La main tremblante, je me tourne vers mon interlocuteur. Il se tient debout, pistolet tendu vers moi. Alors, comme pour le provoquer, je sors le mien, le pointe sur lui, et retire la sécurité.
Des déclics m'indiquent que les Enfants sont prêts à tirer.
Mon bras gauche me fait de plus en plus souffrir et je sens des sueurs froides couler le long de mon dos, mais je garde contenance. Je savais que sa trace avait disparu et que c'était donc forcément lui qui nous avait vendus. Je ne pensais pas qu'il s'était laissé enrôler au point de les intégrer.
- Tom', le salué-je.
- Dépose ton arme, lance-t-il sur un ton qu'il voudrait autoritaire.
Je n'en fais rien, et reprends :
- Un jour je vous ai dit que vous ne pourriez pas me décevoir plus. Mais je crois que tu as le don de me faire mentir.
Il contracte légèrement la mâchoire. Ma main gauche me fourmille et je sais que si mon bras n'est pas pris en charge vite, je risque fortement d'en perdre l'usage. Enfin, s'ils ne me tuent pas avant. D'un vague signe de tête, je désigne l'ensemble des Enfants qui m'encerclent.
- Qu'est-ce qu'ils t'ont raconté ?
Il ouvre la bouche, mais je le coupe.
- Non, laisse-moi deviner. Ils t'ont dit que livrer Naïm aiderait à me retrouver, et puis ils t'ont dit que te joindre à eux permettrait que cette situation n'arrive plus jamais en ta présence.
Il ne répond pas, et j'en conclus que j'ai visé juste.
- Quelle situation ? J'enchéris alors. Dis-moi, qu'est-ce qu'un Enfant non armé peut faire face à un ours ? Qu'est-ce qu'il peut faire face à des hommes comme ceux de Naïm ?
Avant qu'il ne réponde, je tranche :
- Rien de plus que ce que j'ai fait. Avant que tu ne me demandes comment je connais l'existence des Enfants, Thomas. Est-ce qu'ils n'ont jamais fait la bourde de dire « agent » en parlant de moi en ta présence avant de se rattraper ?
L'incompréhension passe sur son visage, et j'opine.
- Agent SEMPEY, c'était ma position là-bas.
Ses yeux s'écarquillent brusquement.
- Tu...
- Tu n'as jamais croisé mon père là-bas ? M'étonné-je alors. Etonnant, je pensais même qu'il serait là.
Je balaie rapidement les Enfants du regard. Aucun d'entre eux ne réagit.
- Ils t'ont enrôlé Thomas, et tu n'as rien vu venir.
- C'est à toi que Naïm a retourné le cerveau, rétorque-t-il d'une voix ferme.
- Tu vois, j'insiste sans abaisser mon pistolet. Tu racontes des conneries. Tu étais là Thomas, tu as vu comment Naïm agit et tu as vu mes réactions, tu sais que de vous tous j'étais la plus opposée à ses idées et maintenant tu oses me dire qu'il m'a retourné le cerveau ? J'ai su que tu étais con le jour où tu m'as dit que la lune ne tournait pas dans le même sens que le soleil, mais je ne pensais pas que c'était à ce point.
Je me tourne vers les autres, m'adressant plus à eux qu'à lui :
- Qu'est-ce que vous lui avez trouvé, comme points forts, sérieusement ?
- Lou'...
- Les Enfants forment des machines à tuer, Thomas, le coupé-je. Tu n'étais pas capable de tuer il y a quatre mois, je ne vois pas ce qui a changé depuis.
VOUS LISEZ
Solivagant
ActionSolivagant [n] : qui erre seul, aventurier solitaire. «- De quoi as-tu peur ? Je me pince les lèvres. De quoi ai-je peur ? Mes menottes glissent le long de mes poignets, et je me retourne pour lui faire face. Ses yeux noisette étudient mon visage a...