent. Découvrez maintenant