147 ~ Sylath

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Ilashan écoute ses explications et cette fois aucune expression de peur ne déforme ses traits. Il a pourtant l'air lucide, malgré l'alcool. Seul son corps trahit une agitation intérieure, son cœur bat fort et sa respiration est un peu rapide.

Mais le seul mot qui sort de sa bouche est une acceptation. Sylath sait d'avance que ce n'est pas terminé, Ilashan ne va pas devenir un doux esclave docile. Alors même qu'il lui tend sa gorge, son intention de quitter la Forteresse à la fin de l'hiver ne doit pas être modifiée. Et il est certain que leurs éclats de colère n'étaient pas les derniers. Le mercenaire est une forte tête, ils auront d'autres disputes. Mais à cet instant précis, Ilashan a baissé les armes. Plus même que Sylath l'aurait cru.

Le vampire se rapproche et pose une main derrière la nuque d'Ilashan. Quand il presse ses lèvres contre la chair offerte, le frémissement d'Ilashan se transmet à son corps et il lui semble que son cœur l'appelle.

— Merci, souffle-t-il, en embrassant la gorge de l'humain.

Le présent qu'il lui offre a une valeur inestimable, c'est un peu de sa propre vie qu'il lui laisse boire. Et parce que c'est Ilashan, qui le craint tant, cela n'en est que plus précieux. Il renforce légèrement la pression de sa main sur la nuque de l'humain pour l'inciter à rester immobile. Il pourrait lui faire mal s'il bougeait. Mais il a le sentiment que le mercenaire n'a pas du tout l'intention de se dérober. Il a plutôt l'impression qu'il en a besoin, ainsi que son instinct l'avait pressenti.

Il entrouvre la bouche et retrousse assez les lèvres pour venir presser ses crocs tout contre la veine. Un soupir de plaisir lui échappe lorsque ses dents s'enfoncent dans la chair. Il est doux mais ferme pour que la peau ne lui résiste pas et dès l'instant où il atteint la veine et où il sent les premières gouttes de sang couler dans sa bouche, il retire les crocs.

Garder les dents dans la plaie pendant qu'on boit rend l'acte plus lent et un plus douloureux pour l'humain, mais aussi plus excitant pour le vampire. C'est quelque chose qu'il réserve généralement aux moments où il se nourrit pendant le sexe, avec des humains dociles et confiants.

Pour Ilashan, son seul souci et du lui épargner toute douleur. Et une fois qu'il a dégagé ses dents des plaies, il presse doucement sa langue contre les deux petites blessures pour y recueillir le sang qui en jaillit au rythme un peu affolé du cœur de l'humain.

Sylath passe son bras libre autour du dos d'Ilashan, son autre main fourrage dans ses cheveux. Ses yeux se ferment tout seuls de plaisir lorsqu'il avale la première gorgée de sang. Il était tellement attentif à Ilashan qu'il en a oublié son propre plaisir, mais à l'instant où le sang de l'humain coule en lui, il ne peut plus l'ignorer.

C'est un soulagement bouleversant. C'est exactement ce dont il avait besoin et sa soif s'apaise au rythme des petites gorgées qu'il avale. Comme toujours, Sylath sent tous ses sens s'aiguiser et son corps se réchauffer. Mais il y a quelque chose d'autre, un plaisir plus farouche qui déferle sur lui. Un mélange du goût sucré de la liqueur, de l'ivresse d'Ilashan qui coule en lui, du souvenir de son regard dans la chapelle quand il l'a embrassé sur le front, de la sensation enivrante de son corps contre le sien, et de sa chaleur qui se diffuse en lui.

Le vampire pourrait passer des heures suspendu à sa gorge, à le boire tout doucement, goutte par goutte, mais Ilashan a traversé une tempête de neige, des galeries glacées et une maladie, en moins d'une semaine. Il ne doit pas l'affaiblir plus.

Sylath mord sa propre langue et frotte les deux petites plaies avec son sang jusqu'à ce qu'elles disparaissent. Il reste encore quelques instants, les lèvres pressées contre la gorge de l'humain qu'il embrasse doucement.

Puis il recule légèrement et cherche le regard d'Ilashan dont il sonde les profondeurs sombres.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 1) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant