38 : Parce qu'on n'oublie jamais.

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Icare se lèverait presque de bonne humeur. Presque. Parce que même s'il est heureux d'aller au travail, se réveiller à quatre heures quarante-cinq précises n'est jamais facile. Il met plusieurs minutes à éteindre son réveil, et c'est un défi quotidien d'être prêt dans les temps. Il y arrive, dans un état ensommeillé, mais il y arrive.

Carlos, son collègue, s'est proposé pour l'amener en voiture, comme il est sur son chemin. Il le ramène aussi en rentrant comme ils ont les mêmes horaires. Icare était gêné au début, mais son nouvel ami ne lui a pas trop laissé le choix. Comme il l'affirmait, Icare était sur sa route de toute façon, et cela lui faisait de la compagnie pour le trajet (d'à peine cinq minutes, mais cinq minutes de bavardages pour Carlos, c'est toujours précieux).


Arrivé au magasin, Icare commence à prendre ses habitudes. Il suit Carlos pour enfiler sa veste, salue les collègues qu'ils croisent (et dont Icare essaie à chaque fois de se remémorer les noms, chose non facile. Par contre, lui, c'est rare que quelqu'un oublie son prénom atypique). Puis il va dans la réserve chercher l'ensemble de ses marchandises, alors que Sylvain le patron le laisse désormais gérer seul son rayon, et qu'en cas de doute, Carlos est juste à côté. Il sait même passer ses commandes seul, et doit déjà faire face aux clients qui demandent toujours la localisation de tel ou tel produit, ou qui se mettent à râler un peu pour rien. Mais il s'y fait, parce qu'il sait qu'il est plus heureux ici qu'en prison.

Mais parfois, il se met à penser aux fois où il râlait avec Marco avant d'aller bosser, et cela lui manque. Miguel et Abel lui manquent aussi. Icare est heureux, mais en même temps, triste d'avoir quitté ses amis. Marco avait dit qu'il les oublierait au bout d'une semaine dehors, Icare pourrait aller le voir aujourd'hui et lui dire que tout cela était faux. Les autres détenus lui manquent. Il aimerait qu'ils soient libres eux aussi.

— Hé, Icare ! Tu penses à quoi ? le coupe soudainement Carlos.

Icare regarde le carton qu'il doit tenir dans les mains depuis plusieurs minutes. Le problème c'est qu'il ne peut pas dire à quoi il pensait. Enfin si, il pourrait. Mais il craint qu'on le juge pour ce qu'il a fait, et ce qu'il a été.

— Rien, j'étais très inspiré... Par les pompotes à l'ananas, répond finalement Icare en observant le carton qu'il tenait entre les mains.

— Allez, viens. C'est l'heure de la pause, un café et les potins du magasin t'inspireront toujours plus que les compotes à l'ananas, affirme Carlos en déchargeant son collègue de son carton.

Quand ils arrivent dans la salle de pause, Fabien leur a déjà préparé leurs cafés. Icare s'installe à sa table habituelle avec ses deux collègues préférés, alors que d'autres arrivent petit à petit. Marjolaine vient lui faire la bise avant de faire le tour de ses collègues pour leur demander comment ils vont. C'est attendrissant comment elle se soucie de chacun ici. Puis elle vient s'assoir à la table d'Icare, un café dans une main. Elle y met deux sucres, comme chaque matin.


Icare écoute les conversations qui prennent part à droite et à gauche, y participe quelques fois mais sans plus. Il préfère observer les gens, les comprendre, avant de se livrer. Carlos est le plaisantin du magasin, quelqu'un avec qui on est forcé de bien s'entendre au vu de sa bonne humeur. Marjolaine est gentille et comme une maman pour tout le monde ici. Fabien est un peu plus froid en l'apparence, mais quand on le connait, il est extrêmement gentil. Jules est un phénomène. Il raconte tout de sa vie, de ses conquêtes, livre les anecdotes d'une poisse qui semble le suivre depuis la plus tendre enfance, mais dont il semble en rire à chaque instant, alors qu'il aime partager ses situations comiques avec ses collègues.

IcareOù les histoires vivent. Découvrez maintenant