Icare

69 : Dépasser ses peurs.

Le cœur de Lucile ne peut s'empêcher de palpiter nerveusement. Elle trouve cela un peu ridicule, parce qu'elle sait qu'Icare viendra à la gare, il lui avait promis. C'est juste qu'elle est impatiente de le revoir, même s'ils ont été séparés une semaine tout au plus et qu'ils se parlent régulièrement. Mais voilà, avec la dispute avec ses parents, elle a plus besoin que jamais de celui qu'elle l'aime. C'est comme une évidence. Il lui faut Icare.

Quand elle s'est fâchée avec sa famille, étrangement, le choix a été difficile, mais la réponse lui a pensé naturelle. 

Icare. 

Elle ne pouvait pas renoncer à lui. Elle n'avait plus qu'une seule chance : faire plier ses parents. Elle ne sait pas le temps que cela prendrait, mais elle sait qu'ils l'aiment, et qu'ils finiront, un jour ou l'autre, par reconnaître leurs torts.

Justement, un train arrive, un léger retard habituel au compteur. Lucile s'approche près des quais, alors que plusieurs passagers en descendent. Elle dévisage chacun d'entre eux, qui n'attirent pas une attention particulière envers la jeune femme. Mais cela, c'est avant qu'un jeune homme dont la taille surpasse la plupart des personnes présentes sorte à son tour du wagon. Son regard à lui aussi semble chercher précisément quelqu'un. Lucile se presse vers l'homme, et un sourire vient éclairer le visage de ce dernier quand il l'aperçoit. Lucile n'avait jamais su avant Icare ce que c'était qu'attendre son bien-aimé à la gare. Promis, elle ne se moquera plus de ce genre de scène dans les films romantiques.

Icare dépose son large sac de sport par terre et laisse la jeune femme sauter contre son cou, alors que ses lèvres viennent l'embrasser tendrement. Il dépose ses mains froides contre les joues de Lucile en accentuant leur baiser. L'agitation des passagers qui quittent les quais, le train qui repart, rien ne compte. Il a Lucile et il est heureux ainsi.

— Tu m'avais manqué Lucile.

Il reçoit un sourire de la jeune femme, qui l'enlace encore une fois. Elle hume le parfum d'Icare, une odeur qui lui avait un peu trop manqué ces derniers temps. Icare reprend son sac, et de son autre main libre, il attrape les doigts de Lucile. Un instant, il peine encore à réaliser la tournure de sa vie. Comment en quelques mois, il a pu ainsi sortir de prison et tomber fou amoureux ? Il s'était toujours dit que personne ne s'intéresserait à un pauvre taulard, ce qu'il comprenait. Il fallait bien qu'une personne aussi douce que Lucile pour changer l'ordre des choses, mais aussi autant patiente qu'elle.

Après un rapide trajet en voiture, les deux amoureux arrivent enfin à l'appartement de la professeure. Icare dépose son sac de sport dans le hall, son sourire heureux qui le suit depuis la gare ne l'ayant toujours pas quitté. Cet appartement lui avait manqué, même si y être lui rappelle que c'est parce qu'il n'est plus le bienvenu chez les parents de la jeune femme.

— Icare, ramène le sac dans la chambre s'il te plait, lui rappelle Lucile.

— Mon dieu, laisse-moi faire demi-tour pour retourner à la gare. En plus, tu es encore plus bordélique que moi, râle Icare, sans pouvoir s'empêcher de rigoler.

— C'est faux, rouspète Lucile.

— Tu es sûre ?

— Peut-être un peu, mais ça arrive à tout le monde.

Icare secoue la tête. Elle ne changera pas. Mais Lucile est bordélique, c'est un fait. Et comme pour certifier ses propos, quand Icare vient déposer son sac dans la chambre, il voit que la jeune femme a laissé un mug de thé vide sur la table de chevet, avec à côté un emballage de biscuit encore intact. Il est quasiment sûr qu'elle a laissé traîner cela depuis seize heures, puis est allée le chercher à la gare en oubliant de ranger son goûter.