110 ~ Ilashan

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Ilashan ne pensait pas trouver si vite le vampire, et a un léger mouvement de recul en reconnaissant sa silhouette près de la cheminée. Il ne l'a pas entendu rentrer, dans cette chambre pourtant adjacente à la sienne. Prudemment, il referme la porte de séparation derrière lui, mais le regard bleu de Sylath n'exprime plus le désir et le danger. Il a au contraire retrouvé sa sérénité de glace.

Quelque chose a dû apaiser le vampire. Quoi donc ? Ilashan n'a aucune envie de le savoir, mais s'avance malgré tout vers lui, réunissant sa détermination. Le besoin de savoir est bien plus féroce que la méfiance qu'il lui inspire. Et il veut bien lui accorder, juste pour cette fois, une toute petite parcelle de confiance. Sylath est un homme de foi. Il ne lui mentira pas sur un sujet pareil, Ilashan en a la conviction.

— Est-ce que votre dieu... est un dieu jaloux ?

Pas assez de détermination, peut-être, pour recouvrir l'hésitation de sa voix. Il a conscience que sa question doit sembler aussi confuse que puérile, mais peine à trouver les bons mots. Même ses pensées sont embrouillées, l'empêchant d'exprimer ce qu'il voudrait dire. Alors il tend la main pour laisser pendre son médaillon au bout de sa chaîne, le montrant à Sylath. Le métal prend des reflets cuivrés devant les yeux bleus du vampire.

— Le mien ne l'est pas. Il accepte qu'on puisse se tourner vers d'autres réconforts quand son pouvoir ne nous suffit plus, et... vers d'autre dieux quand lui ne peut plus nous atteindre. À condition qu'on ne l'oublie pas.

La nuit a beau être longue et noire, le soleil se lèvera malgré tout au matin, et éclairera à nouveau ceux qui chercheront sa chaleur.

C'est du moins ce qu'on lui a répété durant toute son enfance, et qu'il n'a cessé ensuite de se murmurer à lui-même, pendant toutes ces années d'éloignement. Avec l'impression que chaque fois que le soleil caressait sa peau, le souvenir et la présence de son dieu d'enfance n'était plus si loin.

Et voilà comment il le remercie. En acceptant une épée de glace, et beaucoup d'autres faveurs encore, au sein du temple d'un autre.

— Je veux bien reconnaître la... puissance de votre Veilleur, mais je ne compte pas renier celui qui m'a protégé toute ma vie. Seulement... je me demande s'il peut m'entendre, ici.

Et si le Veilleur n'en prendrait pas ombrage. Prier une divinité est une chose, courroucer un dieu en est une autre, qu'il se garderait bien de faire. Il se demande si accepter l'un signifierait renoncer à l'autre, et inversement. Auquel cas, entre l'hiver et le soleil, son choix est déjà fait. Mais il fixe quand même Sylath, espérant en silence que pour une fois, le vampire n'anéantira pas tout le maigre réconfort qu'il pourrait tirer de ses réponses.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 1) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant