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- J'ai entendu parler de ta mésaventure avec Justin, déclare calmement Naïm en posant sa fourchette sur la table.

Je lève les yeux au ciel, à deux doigts de lui répondre que je sais pertinemment qu'Amal ou Owen lui a raconté l'intégralité de l'entraînement, et qu'il n'en a pas juste « entendu parler ». Justin regarde fixement son assiette, comme s'il espérait y lire son avenir.

- Ces altercations sont de plus en plus fréquentes, constate-t-il. D'abord avec Tom, puis Owen, et maintenant toi...

- Peut-être que c'est lui, le problème, grincé-je en épluchant une pomme.

Naïm opine doucement, et ses yeux se perdent un instant dans le vide avant qu'il ne déclare :

- Dans tous les cas, je comprends mieux comment tu parvenais à éliminer mes hommes un par un, maintenant.

Je laisse échapper un soupir, mais ne réponds pas. Alors, il reprend :

- Demain, vous allez vous entraîner à l'extérieur.

Je lui jette un coup d'œil.

- Pourquoi ça ?

Il esquisse un sourire. Ses yeux vairons brillent à la lumière du plafonnier placé juste au-dessus de nos têtes.

- Je vous teste, Lou...

***

- La salle d'entraînement n'est pas par-là, constaté-je alors qu'Owen me guide dans les couloirs.

Ses doigts sont enroulés autour de mon poignet, si froids qu'ils me donnent presque des frissons. Il me jette un coup d'œil.

- Naïm a décrété que vous vous entraîneriez dehors, aujourd'hui, me répond-t-il, et ma conversation de la veille avec le chef me revient à l'esprit.

- Je vois.

Mes yeux dévient sur son pistolet, à sa ceinture. Habituellement, il le garde à la main. Je commente :

- Tu sais que je pourrais tenter de m'enfuir à tout moment ?

Pour toute réponse, il s'arrête, me lâche, et recule d'un pas.

- Je t'en prie. Tu n'irais pas bien loin. Je ne suis pas mauvais tireur non plus.

Je n'en doute pas une seconde. Naïm m'a déjà dit qu'il était l'un de ses meilleurs élèves. Alors, je hoche la tête et me remets en marche. Owen revient bien vite à côté de moi, attrape mon bras et me fait tourner à gauche sans un mot. Je le laisse me guider jusqu'à des escaliers escarpés, et nous finissons par déboucher sur un immense garage, ou des tas et des tas de voitures sont garées. Des hommes et femmes se hâtent vers certaines de celles-ci, et un bouchon a déjà commencé à se créer juste devant la porte de sortie, je suppose, qui n'est pas encore ouverte.

Nous nous avançons jusqu'à l'une des voitures, et Owen ouvre la portière pour m'inviter à entrer à l'arrière. Il rentre après moi, et je me retrouve compressée entre un homme en uniforme et lui. Le véhicule démarre et commence à rouler, et le trajet se déroule dans un silence de pierre. Owen triture son pistolet en regardant fixement devant lui, comme s'il était anxieux. Je me retiens de lui demander d'arrêter, je sais qu'il ne le ferait pas.

Une trentaine de minutes plus tard, nous arrivons à destination, et lorsque je sors et que je regarde autour de moi, je hausse les sourcils. Nous sommes au beau milieu de nulle part, dans une sorte de petite prairie totalement ouverte sur les bois. Le terrain est légèrement en pente faute d'être au milieu des montagnes, mais rien de trop dérangeant. Amal et les cinq autres sont déjà là.

SolivagantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant