Prologue.

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— Icare Fargès, vous avez été reconnu coupable d'homicide volontaire, trancha la voix d'un des juges pour enfants, qui sembla cependant toujours étonné du prénom atypique du condamné face à lui.

Des regards, ceux haineux de la famille de la victime, choqués et révulsés des citoyens d'assise, contrariés des juges, mais aussi celui embêté du jeune avocat commis d'office, intrigué du Procureur de la République, se portèrent sur un gamin, assis sur un banc inconfortable de la cour d'assises pour mineurs. Il baissait la tête, honteusement. Ses pupilles indéfinissables scrutaient le sol, lamentablement, alors que son destin appartenait aux magistrats en tunique noire face à lui, et surtout, au panel de citoyens qui le voyaient comme un vulgaire assassin sanguinolant.

Un homme, en larmes, regardait aussi le garçon. Son garçon. Son petit garçon. L'enfant qu'il avait élevé, à qui il avait appris la vie, et qui aujourd'hui le voyait coupable d'avoir donné la mort. Il se disait que c'était un cauchemar, qu'il allait se réveiller, mais non, il restait toujours là, sur le banc du tribunal, en train d'assister à la sentence d'un meurtrier.

— En application de l'article 221-1 du Code pénal, et des dispositions particulières de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, la cour a décidé de vous condamner...

Pendant une seconde, le jeune homme leva la tête. Les diverses personnes de la salle d'audience retenaient probablement autant leur souffle que lui. Il était coupable. Il serait condamné. Avait-il l'âme d'un meurtrier ? Une silhouette marquée par le sport, des tatouages recouvrant totalement ses bras, un regard menaçant et insolent des gosses qui apprennent des coups bas de la vie, sans doute que le jeune homme de dix-sept ans n'avait pas l'apparence d'un ange. Mais il ne voulait pas devenir le monstre que les autres voyaient en lui.

— A quinze ans de réclusion criminelle, conclut le juge.

Et pour la première fois depuis qu'Icare avait tué, une larme perla sur sa joue. Il tombait. Il avait touché l'interdit, et désormais, il chutait vers les abysses. Il se consumait avant de se noyer.

Des cris se firent entendre dans l'assemblée. La famille de la victime, hurlant à une peine trop laxiste pour un meurtrier. Le jeune avocat du condamné, au contraire scandalisé de la dureté de la sentence pour un mineur. Et un père de famille, qui voyait son garçon voué à quinze ans derrière les barreaux, maudissant une fois de plus la vie, la séparant de son fils unique. Personne ne se mettait d'accord.
Et au milieu de ce désordre, le chaos. Une âme immobile, aux joues humides et au destin brisé. Icare savait que ce serait sa fin.

Icare avait volé, désormais, il brûlait en enfer.

IcareOù les histoires vivent. Découvrez maintenant