L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 1) : La forteresse de neige

41 ~ Sylath

Sylath a un sourire qui ressemble à un rire. Ila n'a pas compris d'où viennent les fidèles du Temple apparemment. Il s'est sans doute accroché à l'idée qu'il s'agisse de réfugiés. C'est une conclusion bienveillante et simple. Par moments, avec ses grands principes et cette sorte de naïveté, il a des airs de chevalier qui plaisent au vampire.

Comme quand il prétend préférer mourir une arme au poing. Mais après tout songe-t-il, il est buté, et il ne sert à rien de se battre contre lui ou de tenter de le convaincre, tout ne fait que le braquer. Il est midi, réfléchit Sylath, s'il part maintenant il le retrouvera sans mal au milieu de la nuit, épuisé et transi de froid. Peut-être qu'alors face à l'imminence de la mort, cette tête de mule reconsidèrera son offre.

Sylath se lève et ouvre le tiroir d'une commode. Il en sort un petit tas de vêtements, ceux que l'humain portait quand il est arrivé, et qui ont été lavés, ses bottes, sa besace et toutes ses armes. Il rajoute à cela une outre en peau de loup arctique, dans laquelle l'eau ne gèle pas, et une boussole en argent ciselé, presque une œuvre d'art.

— Voilà, dit-il en croisant le beau regard noir déterminé. Va donc mourir ton épée à la main. Et puisque les cadavres gelés se ressemblent tous, tu expliqueras au Veilleur que fuir cet endroit était un acte de bravoure et que tu l'as prouvé par ton vain sacrifice. J'espère que tu ne souffriras pas trop, je t'aimais bien.

Le vampire se rassoit dans son fauteuil. Et bizarrement cette fois, il espère qu'il va se dépêcher de partir, parce qu'il réalise qu'il s'est trop négligé. Obnubilé par la présence d'Ila, il en a oublié de se nourrir, et son manque de sang se manifeste à lui sous la forme d'une sensation de manque violente et d'une excessive pâleur qui, il le sait, doit rendre apparents les vaisseaux de son visage. Il serre ses doigts sur les accoudoirs pour cacher leur léger tremblement, et respire le moins possible pour que l'odeur d'Ilashan n'emplisse pas ses narines.

Dès qu'il sera parti, se promet-il, il se rendra aux dortoirs, réveillera un esclave, et il fermera les yeux en mordant sa gorge pour pouvoir imaginer que c'est le corps du mercenaire qu'il sert contre lui. Cela peut-être, calmera sa tension.