46 ~ Ilashan

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La propre impuissance d'Ilashan à se défendre le fait enrager. Mais il n'a pas le temps de laisser sa colère se manifester encore. La douleur le transperce, vive et pénétrante, lui arrachant un cri de surprise et de souffrance mêlée.

Il a déjà reçu des corrections. Petit, ce genre de traitements l'attendait fréquemment quand il dépassait les bornes. Plus âgé, les mercenaires qui l'ont formé n'avaient pas lésiné non plus à le rendre plus résistant à ce genre de tortures. Mais la douleur est aussi vive qu'au tout premier jour, et il n'avait jamais été confronté à la précision mortelle d'un bourreau si expérimenté.

Il a le reflexe salvateur de mordre les draps à sa portée pour serrer les dents et encaisser la douleur, étouffant à peine les grondements qu'il ne peut retenir, même avec toute la volonté du monde. Chaque coup le fait trembler, contracte les muscles de son corps tout entier, crispe ses doigts et ses orteils malgré les liens et les pressions qui les contiennent.

La séance lui paraît bien trop longue, chaque coup le laissant à bout de souffle et lui faisant espérer qu'il soit le dernier. Quand Sylath s'arrête enfin, Ilashan ne s'en rend pas tout de suite compte. Ses oreilles sifflent et sa tête bourdonne sous l'écho de son propre cœur. Le bas de son corps n'est plus qu'une vaste zone irradiante de douleur, et il ne sent même pas son propre sang ruisseler sur ses cuisses. Ne comprend pas tout de suite non plus que c'est la main de Sylath qu'il sent sur sa nuque, ni ce que ce dernier est en train de faire.

La sensation de cette langue inquisitrice lui aurait donné des hauts le cœur, dans d'autres circonstances. Mais ses muscles sont si crispés qu'il n'a même pas la force de se débattre. Le visage enfoui dans les draps, sa respiration est aussi rapide que saccadée. Un long frisson le traverse, et un réflexe nerveux agite son corps.

Son sang ? Il ne comprend pas un traître mot de ce que Sylath raconte. Mais cette façon qu'il a de le lécher est presque aussi éprouvante que le traitement qu'il vient de lui faire subir. Ilashan aurait voulu répondre par une insulte ou une remarque cinglante, mais sa mâchoire est trop contractée, son esprit bien trop vide. Et pourtant... il a l'étonnante sensation que la douleur est bien moins cuisante qu'elle n'aurait dû l'être, si ses chairs étaient toujours à vif. Il sent ses liens être défaits, la pression du corps sur le sien s'alléger, mais il reste allongé sur le matelas, bien incapable de bouger dans l'immédiat. C'est à peine s'il étouffe un juron inintelligible contre le matelas.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 1) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant