Un poing s'abat violemment sur le punchingball de la salle de sport. La seule pensée d'Icare se concentre sur la nécessité de frapper cette cible. Ça lui évite de penser à Lucile. Il aime penser à elle, il est amoureux de son visage quand elle vient dans ses pensées. Mais s'il pense trop à elle, au baiser échangé dans la remise, cela le rend malade parce qu'il en a besoin à nouveau, mais cela n'arrivera pas. Il désire une personne plus que tout au monde, mais il ne peut pas l'atteindre, prisonnier de la société. Alors il frappe, transpire, remplit son corps de douleur pour oublier tout ça.
Puis d'un coup, il arrête tout. Il remarque une silhouette immobile face à lui. Ses bras tombent le long de son torse nu et brillant de sueur. Jauris sourit d'une façon presque imperceptible, mais qu'Icare voit immédiatement. Ses poings se serrent par réflexe, alors que son cœur qui bat déjà à tout rompre à cause de l'exercice physique manque d'accélérer la cadence par la peur.
Déjà qu'Icare est mal à l'aise depuis presque deux semaines dès qu'il croise Jauris dans la prison, là, il est complètement paralysé, à moitié dénudé devant le surveillant. Il s'en fout que les autres détenus, quels qu'ils soient, le voient torse nu. Mais maintenant, c'est différent pour Jauris. Il se sent frêle et faible par rapport à lui. Tout le monde dans cette salle de sport voit probablement Icare avec sa masse de muscles, le caractère explosif qu'il ne faut pas perturber, le regard menaçant tel un prédateur qui cherche une proie. Jauris ne le considère pas ainsi. Il sait qu'il a l'avantage. Contrairement aux autres, Icare ne lui fait pas peur. C'est le prisonnier qui tremble en voyant son image.
Un frisson parcourt la chair d'Icare, avec l'impression qu'une main vient se poser sur sa peau nue pour la caresser, toucher les contours de ses tatouages, les creux de ses muscles, et finir sur la naissance de son boxer.
Le cœur d'Icare s'emballe quand il sent vraiment une main se poser au niveau en bas de son dos. Mais le toucher et tout sauf lent et sensuel.
Marco le pousse brutalement d'un petit coup de poing. Icare baisse le regard vers lui, et Marco allongé sur l'appareil de musculation lui murmure tout doucement :
— Il se passe quoi ? Tout le monde te regarde mec.
Icare dévisage lentement autour de lui. En effet, tous les autres détenus ont arrêté leur sport, ils observent Icare dont les mouvements ont été stoppés, alors que le jeune homme ne peut s'empêcher de fixer comme une statue le gardien qui vientsans doute surveiller qu'il ne se passe rien dans la salle de sport.
— Un problème Icare ? le provoque Jauris d'une voix qui est tout sauf innocente.
Icare tente d'oublier l'épisode du piège de Jauris dans la remise. Mais il n'y arrive pas. Il a compris à quel point les événements tristes et honteux de l'existence restent toujours plus facilement ancrés dans la mémoire. Lui, il a l'impression que sa vie entière est bloquée dans ses souvenirs.
Quelques gars chuchotent autour. Depuis les tentatives de suicide d'Icare, il se dit qu'il est fou. Certains ont entendu parler d'une procédure de liberté conditionnelle, ils pensent qu'en réalité, l'administration veut faire interner le détenu dans un hôpital psychiatrique à l'extérieur. D'autres disent qu'il est dépressif, d'autres bipolaire, ou paranoïaque. Icare finirait par les croire. Les détenus racontent qu'il finira par vraiment réussir à se suicider.
— Icare ? répète avec un calme déconcertant Jauris.
— C'est toi le problème ! rugit soudainement Icare.
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Icare
Romansa*Histoire contenant l'équivalent des Tomes 1 et 2* Lucile, jeune professeure d'histoire pétillante, ne pensait pas qu'elle remettrait toute sa vie en question suite à une simple rencontre. En effet, quand son amie, une infatigable libraire, lui dema...