20 : Jalousie et mise en garde.

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Lucile a beau dire à Caro de se mêler de ses affaires, elle est certaine que la jeune femme n'en fera qu'à sa tête. Et cela a le don d'agacer Lucile, particulièrement quand Caro a décidé d'éloigner cette dernière coûte que coûte d'Icare. Lucile ne sait pas si elle devrait lui en être reconnaissante de l'empêcher de tomber amoureuse d'un meurtrier, mais voilà, Lucile est perdue entre ce qu'elle aimerait faire et ce que les autres voudraient qu'elle fasse. Elle sait qu'elle vit pour elle, mais il y a tellement de limites qui se posent contre elle qu'à chaque fois, elle ne sait pas si elle doit les franchir ou non.


Il ne restait que le dernier atelier littéraire avant les vacances de Noël, où il était convenu que lors de ces deux semaines, l'initiative de Carole prendrait un petit moment de pause aussi. Lucile devrait donc être enthousiaste de retourner à la prison, un peu triste aussi parce qu'elle devra attendre plusieurs semaines avant d'y revenir, mais pour l'instant, le seul sentiment qui l'emporte, c'est la colère qu'elle tente de dissimuler.

Elle a lancé un regard de tueur à Caro dès lors qu'elle a vu venir son amie accompagnée d'Adrien. C'est bien la dernière personne que Lucile avait besoin de voir. Déjà qu'au collège, Lucile tentait tout pour l'éviter, parce qu'Adrien lui faisait bien comprendre qu'il aimerait aller plus loin pour tous les deux, Lucile comprend que l'idée ne l'emballe pas du tout. Du coup, cela fait deux semaines qu'elle s'est mise à traîner avec un professeur d'anglais, un homme terriblement timide ayant du mal avec l'autorité pour ses élèves, mais incroyablement gentil. Certes au début, il ne parlait pas beaucoup à la jeune femme, pour peu à peu lui parler de ses passions, comme les films de science-fiction ou encore de ses voyages en Ecosse. Donc tant que son collègue restait avec la jeune professeure d'histoire, Adrien évitait de remettre sur le tapis le sujet d'un nouveau rendez-vous. Lucile était fière d'elle mais elle savait que cette situation ne pourrait pas durer infiniment, qu'elle ne pourrait pas donner de suite aux espoirs d'Adrien. Parce qu'elle tombait amoureuse d'un détenu.

Mais ce jour-là, quand Adrien est venu dans sa voiture, Caro déjà en passagère et un sourire fier aux lèvres, Lucile a vu rouge. Surtout qu'avec un air faussement innocent, Caro a ajouté « c'est que cela devient compliqué l'atelier quand on est seulement deux, alors Adrien viendra nous donner un coup de main de temps en temps, l'administration est d'accord ». Lucile aurait juste aimé qu'elle soit au courant de cette initiative un peu plus tôt. Ce n'est pas comme si Adrien était amoureux d'elle et que de plus il ne ressentait aucune empathie particulière pour les prisonniers !





Alors quand Carole et ses deux compères débarquent dans la bibliothèque, Lucile remarque immédiatement les regards intrigués tournés vers eux, en particulier sur Adrien. Et surtout, un regard méfiant plus que les autres ne peut s'empêcher de dévisager cet inconnu. Cela impressionnera toujours Lucile, la manière dont les détenus semblent se méfier de quelque chose de nouveau venant de l'extérieur. En particulier Icare. On dirait qu'il craint tout élément inconnu qui débarque dans la prison, le seul lieu qui doit lui être malheureusement familier.

Puis Carole avance doucement pour s'asseoir au milieu des détenus, et alors que Lucile semble hésitante à la suivre, elle sent la main d'Adrien se poser sur son épaule pour l'encourager à aller avec son amie. Lucile prend la chaise vide à côté d'Icare, pas très à l'aise. Elle revoit encore les gros titres de l'article internet. Elle frôle un meurtrier, dont elle est effrayée et envoûtée à la fois. Elle entend la chaise à sa gauche se tirer pour qu'Adrien s'y installe, alors que Carole lance les présentations de ce nouveau venu face à son petit public.

Après de longues secondes à soutenir le petit groupe du regard, Icare baisse les yeux, un air fermé sur le visage. C'est décidé, il n'aime pas cet Adrien. Il s'est toujours méfié des gens de l'extérieur parce qu'il sait que tout le monde le détesterait hors de ces murs. Quand un inconnu débarque ici, il lui faut toujours du temps pour qu'il fasse confiance, et ce n'est pas dit qu'il y arrive. Rare sont les personnes à qui il accorde cette chance.

IcareOù les histoires vivent. Découvrez maintenant