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Douleur. Des gens hurlent dans ma tête. Ils me crient que je ne vaux rien, que je n'ai qu'à me laisser aller, il me tuera.

Mon corps est en feu. Je souffre. Atrocement. Ma tête me brûle à un point inimaginable, j'ai envie de me tordre dans tous les sens pour atténuer cette douleur mais mon corps est comme paralysé. Je suis incapable d'exécuter le moindre mouvement.

Imbécile. Cette idée était une pure folie. S'enfuir... il me tuera.

J'ouvre les yeux dans un sursaut, hoquetant, et mon souffle me revient en même temps que ma vue. Je reprends mes esprits, et constate que j'ai manqué de percuter la tête de l'infirmière penchée au-dessus de moi.

- Eh, doucement, tout va bien, tente-t-elle de me rassurer en souriant.

Cette fois bel et bien revenue à moi, je secoue négativement la tête.

- Non, tout ne va pas bien. Non, rien ne va. J'ai pris une balle dans la jambe, et vous voulez me faire croire que tout va bien ?

L'infirmière grimace.

- La blessure ne vous laissera normalement aucune séquelle handicapante, c'est presque un miracle.

Je ferme les yeux. Un miracle.

- Combien de temps ai-je dormi ? je murmure alors.

- Environ une semaine.

J'étouffe un grognement.

- Naïm était en colère ?

- Que tu tentes de t'échapper ? non, c'était prévisible. Seulement il pensait que tu profiterais d'un moment d'inattention d'un garde. Il n'avait pas imaginé que tu puisses avoir gardé un poignard sur toi.

Yeux toujours clos, je hausse vaguement les sourcils, et marmonne, plus pour moi que pour elle :

- Il me l'a retiré maintenant, je suppose.

- En effet.

Elle se râcle la gorge.

- Vous devrez rester ici encore quelques temps avant d'être autorisée à marcher de nouveau.

Je rouvre les yeux.

- L'infirmerie est plus accueillante que ma cellule, je ne vais pas m'en plaindre.

Elle esquisse un sourire, et je laisse ma tête retomber sur l'oreiller. Parfait, ma seule chance de sortir d'ici, m'est passée sous le nez.

***

Je ne pensais pas que « quelques temps » signifierait deux semaines. Je ne tiens plus en place lorsqu'un homme, présumément mon garde, vient me chercher. La blessure s'est révélée plus profonde et douloureuse que ce à quoi je m'attendais, et comme j'ai fermement refusé l'utilisation de béquilles, les infirmiers ont rallongé mon temps d'alitement.

L'homme me passe les menottes, et je me mords la lèvre.

- De quoi est-ce que vous avez peur ? marmonné-je entre mes dents alors qu'il m'invite à me lever. Vous pensez que je vais partir en courant ? c'est vrai, je pourrais. Oh, non, pardon. J'en suis incapable.

Il me foudroie du regard et j'esquisse un sourire en boitillant jusqu'à la sortie. Une vive douleur se répand dans ma jambe, mais je l'ignore, et maintiens un rythme peut-être légèrement élevé pour quelqu'un portant une blessure comme la mienne. Le garde m'entraîne dans des couloirs que je ne connais pas, et déclare après quelques minutes de silence :

SolivagantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant