CHAPITRE 1 - Le Banquier Aveugle

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- Les grands artisans disent que plus on se sert de la théière, plus elle devient belle.

Soo Lin Yao, une jeune employée du National Gallery de Londres, joignit le geste à la parole en continuant sa présentation sur les traditions du service du thé en Orient, devant un petit groupe de touristes attentifs.

- On parfume la théière en versant régulièrement du thé dessus. Le dépôt laissé sur l'argile créé au fil du temps cette belle patine. Sur certaines théières, l'argile a été polie par le thé fait il y a plus de quatre cents ans.

-

En fin de journée, alors que la voix d'un gardien résonnait par les enceintes pour annoncer la fermeture imminente du Musée, la jeune conservatrice terminait de ranger le matériel à thé centenaire dans un coffret en bois, quand un de ses collègues, Andy, s'approcha d'elle en prenant la parole de sa voix hésitante et timide.

- Quatre cents ans d'âge et ils te laissent te préparer une infusion avec. Il lança avec un petit sourire en coin.

- Certaines choses ne sont pas faites pour rester derrière une vitrine. Expliqua simplement Soo Lin Yao de sa voix douce. Elles sont faites pour qu'on les touche, pour qu'on les manipule. Elles ont besoin d'attention. Elle ajouta en tournant la tête vers lui tout en esquissant un sourire. L'argile se fissure.

- Et qu'est ce qu'une minuscule goutte de thé pourrait y changer ? Demanda le garçon en l'admirant, buvant chacune de ses paroles.

- Il faut parfois regarder une chose de près pour connaître sa valeur. Elle répondit, en soulevant une théière avec délicatesse pour l'observer. Celle ci est déjà plus brillante.

- Je suppose que tu n'as pas envie de.. Reprit Andy avec maladresse. Enfin, ça te dirais de boire un verre ? Pas du thé bien sûr, euh.. Il bafouilla timidement. Un petit verre ? Ce soir ? Avec moi.. Dans un bar ?

- Tu ne m'apprécierais pas autant que tu le penses. Déclara Soo Lin avec un sourire empreint d'une certaine tristesse.

- Et si tu me laissais en décider moi même ? Osa son collègue.

- Je regrette. Elle s'excusa. Je ne peux pas. Inutile d'insister. Elle ajouta, en fermant d'un coup sec le coffre contenant le service à thé.

-

Peu après la fermeture, alors que la plupart des employés avaient quitté le Musée, la jeune femme était en train de ranger son matériel dans l'un des rayonnages mobiles de la salle des archives, avant de s'immobiliser en entendant un bruit résonner dans la grande salle silencieuse.

- Il y a quelqu'un, c'est le gardien ? Elle lança, en jetant un oeil dans la pièce spacieuse remplie d'oeuvres d'art.

Mais aucun autre son ne lui parvint. Soo Lin sortit du rayon d'archivage dans lequel elle se trouvait, et elle s'avança prudemment dans la grande salle faiblement éclairée par les rayons pâles de la lune qui perçaient par les grandes fenêtres.

- Il y a quelqu'un ?

Elle esquissa quelque pas timides, alors que son attention était dirigée vers une grande statue en marbre recouverte d'un drap blanc, dont le tissu se mouvait lentement sous la brise légère qui arrivait à s'engouffrer dans le bâtiment. S'approchant doucement, elle retira le drap de la figure sculptée, avant de se figer d'horreur en découvrant ce qu'elle voyait.

LE BANQUIER AVEUGLE

Le lendemain matin dans un petit supermarché de quartier, le Docteur John Watson posait son panier de courses à l'une des caisses automatiques, avant de se laisser diriger par la voix électronique qui le guidait étape par étape. Le médecin sortit son premier article, et il le passa sous le scanner pour l'enregistrer, avant d'attraper le suivant.

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