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Je me redresse avec difficulté. Ce fut l'une des pires nuit de ma vie. La douleur persistante dans ma jambe semblait me donner des coups de poignards réguliers toutes les cinq secondes, je n'ai fait que trembler, morte de froid, et ce, même malgré le sweat de Thomas.

Comme je l'avais prévu, nous nous sommes perdus. Après presque une heure, le châtain commençait à fatiguer - parce que je ne suis pas un poids plume - et j'ai réussi à le convaincre de s'arrêter. Emily a commencé à s'inquiéter, et c'est Kyle qui l'a prise en charge afin qu'on évite qu'elle nous fasse une crise de panique. Finalement, nous nous sommes rendus à trouver un endroit à peu près épargné par la tempête, et à nous rouler en boule pour dormir. Je me suis retrouvée écrasée entre Thomas et Emily, mais la chaleur corporelle ne m'a pas aidée.

Ce matin, ma tête me tourne, mes mains tremblent toujours, et je tiens à peine debout.

- Tu as de la fièvre, constate Jonathan en venant s'assoir à côté de moi.

Nous sommes les deux seuls éveillés. Tout nuage a disparu, il y a un grand soleil, ce matin, et je ne doute pas que la température ne va pas tarder à grimper en flèche. Je ne lui réponds pas. Alors, il se penche, attrape le sac d'Emily, et s'assoit en tailleurs en face de moi. Doucement, il relève mon pantalon, et je grimace. Il retire le bandage, je détourne les yeux. Je sais que ça a commencé à s'infecter. Je le sens.

Une vive douleur me traverse la jambe et j'insulte Jonathan entre mes dents lorsqu'il applique un coton de désinfectant sur mon mollet.

- Comment est-ce qu'elle va ? interroge soudainement Thomas d'une voix ensommeillée derrière moi.

Jonathan redresse la tête pour le regarder. Ses yeux verts le fixent un instant, comme s'il hésitait à lui dire la vérité, puis, il soupire :

- La plaie a commencé à s'infecter. Elle a de la fièvre.

Je roule des yeux alors que Thomas se lève instantanément et s'avance jusqu'à moi pour plaquer sa main sur mon front. Il jure dans un souffle, et je secoue négativement la tête :

- C'est bon, je vais m'en sortir.

- Nous sommes perdus, Louise.

- A qui la faute ?

Le châtain détourne les yeux. Emily, à côté de moi, gémit doucement en se redressant, la mine fatiguée.

- Je déteste les oiseaux, déclare-t-elle d'une petite voix en frissonnant.

Je ne peux que la comprendre : une chouette dérangée par la tempête a hululé à la mort toute la nuit. 

- Il faut qu'on retrouve la rivière, déclare soudainement Thomas. C'est le seul moyen que nous avons de retrouver âme qui vive.

- Ils vont envoyer les autorités, Thomas, je soupire. Ils vont nous retrouver.

- Cette partie de la forêt est trop dense, proteste-t-il, un hélicoptère ne nous verrait pas.

Je ne réponds pas. Il marque un point. Le ciel est à peine visible à travers la cime des arbres.

- Alors quoi, on repart ? marmonne Kyle, lui aussi réveillé.

- On repart.

***

Je me suis évanouie. Trois jours durant, si j'en crois Emily. Nous n'avons retrouvé ni le chemin, ni les autorités. Tous les quatre commençaient à s'inquiéter de mon état de santé, qui se dégradait de jour en jour, et pendant mon inconscience, ils ont retrouvé la rivière. Seulement, le manque d'eau, de nourriture, et de sommeil les a tant embrouillés qu'ils ont commencé à remonter le courant au lieu de le descendre. Au moins, ils ont résolu le problème de l'eau. Ils se nourrissaient de baies, mais lorsque j'ai commencé à aller vraiment mal, ils ont dû trouver quelque chose de plus consistant. Si j'en crois ce qu'ils m'ont dit, je me réveillais par intermittence, mais je n'en ai aucun souvenir. Enfin bref, Jonathan a eu la première idée lucide et est parvenu à fabriquer une sorte de lance. Thomas s'en est servi pour aller pêcher. Il a mis des heures avant de réussir à attraper un poisson, et pour ça, il a fallut que tous se mettent à l'eau pour faire un barrage.

SolivagantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant